775 - Fado fandango (12)

Publié le par 1rΩm1

 

Fado fandango

 

 

Journal extime

 

(Paris – Porto – Lisbonne - Paris, 10-23 février 2017)

 

 

 

XI

 

22 février

J’emprunte le fameux tram 28.

Lorsque j'en descends, il est encore tôt. Une femme lave à grande eau le parvis de la cathédrale.

 

775 - Fado fandango (12)

Je reprends le tram pour visiter, quelques centaines de mètres plus haut, le Musée des arts décoratifs. Il contient beaucoup de belles choses ou choses étonnantes, dont je rate souvent la prise photographique.

Ainsi de cette commode en palissandre datant du XVIIIe siècle, que surmonte un oratoire dont on peut ouvrir les portes afin de prier.

 

775 - Fado fandango (12)

L’influence moghole se laisse voir sur de nombreux objets exposés, dont ce magnifique écritoire du XVIIe siècle en ivoire et marqueterie de bois divers.

 

775 - Fado fandango (12)

Ou cette tapisserie montrant une procession où les montures sont des girafes ;

 

“Procession with giraffes”, Tapestry, Tournai Workshop, 16th century (c. 1510), wool and silk.

“Procession with giraffes”, Tapestry, Tournai Workshop, 16th century (c. 1510), wool and silk.

ou, enfin, ce dévidoir.

 

Dévidoir, Inde, XVIIe siècle, teck, ébène et ivoire

Dévidoir, Inde, XVIIe siècle, teck, ébène et ivoire

Sur une terrasse toute proche, la vue panoramique en contreplongée et plongée sollicite l’œil.

 

775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)

 

En sens inverse cette fois, j’attrape un tram afin d’aller au Museu nacional de arte contemporãnea do chiado (MNAC).

 

775 - Fado fandango (12)

Une exposition est dédiée à Amadeo de Souza-Cardoso — dont Aymeric, plus tard, me dira qu’une rétrospective lui avait été consacrée à Paris — , qui fait le plein des visiteurs.

Si je lui trouve une jolie gueule — il m'évoque, je ne sais pourquoi, René Crevel —, je suis moins convaincu par son parcours artistique, nourri docilement, me semble-t-il, de diverses influences, futuriste, cubiste... qui ont porté son talent jusqu'au grand public aujourd'hui.

 

Amadeo de Souza-Cardoso, Retrato paysagem, graphite on paper c. 1913

Amadeo de Souza-Cardoso, Retrato paysagem, graphite on paper c. 1913

Certains dessins sont néanmoins plaisants, mais les salles, exiguës, distribuées par un couloir étroit, obligent à jouer des coudes ou à processionner lentement devant des petits formats parfois anecdotiques.

S’il y a beaucoup moins de monde qui arpente les collections permanentes, celles-ci, nonobstant les habituels ratages, ne sollicitent pas toujours en moi le geste photographique…

Cristiano Cruz, Autoportrait, 1916, gouache sur carton

Cristiano Cruz, Autoportrait, 1916, gouache sur carton

Ernesto Canto da Maia, Adam et Eve, 1929-1939, terre cuite polychrome

Ernesto Canto da Maia, Adam et Eve, 1929-1939, terre cuite polychrome

J’ai d’ailleurs l’impression que les lieux sont moins grands qu’ils n’en avaient l’apparence de l’extérieur, mais me persuade, en en refaisant le tour, que j’en ai bien visité toutes les salles, ainsi que la terrasse.

 

*  *  *

 

Je l’avais repérée en arpentant le quartier le premier jour, proche du café où Pessoa avait ses habitudes, je me rends à la boutique de Vista Allegre, comptant trouver d’autres articles de vaisselle que les deux plats achetés déjà pour Pascal et F., voire m’acheter un plateau à fromages que j’avais trouvé amusant. Je n’y trouve rien qui leur ressemble de près ou de loin.

 

Je retourne à l’appartement par le même tram 28 et déjeune des restes de la veille, que j’agrémente d’un cheese-cake qui m’avait paru appétissant dans la vitrine d’une pâtisserie du quartier.

 

Après-midi

Je me rends au Museu Calouste Gulbenkian, dont les collections sont superbes.

Les peintures flamandes, cependant, sont sous verre : je renonce à toute photographie. Quant aux bijoux Lalique, les vitrines ne permettent guère non plus d’en approcher le petit format. Je m’y essaie toutefois, ainsi qu'aux autres objets de la collection.

 

775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)
909 Vine and figures, goblet, ca. 1899-1901

909 Vine and figures, goblet, ca. 1899-1901

912 Female figures, vase, Clear patinated glass, ca. 1921

912 Female figures, vase, Clear patinated glass, ca. 1921

Comme je ne suis pas certain du résultat, j’achèterai une carte postale ensuite (que j’enverrai à Valérie).

 

775 - Fado fandango (12)

Du Proche-Orient ou d’Extrême-Orient,

Bowl, Persia, Kachan, late 12th, early 13th century

Bowl, Persia, Kachan, late 12th, early 13th century

Fragment of an Inscription, Persia, Kachan, early 14th  century

Fragment of an Inscription, Persia, Kachan, early 14th century

775 - Fado fandango (12)

de l’Italie renaissante

Antonio Rossellino, atrib., Virgin and Child, Marble, before 1461

Antonio Rossellino, atrib., Virgin and Child, Marble, before 1461

The Dance, Tapestry from the set “Children Palying”, after Giulio Romano, Mantua, ca. 1540, Wool, silk, gold ans silver threads

The Dance, Tapestry from the set “Children Palying”, after Giulio Romano, Mantua, ca. 1540, Wool, silk, gold ans silver threads

Vittore Carpaccio, Holy Family with Donors, 1505
Vittore Carpaccio, Holy Family with Donors, 1505

Vittore Carpaccio, Holy Family with Donors, 1505

de l’Europe des Lumières ou du siècle précédent,

Jean-Antoine Houdon, Diane, Marble, 1780

Jean-Antoine Houdon, Diane, Marble, 1780

Peter Paul Rubens, Portrait of Helena Fourment, ca. 1630-35

Peter Paul Rubens, Portrait of Helena Fourment, ca. 1630-35

d’Angleterre (je ne sais pas encore que je reverrai bientôt la Tate Britain ou la National Gallery et leurs magnifiques Turner) ou de France

Joseph Mallord William Turner, Quillebeuf, Mouth of the Seine, 1833
Joseph Mallord William Turner, Quillebeuf, Mouth of the Seine, 1833
Joseph Mallord William Turner, Quillebeuf, Mouth of the Seine, 1833

Joseph Mallord William Turner, Quillebeuf, Mouth of the Seine, 1833

Edgar Degas, Portrait of Henri-Michel Lévy, 1878

Edgar Degas, Portrait of Henri-Michel Lévy, 1878

Auguste Rodin, The Blessings, Marble, 1900

Auguste Rodin, The Blessings, Marble, 1900

775 - Fado fandango (12)
Sir Edward Burne-Jones, The Mirror of Venus, 1877
Sir Edward Burne-Jones, The Mirror of Venus, 1877

Sir Edward Burne-Jones, The Mirror of Venus, 1877

— toutes ces œuvres à l’envi lavent l’esprit et rincent les yeux.

L’autre bâtiment, consacré à l’art contemporain, est plus divers — et plus diffus (et d'ailleurs je rate l'essentiel de mes prises).

Marina Helena Vieira da Silva, Tragic Maritime History or Shipwreck, 1977

Marina Helena Vieira da Silva, Tragic Maritime History or Shipwreck, 1977

Jorge Pinheiro, Bishop (Red), 1981 © Internet

Jorge Pinheiro, Bishop (Red), 1981 © Internet

 

*  *  *

 

Comme je n’en suis pas très loin, je pousse jusqu’à la Pasteleria Versailles.

 

Je me contente d'en visiter l'intérieur, en prenant quelques photographies, malgré l'invitation du jeune homme derrière le comptoir à consommer. Mais je n'ai guère envie de pâtisserie, et la clientèle, rupine, confite et compassée, y invite fort peu — beaucoup moins que le jeune homme...

 

775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)
775 - Fado fandango (12)

*  *  *

Je retourne une dernière fois à l’Institut du porto. Le porto blanc très sec que j’ai commandé s’avère vraiment « très sec ». Il manque de saveur.

Pour me consoler, je cède plus conventionnellement à un porto rouge de 2005. Il me fait regretter celui de 1989 dont j’ai trouvé mainte bouteille durant plusieurs années dans un supermarché de **** à un prix pourtant raisonnable et dont je conserve une dernière bouteille dans ma cave que je réserve pour je ne sais quelle occasion, quel invité de marque, quelle circonstance exceptionnelle.

 

Soir

Je dîne dans un restaurant italien presque en bas de l’appartement où je loge. La gérante me place à côté d’un couple de Français.

Les lasagnes qu’elle m’apporte sont étonnantes. Les couches de pâte tiennent davantage, en effet, de feuilles de brick, qui recouvrent des tranches de tomates et de courgettes coupées très fin et du [de la ?] ricotta [s’il s’agit de cela ? — en tout cas, d’un fromage de chèvre si j’en crois mes papilles] et d’un jambon cru, lui-même en tranches très fines.

J’ai beaucoup de mal à découper cet édifice croustillant, d’autant que la table est bancale : la pâte s’émiette dans une assiette que j’ai crue d’abord en plastique, menaçant d’envoyer l’ensemble en l’air et de le faire atterrir sur la table voisine, mais qui s’avère en métal léger. Je cale finalement la table avec une feuille de mon carnet pliée, afin de ne pas non plus renverser mon verre.

La musique est un peu trop forte. Je note aussi la présence d’un portrait de pape dont les traits m’échappent un peu dans la distance — Jean-Paul II peut-être ? —, illuminé comme une divinité d’un temple hindou.

 

 

 

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