567 - DE L’ÂGE (19)

Publié le par 1rΩm1

567 - DE L’ÂGE (19)

 

 

DE L’ÂGE (19)

[observation cruelle]

 

Samedi 4 avril

La pluie tombe continûment depuis deux jours. Le vent griffe. C’est bien pourquoi j’ai très peu envie d’aller à ce concert. Le programme de la semaine précédente, en outre, m’avait peu conquis…

 

Il faut venir tôt pour avoir une bonne place… Cette fois, je pense à prendre un livre plutôt que de relire jusqu’à la trame le programme, ou promener mes yeux sur l’assistance.

Cette dernière ne laisse pas de m’étonner. Le parterre est essentiellement composé de septuagénaires. Les jeunes gens y sont d’une rareté qui confine à l’invisible. Faut-il penser que, comme pour la littérature, ces derniers n’entendent rien à la musique dite “classique” ? (Je ne l’aime pas toujours. Voire. J’aime Bach, Monteverdi — que je n’écoute guère. Mais le siècle proprement classique ne me séduit pas vraiment. Aussi vais-je par-dessus, jusqu’à Beethoven dont m'emportent les dernières sonates, les derniers quatuors. J’ai toujours préféré — sauf à l'adolescence —, la musique de chambre aux bruits énormes pour concerts (dont j'excepte le Sacre du prrintemps et quelques concertos pour piano, ceux de Bartók ou de Ravel notamment). Et ces gens qui ouvrent exagérément la bouche pour les canonnades opératiques m’indisposent. Je suis sans conteste un béotien. Mais les voix moins apprêtées ont toujours mieux parlé à mon oreille. J’ai un souvenir d’épouvante d’avoir entendu une version tonitruante à un volume trop fort d’Elektra. Le seul opéra que je supporte d’écouter — par bribes — est Pelléas et Mélisande. Je crois, à ce propos, être conséquent… J’ai pu l’aimer, mais je ne suis plus sûr de toujours apprécier les glapissements — parfois… — de la Callas. Et j’aime les lieder que chante Kathleen Ferrier. Et les voix rauques de chanteuses de blues. Et d’ailleurs plus les voix de basse chez les hommes que celles des ténors. Pour tout dire : la musique instrumentale plutôt que vocale. Sauf — mais naturellement — s’il s’agit de chanter. Puisque même l’oiseau dans sa cage chante.)

 

Dans ce hall d’entrée où je subis la presse, montant de l’assistance percluse de pluie jusqu’à l’os, s’exhale une odeur âcre :

Cela sent le vieux mouillé.

 

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