527 - Paris – Lille – Paris : journal par (r)accroc (7)
Paris – Lille – Paris : journal par (r)accroc
(journal extime, 19 octobre – 28 octobre 2013)
Paris, 23 octobre, soir
B. m’appelle, qui se dit fatiguée et reporte à 20 heures notre rendez-vous : nous devions primitivement prendre chez elle l’apéritif, mais elle a besoin de faire une sieste et propose que nous nous retrouvions directement au restaurant où elle a réservé.
Elle paraît aussi distraite. Sans doute est-elle préoccupée. Cependant, elle accroît alors en moi l’idée, qui m’effleure parfois, qu’elle trouve un peu futile ce que je lui raconte de mes odyssées parisiennes, certaines de ses mimiques — qui sait ? — pouvant passer pour de l’amusement, de l’agacement, de l’ennui... Je raisonne ma propension à l'inquiétude à ce sujet, aux impressions fausses que souvent j'ai : sans doute est-elle tout bonnement fatiguée...
La seule certitude que je peux avoir lors de cette soirée où elle se montre d’humeur un peu morne, c’est qu’elle est toujours très fâchée contre A., qui ne lui a donné aucune nouvelle depuis son passage chez elle à Paris en novembre dernier. Je comprends un peu sa colère, même si je sais que les relations d'A. et B. sont tissues de malentendus, étant moi aussi un peu irrité — dépité ? — qu'A. n'ait pris langue avec aucun de nous, M., Khadija, ou moi, depuis notre séjour en Arles, au début de l'année...
Nous nous quittons assez tôt.
* * *
Rentré, je converse avec Arnaud, un “correspondant” — le terme est sans doute abusif, puisque ses conversations se sont avérées pour le moins lapidaires et limitées — de longue date, qui doit être bientôt à Paris et que je pourrai enfin voir durant le week-end, à mon retour de Lille...
Lille, 24 octobre, matin et après-midi
Quand, débarqué de mon TGV à la gare [Europe ? Flandre ? je ne sais désormais plus laquelle des deux] de Lille — il est pourtant 10 h 45 —, brouillard et vent m’accueillent, une météorologie plus humide et froide que les jours précédents à Paris. L’écharpe, le gilet (en coton) ne seront pas de trop. Je regrette un instant de n’avoir pas dans mon sac de voyage le pullover acheté à Naples, emporté en cas de nécessité et resté dans la valise à Paris. (Cela ira toutefois mieux les jours suivants, spécialement le jour de mon départ, le samedi, soleil et ciel bleu réapparaissant.)
Je fais mes premiers pas dans la ville. Je vais d’une gare à l’autre, sans trouver de consigne, puis me dirige vers le cœur de la ville.
Après la Place de l'Opéra, je suis bientôt sur la Grand' Place, aperçois le Furet (je renoncerai à l’idée de l’explorer au vu de la presse qui s’y trouve), la grande librairie bien connue, trouve l’office du tourisme où je me renseigne sur les moyens de transports, avant d’acheter une carte dans une bouche de métro limitrophe qui me permettra de circuler librement pendant trois jours [si ma mémoire est bonne].
Je vois, dans les rues, beaucoup de mendicité.
© Internet
Alors que je me fais délivrer ma carte de métro, je me vois d'ailleurs obligé d’éloigner durement une gamine de moins d’une dizaine d’années qui m’a sollicité auparavant — et, après mon refus, m'a emboîté le pas, s'est placée derrière moi sans que je l'aperçoive et tends la main pour s'en emparer après que sont tombés de l'appareil carte et reçu — à seule fin, sans doute, de me narguer...
Je déjeune dans un restaurant bondé — et, vérifiant que certaines légendes ont leur fondement, m’amuse d’être le seul à avoir commandé un quart de vin : tout le monde boit de la bière, en effet, autour de moi. Repu — je n’ai pas dû manger toutes les frites qu’on m’a servies avec un vol-au-vent —, je me dirige vers le Palais des Beaux-Arts que j’entends visiter du plus lentement que je peux, n’ayant rendez-vous avec mon logeur, Cyril (c’est vraiment un curieux usage contemporain, qui, s'il n'amuse, confine au ridicule, de vouloir réduire les gens à leur prénom… sur les sites de location d’appartement, de covoiturage... et jusque sur les badges qu’arborent dans le supermarché de quartier où il m’arrive d’aller de jeunes “beurs”, prénoms d’ailleurs plutôt improbables étant donné la “francité” presque risible de leur consonance, comme ont pu s’appeler jadis “Fêt. Nat” des enfants d’Africains colonisés nés un 14 juillet et déclarés comme tels à l’état civil — puisque il fallait bien se déclarer : aussi, “chez” Match, Ahmed s’appelle-t-il Kévin ou Thibaut, et Djamila, Véronique, usage prénominal dupontesque et grotesque auquel je me suis résolu moi aussi (grâce à Cyril d’ailleurs, mais c’est une autre histoire...) sur un site de covoiturage en pleine expansion, choisissant tout de même d’assortir à mon prénom l’initiale de mon nom de famille plutôt qu’il ne soit suivi de rien.... et de peur qu’on m’apostrophe un peu trop familièrement sous les auspices de ***...) — n’ayant rendez-vous avec Cyril — donc ! — qu’en fin d’après-midi.
Et je tutoie Goya, Monet et Rodin à loisir, ne sortant des lieux qu’à 18 heures !
(Eux se sont vengés de ma familiarité : les photos que je prends de leurs œuvres sont ratées. Je recours donc à Internet. J’apprends — non sur Internet, mais le jour même, et devrais d’ailleurs m'en souvenir puisque ayant déjà vu le numéro de Palettes sur Goya — que, contrairement à leur appariement dans la salle réservée à la peinture espagnole, les Jeunes et les Vieilles ne sont sans doute pas un diptyque — même si le rapprochement, si malveillant soit-il, s’impose à l’évidence ! —, tandis que se justifie au contraire celui des deux versions du Parlement de Londres, la plus bleue ayant déjà été vue au Musée Marmottan !)