517- Parallèlement (journal extime) (14)

Publié le par 1rΩm1

 

Parallèlement : Paris-Marrakech-Paris (journal extime)

5 mars – 14 mars 2014

 

[17 mars :] retour sur la soirée de la veille [12 mars]

Naguère, j’aurais, sinon aussitôt, du moins le lendemain, écrit le récit de ma soirée avec ****.

C’est avec lui et par lui que j’ai terminé mon séjour.

Naguère, c’est avec et par lui, soulevé par sa présence, que j’aurais entamé mon séjour.

L’affection demeure.

Mais ce qu’il reste de la soirée a tout d’une écume dont les bulles crèvent à l’air.

 

[C’est là ce que j’ai écrit sur le moment, qui m’apparaît évidemment comme très injuste, retracé plus de six mois ensuite. Mais ****, au vrai, s’était montré aussi très injuste avec moi dans les mois qui ont précédé. Il n'importe que peu : nous sommes assez intelligents, j’espère, pour pouvoir départir les pensées du moment de ce qui les transcende, l’affection n’étant, elle, pas une écume vaine...]

 

*  *  *

Nous avons dîné dans un restaurant non loin de chez Pascal et F. Le service était un peu long, mais le repas, plutôt bon.

Il me paraît au début de la conversation que **** affûte son esprit de contradiction, voire qu’il cherche quelque escarmouche — et que, mon opposition n’étant pas suffisamment marquée, il y renonce bientôt.

Il me demande des nouvelles de Duncan et s’effare que j’aie pu oublier le prénom du lover rencontré au mois d’août... Il me semble alors comprendre quelles pensées animent sa surprise, et je lui donne raison, non d’ailleurs pour cette raison précise, mais dans tous les cas : je devrais me souvenir, ce n’est ni du cynisme de ma part (pourquoi d’ailleurs ferais-je preuve de détachement ?) ni un manque d’intérêt ou de satisfaction — au contraire, mais le fait est là : j’ai la mémoire qui flanche... Heureusement, il ne commente pas plus avant, et je n’ai donc pas à me justifier...

D’ailleurs, **** est bientôt tout occupé par la vision d’un homme au comptoir non loin de nous en conversation avec un autre, dont il me dit qu’il doit être un de ses correspondants, jamais rencontré, par l’intermédiaire de tel site — personne dont il me fait alors un éloge vibrant. Mes coups d’œil à la dérobée sur l’homme qu’il m’a désigné, le plus proche de moi, ne m’assurent pas d’être certain de partager son enthousiasme, mais je n’aurais évidemment cure de le dire, d’autant que je vois bien que **** est lancé, intarissable dans son flux verbal, s’interrogeant notamment s’il doit ou non se manifester auprès de ce quidam, qui, à moi, me paraît bien fade... Je suis néanmoins amusé de l’effet qu’il produit chez ****. Il me réclame bientôt un morceau de papier et griffonne à la hâte quelques lignes (dont il me dira ensuite que c’étaient ses coordonnées)... Cela fait, il se lève, se dirige vers les deux hommes et entame une conversation, qui laisse d’abord perplexe son interlocuteur, me semble-t-il. Ne voulant cependant pas paraître indiscret ni ajouter une éventuelle confusion à l’un ou l’autre des protagonistes (je songe surtout au quidam, puisque je connais les raisons de l’abordage tenté par ****), je détourne bientôt mon regard, attendant que **** revienne.

[A quelques mois de distance, je ne suis évidemment plus très certain de mes souvenirs. Mais, si cela ne s’est pas déroulé à la lettre ainsi, j’espère en avoir retracé l’esprit. Et j’approuve évidemment l’audace de ****, même si je me trouve un instant délaissé (!) — et dans l’incompréhension de ce qui peut soulever ainsi son enthousiasme… Ce n’est pas la première fois d’ailleurs que je constate nos divergences de goût(s) en ce qui concerne les attirances de l’un et de l’autre, alors que j’ai toujours supposé de mêmes désirs, de mêmes besoins à satisfaire... mais je peux — bien sûr ! — très largement me tromper sur ce dernier point, que fondent néanmoins des confidences et clins d’œil faits par ****, ce qu’encouragent l’amitié et notre amusement, je crois, de nous raconter nos rencontres, parfois chaotiques, avec les lovers...]

 

**** revenu, la conversation se poursuit. [Je ne me souviens plus très bien de ce qu’il a pu retracer de son échange avec le quidam au comptoir... Peu de choses sans doute. Une promesse vague que l'autre l'appelle, me semble-t-il...]

 

Il me dit ne pas trop aimer non plus la nouvelle mouture du site, comme si, dit-il, ses promoteurs avaient voulu le faire couler. La démarche m’en paraîtrait étrange, mais j’explique combien le langage HTML appris avec N*** et T*** me sert de peu — et combien je me trouve dépossédé des mises en forme que je maîtrisais naguère à force de persévérance et de la vieille logique obstinée en moi qui veut que si l’on cherche un certain résultat en matière de traitement de texte informatique (ou plus généralement quant aux objets techniques dont on attend certaines fonctions) on doit pouvoir en trouver les moyens — ce à quoi le nouveau site m’a souvent apporté de cinglants démentis, peut-être parce que ses moyens — précisément — sont trop rudimentaires...

Nous revenons sur l’interdiction qu’il m’a faite à un moment donné de parler de lui, interdiction à laquelle la série d’astérisques ici est le seul compromis que j’aie réussi à trouver pour ne pas amputer mes récits des rencontres faites lors de séjours à Paris ou ailleurs. Je proteste une nouvelle fois que je ne crois pas avoir jamais vraiment trahi son intimité. Il revient alors sur un rêve érotique que j’avais fait à son propos, que j’aurais prétendument divulgué. Or, si je sais que les lecteurs de romans confondent parfois fiction et réalité, je ne suis pas un lecteur de romans abusé par mes rêves : je n’ai jamais eu le bovarysme imbécile de croire que ce que j’ai rêvé est conforme à ce que j’aurais pu vivre si le fantasme avait pris corps (si j’ose dire !). En tout état de cause, le reproche est infondé : ces lignes n’ont jamais été retranscrites et n’ont été transmises qu’à lui seul — S. exceptée, mais qui en avait les entières clés et sait lire par-dessus les épaules de **** ou de moi bien mieux que **** ou moi ne saurions le faire. Je les avais transmises à **** parce que je souhaitais ne rien lui dissimuler : c’est la version intime de mon séjour à Paris à l’automne 20** que je lui avais fait parvenir, sans coupure d’aucune sorte, les phrases supprimées étant signalées par un changement de couleur (bistre, en l’occurrence).

Quoi qu’il en soit, revenant sur cette interdiction qu’il m’a faite, il me laisse entendre que je pourrais, en fait, l’enfreindre. Il me dit que c’est davantage un souhait, au fond, qu’une interdiction, qu’il « aimerait » — il insiste sur le conditionnel — que, sur certains chapitres, il ne soit pas nommément désigné. Et moi, je sais qu’expurgé des moments que nous passons ensemble, mon « journal extime » perd de sa vérité : s’il y a nécessairement des aspects que je tais, me concernant moi, concernant les autres, il ne doit pas pour autant comporter de trous…

L’occasion lui est donnée de parler de mon écriture. Il a lu, semble-t-il, mes derniers billets — et commente mon écriture, « classique » me dit-il...

Comment lui donner tort ? Je serais content de ce compliment — si c’en était un dans son esprit —, si, pour ce qui me concerne, je ne trouvais pas quelquefois mon écriture empesée...

 

517- Parallèlement (journal extime) (14)

 

*  *  *

Notre repas terminé, nous nous installons à la terrasse d’un premier bar bien trop bruyant. C’est pourquoi nous nous rendons dans un autre. Cependant, nous avons beaucoup bu, et l’effet s’en fait sentir. La fatigue alors pèse comme une chape sur le dos et les reins, laissant croire à la possibilité d’un sommeil réparateur...

Nous nous quittons à la station Parmentier.

 

517- Parallèlement (journal extime) (14)
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article