723 - JOURNAL SANS FILET (nouveau journal tressé), 9

Publié le par 1rΩm1

 

26 juin

Je déjeune chez et avec mes parents. Ma mère se montre toujours très affectée par le deuil du cousin M***.

Elle ne parle que d’une armoire lorraine qu’elle me destine (j’en ai deux déjà dans ma chambre — dont l’une provient de mes grands-parents paternels, une armoire 1930 dont j’aime assez ferrures et serrures et plus encore le placage en loupe de bois, tandis que l’autre, lorraine déjà, date du déménagement récent de mes parents  —, et l’appartement tout entier est saturé de meubles, ce pour quoi je tâche de lui faire entendre raison).

Elle se fâche. Nous subissons son humeur rogue ensuite.

 

Le plaisir est vraiment grand de rejoindre ensuite T. à la terrasse d’un café. Cependant, cette diversion est en partie gâchée par les supporters de football : l’équipe de France joue un match contre l’Irlande, et nous comprenons bientôt, aux cris de ferveur, qu’elle l’emporte.

Apartés amusants avec Stéphane, le serveur, qui arbore au poignet les couleurs de la France pour les besoins de la cause, mais nous livre en confidence qu’il n’aime pas le football et persifle… (Tout cela me rappelle un rendez-vous avec Aymeric un soir de juin deux ans plus tôt…)

 

27 juin

Je me trouve, de fait — je l'ai raconté à Aymeric précédemment —, en vacances — et ce, avec plus d'une quinzaine de jours en avance sur le calendrier habituel ! Je goûte à l'extrême une chanee aussi insolente. Et ne puis m'empêcher de songer qu'elle ne durera pas.

 

29 juin

Vu Romain et Justine. Je leur donne rendez-vous pour le lendemain.

(Le bonheur ne nécessite pas dix minutes pour être exposé !) [Phrase que je ne comprends plus du tout près de six mois plus tard, à moins que cela ne concerne le temps qu’il me faudrait pour la relation de l’événement même.]

 

30 juin

Ce que c’est que de parler trop vite !

Nous passons deux heures et demie ensemble, Justine et moi, mais sans qu’arrive jamais Romain. Pour mon plus grand dépit.

Cependant, nous parlerons beaucoup de lui, Justine et moi — à mon instigation, raillera le lendemain T. ; mais je ne le crois pas.

Justine se montre volubile, souriante, chaleureuse.

Je tâche de superposer la jeune femme en face de moi et l’adolescente que j’ai connue quand elle avait quinze ans.

C’est donc surtout en compagne de Romain qu’elle se pose — en complice d’une certaine façon.

Romain et elle ont passé un an à la Réunion, resteront deux années à B*** — avant de retourner à la Réunion à nouveau.

Justine me glisse que cet éloignement du cocon familial dans lequel Romain a grandi l’a fait mûrir, voire qu’il était plus que temps pour lui de couper le cordon ombilical qui le reliait à sa famille.

Elle se plaint que les études de médecine soient si longues. J’apprends que Romain a finalement choisi la même spécialité que son père (le fait me déçoit un peu). Il a volontairement redoublé une année en vue d’être mieux classé dans cette spécialité au plan national.

 

Nous parlons de voyages. Elle est allée en Palestine, à Bali avec sa mère.

Elle s’est occupée d’élèves en difficulté dans une petite structure parascolaire qui propose des cours de rattrapage à de petits groupes et dit avoir été effarée de leur peu de maîtrise de la langue à laquelle ils recourent tous les jours.

Elle m’esquisse en quelques phrases le mariage en grande pompe de la sœur de Romain. Je crois me souvenir d’un mariage mêmement célébré du frère cadet — ce que me confirme Justine. « J’ai misé sur le mauvais numéro », me dit-elle, ce qui m’amuse — comme m’amuse d’apprendre que la famille de Romain est attachée au rite catholique.

C’est avec ses neveux et nièces que se trouve Romain. Justine lui téléphone pour lui rappeler notre rendez-vous. Il a, dit-il, un milliard de choses à faire. Je ne suis pas dupe, et m’en attriste — je me rappelle avec nostalgie une assez longue conversation en tête-à-tête (quand était-ce ? je serais incapable désormais de la dater), qu’il paraissait avoir appréciée.

 

J’apprends incidemment que la mère de Justine, qui habite à un jet de pierres de l’endroit où nous nous trouvons, vend des glaces et des gaufres dans le plus grand jardin public de la ville. Cela m’évoque une chanson d’Alex Beaupain que m’avait fait découvrir Aymeric.

© Internet

© Internet

Comme l’heure a si gentiment tourné, je rends, précisément, Pauline à sa mère, chez qui elle et Romain doivent dîner.

 

1er juillet

Elle me tient à distance malgré tout le lendemain, me dis-je alors que je la vois en conversation sur le trottoir de la rue où habite sa mère avec une personne âgée, sans doute un voisin. [Je ne songerai que dans l’après-coup que c’était peut-être aussi pour m’épargner une présentation inutile avec ce monsieur, voire un bout de conversation insipide avec lui.]


Raconter tout cela à T. me soulage. Il me cite Luc. Impossible pour moi de lire cette sorte de « littérature ». Je n’ai d’ailleurs d’aigreur que d’estomac, dis-je en manière de boutade — et de liquidation.

 

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