748 - Romana saltatio (Paris-Rome-Paris) (7)
Romana saltatio
(Paris-Rome-Paris, 20 octobre – 2 novembre 2016)
Journal extime en écho
[Paris-Porto-Lisbonne, 10-23 février 2017]
VII
26 octobre
Je maudis pour la énième fois les transports en commun de la ville de Rome (cela m’était arrivé déjà quelques lustres auparavant, quand j’avais visité pour la première fois la ville avec R.) : à Trastevere, j’attends le train censé m’emmener jusqu’au Vatican — nous logions un peu au nord de l’enclave papale, R. et moi, tant et si bien que c’est à pied que jadis nous nous y étions rendus — ; il a plus vingt minutes de retard quand il arrive enfin.
J’improvise ensuite : plutôt que d’aller à pied depuis Valle Aurelia, je prends le métro. Les rames en sont bondées.
Quoi qu’il en soit, je me suis, comme à mon ordinaire, inquiété sans raison : à 8 h 50, dix minutes avant l’heure de l’ouverture officielle, j’échange mon voucher contre un billet d’entrée
Je fais bien de me rendre d’emblée à la Chapelle Sixtine : lorsque j’y repasserai vers 13 heures 30, la foule massée là est peut-être huit à dix fois plus dense qu’en tout début de matinée (j’avais souvenir qu’on nous enfermait dans les lieux, qu’on nous en chassait après une dizaine de minutes, un quart d’heure tout au plus, raison pour laquelle je m’étais hâté : or, cette fois, j’ai pu séjourner à ma guise — jusqu’à me dévisser le cou).
La plupart des photos prises sont ratées. Je me dis — une énième fois — que je devrais peut-être m’acheter un meilleur appareil.
J’arpente ensuite les lieux, en passant par chaque salle, sans m’attarder toujours — et stationne, selon mes centres d’intérêts, toujours un peu les mêmes :
devant un très beau saint Jérôme de Vinci, d’autant plus émouvant peut-être qu’il est inachevé
un Titien (dont je n'ai trouvé qu'un détail sur la toile)
une crucifixion de saint Pierre par Guido Reni
une déposition du Caravage, magnifique dans ses diagonales de gestes, son trapèze de personnages aux déplorations conjuguées
— tous tableaux dont je rate la prise photographique, pour des raisons que j'ai déjà expliquées.
Je me montre sensible aux sculptures du Bon Berger
d’Antinoüs
au Laocoon de Michel-Ange
et reste éperdu devant les fresques de la Salle de Constantin ou de la Chambre d’Héliodore.
Face à des œuvres plus modernes, acquises en raison de leur substrat religieux, je m’abîme devant un très bel Odilon Redon de petite taille représentant Jeanne d’Arc
une étonnante Pietà de Van Gogh
et un non moins étonnant Otto Dix représentant, lors du chemin de croix, le Christ et Véronique, celui-ci mené par des gouapes contemporaines du peintre — ainsi que le faisaient de toute façon les artistes du Moyen-Âge ou de la Renaissance
une Vierge à l’enfant et un Arbre de vie de Matisse
une procession des Pénitents de Furne de James Ensor
un des portraits de papes par Bacon d'après Vélasquez...
Séquelles de l’été, je finis par avoir très mal aux pieds après presque six heures de piétinement sur place, à peine interrompues par un déjeuner rapide.
Il a plu plusieurs fois, mais j’étais au sec.
En raison de ces pluies répétés, j’ai songé à l’irrésistible avancée de l’automne.