696 - Dans le labyrinthe : de Paris à Fès à Paris (9)

Publié le par 1rΩm1

 

Dans le labyrinthe : de Paris à Fès à Paris

journal extime (3-15 avril 2016)

 

Fès, nuit du 11 au 12 avril

Est-ce la perspective du départ, celle d’une attente de trois heures avant l’envol ou celle d’un contrôle tatillon, ou la digestion difficile d’une cuisine trop riche (tomates, citron confit, caramel viennent se rappeler à mon souvenir) ? mais je passe une nuit difficile…

Je parfais mes memoranda — en attendant de trouver le sommeil.

D’autres souvenirs refont surface. Et quelques idées noires.

(Je me souviens ainsi d’une fouille au corps, lors d’un retour d’Amsterdam, avec le premier camping-car de mes parents — un Nautilus improbable fabriqué par un amateur qui avait aménagé un véhicule utilitaire en habitation roulante peinte en vert et noir de façon assez fantaisiste… —, ce qui avait peut-être éveillé la méfiance des douaniers — car, en l’espèce, on n’était pas très loin du VW de l’Inde des grands chemins de Jack Thieuloy —, à moins que ce ne fût le faux air jamaïcain que le faciès de Lindsay pouvait suggérer aux gardes-frontière ?

— Lindsay qui m’avait ensuite fait le reproche (avec cette douceur néanmoins qui était la sienne et ne portait pas à conséquence) d’avoir emporté un de ces magazines édités par la communauté gay amstellodamoise et destinés à informer et des lieux et des événements de ses membres, que les douaniers paraissaient avoir trouvé dans leur fouille du véhicule puisqu’il figurait au-dessus des affaires retournées…)

 

12 avril

Matin

En l’absence du matériel nécessaire (il n’y a que du produit à vaisselle et un de ces tampons verts à récurer que je connais sous l’appellation de scotch-brite), je me trouve dispensé du ménage dans le studio. Je me contente de la vaisselle, l’essuie, m’emploie à ce que disparaisse toute miette, et nettoie porte-savon et lavabo de la salle de bain.

A 11 heures 30, je rends les clés à mon logeur, K***l, qui se montre chaleureux et refuse de voir le studio avant que je m’en aille. Le taxi est déjà là, de toute façon, qui m’emmène à l’aéroport.

 

Après-midi

Comme d’habitude, les trois heures  — j’avais reçu un message de la compagnie aérienne enjoignant les passagers « d’arriver à l'aéroport le plus tôt possible, de préférence de 3 heures avant l’heure de départ prévue », du fait de contrôles de sécurité renforcés dans les aéroports marocains — demandées avant d’embarquer sont largement exagérées. Arrivé dès midi, il est 13 heures 20 quand j’écris ces lignes : j’ai mis ma valise à l’embarquement, liquidé mes derniers dirhams en buvant un café et en mangeant un cookie tenant davantage du macaron que du biscuit habituel (mais cela m’agrée tout autant), passé la douane et les divers contrôles, puis avalé dans le hall d’embarquement un sandwich (réglé cette fois en euros) à un prix prohibitif (surtout pour des Marocains), il reste presque une heure et demie avant le décollage…

 

Soir

L’avion, cependant, arrive quinze minutes avant l’horaire prévu. Un bus est prêt à partir, qui m’emporte jusque Paris.

Je retrouve la presse dans le métro.

Je m’aperçois bientôt qu’une des roulettes de ma valise est désormais hors service : la valise a dû être jetée sans ménagement sur un chariot ou dans la soute à bagages. Elle n’aura pas vécu bien longtemps, puisque je l’avais achetée à Berlin, en remplacement d’une de ses sœurs dont la poignée rétractable avait lâché le jour du départ, et que je l’avais déjà rafistolée, pour de mêmes raisons, après que sa coque avait subi de premiers dégâts, grâce à du chatterton fourni par Aymeric ! Misères et infortunes (sans qu’aucune splendeur ait jamais pu la concerner) d’une valise — et que je sais avoir racontées…

 

Arrivé dans l’appartement de F. et de Pascal, mon premier geste est de téléphoner à N***, disponible le lendemain. Rendez-vous est pris donc dans un restaurant vietnamien, sans que N*** sache encore si Jeff sera disponible. Il m’envoie dix minutes plus tard l’adresse précise, et me dit que Jeff sera occupé : nous dînerons donc en garçons, ce qui m’avait paru le sens de l’invitation de N*** à le recontacter à mon retour…

Je fais des courses, dîne, écris à Aymeric (pour proposer un déjeuner), à Judith (pour se voir et lui offrir le pot à sucre ou sel rapporté pour elle), et m’exhorte ensuite à sortir pour aller, puisque j’en suis si près, Place de la République, voir ce qu’il en est des Nuit debout.

 

Beaucoup de monde s'est massé là. Des gens sont assis en cercle pour entendre des orateurs.

696 - Dans le labyrinthe : de Paris à Fès à Paris (9)

Celui qui a la parole quand j’arrive tient un discours insipide, où affleurent d’étonnantes contradictions. Il se fait siffler quand il dit avoir voté pour Nicolas Sarkozy en 2005, puis, à propos du voile, parle la liberté de se vêtir, propos qui me paraît une imbécillité monumentale… Je m’éloigne sans regret.

Je songe à M.-C. en voyant ces invites à une nouvelle constitution…

696 - Dans le labyrinthe : de Paris à Fès à Paris (9)
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Je prends quelques photographies, nécessairement médiocres puisque nocturnes, n’ayant pas un appareil perfectionné.

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Même si je tente de respecter le plus possible l’anonymat des groupes que je photographie, trois jeunes hommes me paraissent assez photogéniques pour déclencher l’obturateur.

696 - Dans le labyrinthe : de Paris à Fès à Paris (9)

Précisément, l’un d’eux m’apostrophe : pourquoi les ai-je photographiés ? Je mens alors : la référence à Germinal, qui m’avait, il est vrai, intéressé (qu’on voit mal sur le cliché cependant, sauf à l’agrandir, pour en scander les octosyllabes et faire que la rime fanfaronne ! avait attiré mes regards, eux n’étaient que des figurants — alors que (la photo ne leur rend pas vraiment grâce) il formait un trio gracieux et intéressant.

(Beaucoup de jeunes gens semblent alcoolisés. Mais alcool et fête, fête et révolution ne sont-ils pas destinés à quelque mélange explosif, quoi qu'on en ait ?)

 

Sur le chemin du retour, les roues dans le ruisseau, une Fiat 500 paraît vouloir rappeler à mon souvenir deux de ses sœurs, l’une à Sienne, l’autre à Palerme.

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