522 - Paris - Lille - Paris : journal par (r)accroc (2)
Paris – Lille – Paris : journal par (r)accroc
(journal extime, 19 octobre – 28 octobre 2013)
Di 20
Assiste séance d’enregistremt des Papous ds la tête au th du Rd-Pt. Utilise le GPS du portable. Tjs cette fascinat° de voir se déplacer le losange bleu qui indiq ma position à mesure q j’avance.
Salle — celle-ci est gde — à ½ sinon aux 2/3 vide.
Vérifie q le rire est communicatif Voisine bon public. Rire irrépressible [parfois sans vraie raison]
Laissé le pt carnet, le précieux carnet ds la salle en partant. M’en aperçois ds la station de M°. Tous mes codes d’accès à mes messageries, des pages parfois très intimes. Dépossession vertigineuse.
Dimanche 20 octobre, début d’après-midi
J’assiste à la séance d’enregistrement des Papous dans la tête, l’émission de France-Culture que j’écoute souvent le dimanche en me préparant à déjeuner, au Théâtre du Rond-Point. Pour m’y rendre, j’utilise le GPS du téléphone mobile : je demeure fasciné par le losange bleu indiquant ma position à mesure que j’avance. Cependant, je m’active d’autant plus que je pense devoir faire la queue avant d’entrer ; mais la salle, plutôt grande, est à demi, sinon aux deux tiers vide. On me remet à l’entrée un papier de la taille d’un bulletin de vote pour sésame symbolique.
Je m’amuse et m’étonne de devoir mettre des visages qui ne correspondent pas nécessairement à ce que j’aurais pu imaginer sur ceux qui n’étaient demeurés jusqu’alors que des voix. Les rouages de l’émission sont parfaitement huilés : je n’aurais pas supposé tant de professionnalisme a priori, alors même que l’émission existe depuis longtemps (je me souviens avoir signé une pétition pour son maintien une douzaine d’années auparavant, sinon davantage). Je vérifie combien également le rire est communicatif, ma voisine riant à gorge déployée suscitant mon propre rire, sans meilleure raison parfois que ce rire, et par pur entraînement...
D’autres émissions suivent. Ainsi je pourrais assister à l’enregistrement de l’émission de philosophique qu’anime Raphaël Enthoven. Cependant, si je suis sensible à la voix et au physique du bellâtre vulgarisateur, certains de ses propos m’ont suffisamment agacé alors qu’il animait encore les Chemins de la connaissance — non que ce soit devenu beaucoup mieux depuis… — pour ne pas tenter l’expérience et décide de m’en aller… J’ai passé un bon moment, raison suffisante pour ne pas s’irriter d’un sérieux dont l’idiotie n’aurait pas de prétexte philosophique autre que de faire connaître au grand public et moi-même la pensée de tel ou tel auteur avec lequel il aurait l’air, lui, d’être de plain pied et qu’il paraîtrait comme tutoyer familièrement…
* * *
Retrouvailles miraculées.
Bouche sèche. Souffle court. Les jambes ne me portent plus.
Tour du quartier. Photos.
Celui-ci, rupin.
Suis près du Champ de Mars, il est vrai, ds ma chambre de bonne.
Echange de SMS avec N*** p déterminer h et lieu d’1 RV le soir.
Serais-je puni de ces mauvaises pensées ? Je m’aperçois ensuite que j’ai laissé le petit carnet sur lequel je prends mes notes, le précieux petit carnet, sur le siège à côté du mien dans la salle du théâtre. Outre mes notes depuis mon voyage au Cambodge et au Laos, la couverture plastique contient dans son rabat tous les codes d’accès à mes messageries, comptes et autres identifiants électroniques... Certaines pages sont beaucoup moins “extimes”, par ailleurs, que ce que je peux publier ici... L’idée que quelqu’un pourrait en avoir connaissance me laisse un instant dans une sensation de dépossession vertigineuse, comme un viol de mon intimité — précisément...
C’est presque en courant que je vais de la bouche de métro au théâtre. Dans la salle où l’on fait le ménage entre deux rounds d’enregistrement on me laisse malgré tout pénétrer. A l’évidence le carnet a disparu.
On m’adresse au concierge. Je dois patienter : personne, en effet, derrière le comptoir d’accueil. Enfin — en vérité, l’attente n’est pas bien longue mais elle me paraît infinie — on vient : j’expose ma requête et suis bientôt soulagé : quelqu’un a rapporté un carnet qui correspond à la description que j’en fais sommairement — et qui est le mien en effet.
Je repars, content de ces retrouvailles miraculées, mais la bouche sèche, le souffle court, alors que je me retrouve dans la rue, évitant les flaques et les plaques de boue limoneuse, sur des jambes cotonneuses qui paraissent ne plus vouloir me porter…
* * *
Je rentre au studio. J’échange avec N*** quelques SMS, afin de déterminer un heure et un lieu pour nous retrouver le soir. Puis, comme j’aime le faire, j’entreprends un tour du quartier, l’appareil photo en poche.
L’endroit est plutôt rupin — et je ne m’étonne plus que le siège de la Manif pour tous s’y trouve : il faut dire que, dans ma chambre de bonne juchée sous les toits, je me trouve près du Champ de Mars, que je photographie malgré l’absence de soleil, mais ces couleurs automnales, ce ciel gris le parent d’un charme qui, au moins, échappe à la carte postale…