771 - Fado fandango (9)
Fado fandango
Journal extime
(Paris – Porto – Lisbonne - Paris, 10-23 février 2017)
IX
19 février
Matin
Je me lève tôt pour arpenter une dernière fois les rues de Porto sous un ciel ensoleillé.
Le Majestic Café est fermé : je n’y aurai fait qu’une brève incursion le jour de mon arrivée, trouvant qu’à l’heure de l’apéritif la clientèle était trop nombreuse…
Je visite (le tour en est vite fait) la Caso do Infante — dont j’apprends qu’est né là le Prince Henri le Navigateur (Infante D. Henrique — Infante étant donc un faux ami, sans rapport avec les accents mélancoliques et magnifiques de la Pavane de Ravel…).
J’emprunte des rues pentues et des escaliers pour me rendre jusque la librairie Lello (livraria Lello).
La file d’attente en est moins longue que la veille, et je me décide à y entrer. Il faut, pour ce faire, acquitter un billet d’entrée de 4€, remboursé, me précise-t-on, si j’achète un livre (O valor de 1 voucher é dedutivel na compra de 1 livro).
Quoique un peu déshonnête, le procédé est incitatif, et, m’irritant un peu des empilements de best-sellers (ce sont des piles du dernier Harry Potter qui se trouvent dans le petit chariot en bois qui circulait autrefois depuis l’entrepôt jusqu’à la librairie), je choisis la traduction en français d’un récit de José Saramago, Caïn.
Les seuls clichés que je réussis à l'intérieur sont ceux du vitrail de la verrière.
Dans une rue toute proche, j’achète un étui à lunettes en liège, qui alourdira beaucoup moins ma valise : l’objet est singulier et amusant, et, comme celui fourni par la bouticaillerie d’optique où j’ai acheté ma dernière paire de lunettes ne ferme plus, il fera de l’usage avant de se déchirer ou de se salir. Je crois qu’il coûte cinq euros, mais il en vaut deux de plus ; cependant, la femme à qui je m’adresse me le laisse à cinq euros en me disant plaisamment que son mari — qu'elle me désigne tout à côté d'elle — est occupé avec une cliente et qu’il n’en saura rien.
De jolies façades de maisons s’offrent à ma vue dans le quartier que j’arpente ensuite, rua de José Falcão ou rua da Conceição.
Puis — avec une pensée de l’ordre du private joke, ignorant d’ailleurs jusqu’alors que c’était une chaîne internationale — je photographie la devanture de Amoretto pour T.
— et, avant de m’en aller, la façade de la Capela das Almas de Santa Catarina, ainsi que, dans un tout autre style, celle du Coliseo, qui fête ses soixante-quinze ans.
Après-midi, Lisbonne
Le voyage en train a passé assez vite. J’ai commencé à lire Caïn, souvent cocasse, souvent caustique — et intéressant.
Un même système de carte à recharger pour bus et métro qu’à Porto existe à Lisbonne.
Les autobus sont rares en ce dimanche, et je dois patienter — après, non sans difficultés, avoir trouvé le bon arrêt.
Débarqué dans le quartier où je dois loger, je tire mes bagages désormais bien lourds dans des ruelles en pente dures à gravir.
Au bas de l’immeuble, aucune indication ne figure sur les sonnettes. Je me résigne à sonner à toutes. Une dame me parle en portugais. Le nom de Rodrigo agit comme un sésame. Je fais face à des escaliers étroits. Je pressens le dernier étage — et laisse ma valise en bas.
Mon intuition était juste.
Après m’être installé, je visite, à la tombée du jour, le quartier, fais quelque courses, choisis un restaurant au vu de la carte — où, mon intuition ne s'étant pas trompée, l’on me sert un excellent osso buco, si copieux que, comme la veille, je me passe aisément de dessert.