545 - À PAS COMPTÉS, journal extime (9)
BRUXELLES - SÉVILLE - BRUXELLES
À PAS COMPTÉS (journal extime)
(1er - 10 mai 2014)
5 mai
AM cathédrale
La féria n’est pas commencée...
J’ai bcp marché.
Il est presque 16 h qd je me trouve un endroit où déjeuner. Ne regrette pas d’avoir différé. Menu mieux que correct (entrée/ plat/ dessert/ verre de vin) pour 11 €.
Achète fruits excellents.
Ai accepté le logement trouvé par l’intermédiaire d’Audrey (! Comment a-t-elle eu mon adresse mail ? sans doute par le propriétaire...)
En quête d’un endroit où manger des tapas — puisq je suis ds le quartier gay de S — j’échoue finalement ds 1 lieu un peu huppé pour touristes lambda. Ne me sens pas à ma place — à nv.
Service un peu lent...
(Qui aurait cru q je mangerais après 22 h ? Ce doit ê un hommage à J.-M. ; qui m’aurait servi tt de m + tôt !)
(Le tartare de thon finalement très bon. [Pq dc le plaisir des papilles l’emporte-t-il finalement sur les contentements des yeux ? Seul p-ê le Goya, il est vrai, ce matin, m’a plu — même si je n’ai pas tjs été insensible aux Zurbaran...)
5 mai, matin
Après un long moment d’attente, je visite la cathédrale.
Après-midi
Comme je l’ai déjà fait la veille — mais j’étais tombé sur un répondeur —, je téléphone au numéro que m’a donné la jeune femme rencontrée le premier jour. On décroche, cette fois. Ma demande se heurte à une incrédulité que je peux comprendre : je ne sais pas comment s’appelle mon interlocutrice de l’avant-veille, je n’ai aucune idée de l’âge de l’enfant dans la poussette et m'avère incapable de le décrire... De toute façon, me dit-on, il n’a jamais été question de louer l’appartement à cette période de l’année... Il semble que je devrai donc loger ailleurs qu’à Séville la dernière nuit de mon séjour...
Je traverse le Guadalquivir (ou plutôt le canal Alphonse-XIII, le fleuve ayant été dévié afin d’éviter les inondations...) en vue de visiter cette fameuse féria dont me parlait avec tant d’enthousiasme José. Il faut me rendre à l’évidence : la mise en place n’en est pas achevée, même si les lieux de restauration sous les tentes sont investis de préparatifs intenses déjà. Précisément, les lieux paraissent en passe de devenir surtout le temple de la boustifaille... Et ce que je lirai dans le guide ensuite, et les Sévillans mis sur leur trente-et-un — spécialement les gamines prépubères maquillées outrageusement dans leur robe longue à volants —, et la poussière que j’ai soulevée en traversant ce champ de foire achèveront de me dissuader de revenir dans les jours à venir...
Le quartier alentour, moderne, est quelconque, les rues, tracées au cordeau, et les commerces, assoupis. Après m’être attablé dans une cantine locale, comme on ne montre aucun empressement à me servir, que je ressors sans provoquer d'émoi, je reprends ma marche vers l’autre rive, espérant trouver mieux plus loin.
Il est presque seize heures lorsque je m’assieds à la terrasse d’un restaurant de bon aloi. De fait, je ne regretterai pas d’avoir différé. Le menu proposé (entrée, plat et dessert assortis d’un verre de vin) pour 11 € est non seulement bon, mais gentiment servi par une jeune fille empressée — comme si elle avait parfaitement compris l’incroyable déclivité dont mon estomac souffre à cette heure avancée de l’après-midi...
Faut-il penser que, parfois, les biens comestibles l’emportent sur tout le reste ? En rentrant au studio, je fais un crochet par le marché tout proche pour acheter les fruits savoureux découverts grâce à José, que, pour y goûter sans que nécessaire fût pourtant de compléter mon déjeuner, je trouve excellents.
Le soir, en quête d’un endroit où manger des tapas — ultime préoccupation de la journée, avec l’idée cependant de trouver un lieu “gay friendly” puisque le quartier est réputé avoir cette vocation —, j’échouerai finalement, faute d’avoir trouvé ledit accueil, dans un restaurant plutôt huppé pour touristes lambda, qui propose carte et menus plus conventionnels et, la couleur locale en moins, mieux proportionnés à mes envies. L’assistance, toutefois, me rebute, et je ne me sens guère à ma place, cette clientèle internationale ayant des aises déplaisantes à l’instar de ses certitudes de pouvoir payer sans encombre l’addition... Le tartare de thon qu’on me sert, même si le service est un peu lent, est finalement très bon, de même que le plat principal — tant et si bien que je reviendrai dîner là deux fois ensuite...
Pourquoi donc — l’interrogation me revient avec quelque ironie — le plaisir des papilles l’emporte-t-il en moi finalement sur les contentements des yeux ? Peu sensible à l’exubérant retable gothique de la Capilla Mayor ainsi qu’au plus grand ostensoir du monde, presque indifférent au tombeau de Christophe Colomb, c’est sur la peinture que mes yeux de cuistre se sont le plus longuement attardés : les Zurbaran et surtout le Goya m’ont véritablement plu quand j’ai visité la cathédrale ce matin...
* * *
Quelle n'a pas été ma surprise, quelques heures plus tôt, en rentrant de ma longue déambulation de la journée : la jeune femme que j’avais appelée m’a envoyé un mail en me faisant part d’un malentendu, disant que, de fait, elle connaissait bien Audrey, qu’elle a rencontrée entre-temps, laquelle m’a recommandé — et qu’elle acceptait par conséquent de me louer une chambre. Même si j’étais un peu stupéfait sur le moment d’être ainsi contacté (mais Audrey, dont je savais ainsi enfin le nom, avait sans doute retrouvé dans le journal des appels de son portable le numéro de mon logeur, qu’elle avait dû contacter, celui-ci lui ayant ensuite communiqué mon adresse électronique) je n’ai pas trop barguigné et accepté la proposition...