770 - Fado fandango (8)
Fado fandango
Journal extime
(Paris – Porto – Lisbonne - Paris, 10-23 février 2017)
VIII
18 février
Des jours passent comme cette journée-ci où tout (ou presque) va de travers.
Je n’avais pas anticipé que, le week-end, il pourrait y avoir tant de monde lancé dans les rues de Porto.
Au vu de la queue devant le café Majestic, puis devant LA librairie tant vantée par les guides touristiques, la livraria Lello : je renonce à voir l’un et l’autre…
Je pousse jusqu’à l’église des Carmes : quoique nous soyons samedi et contrairement à ce qui était annoncé, c’est, comme la veille, l’heure de la messe.
Le ciel est gris. Je photographie quelques façades intéressantes dont la pierre grise s’accorde avec lui.
Il se met bientôt à pleuvoir.
Je fais quelques courses pour parachever la (presque) nullité de ma balade — et rentre déjeuner.
Après-midi
Je vais en bus jusqu’au Museo romantico : celui-ci est fermé pour travaux de rénovation.
Je retourne au magasin où, trois jours auparavant, j’avais vu ces deux plats que je sais pouvoir plaire à Pascal et F. J’en fais l’achat.
Je retourne déposer le paquet, lourd, fragile — et encombrant.
(Le matin, j’ai recouru à une « librairie » — il y faut plusieurs paires de guillemets — en ligne pour adresser à Pascal le livre lu à Paris en pensant à lui — et qui devrait lui parvenir lundi, le jour de son anniversaire.)
Je me remets en route dans l’idée de sacrifier à une visite des caves de porto. Mais toutes les visites sont complètes. Il est décidément dit que les frustrations devaient s’accumuler en ce jour.
Je grimpe alors, par un raidillon, jusque Taylor’s.
Le prix de la visite des caves est plutôt élevé. Je me contente donc d’un verre de porto blanc sec, servi sans aménité par un loufiat qui me gratifie de sa mauvaise haleine, à défaut d’un sourire.
Je ne m'attarde pas et reprends ma promenade. Le ciel s’est un peu dégagé, le soleil est revenu. La lumière de la fin d’après-midi et la vue sur la ville à partir de cette autre rive ne manquent pas de charme.
Je crois me retrouver près du pont qui enjambe le Rio Duro, mais dois finalement faire un long détour — pour me retrouver en contrebas, sur le tablier [?] inférieur, dans les gaz d’échappement des automobiles.
Je ne sais ensuite où prendre le bus, vais à pied, me fourvoie, dois faire demi-tour.
J’achète une passoire en plastique bleu, puisque l’ustensile manque dans la cuisine de Carlos. (Il semble que seuls trouvent une utilité mes achats en ce jour...)
Rentré dans l’appartement, je découvre un message de mon logeur de Lisbonne, qui me demande de le prévenir de mon arrivée une heure auparavant. Or, je lui ai communiqué mes horaires de train — et calculé assez largement à quelle heure je pourrais être chez lui.
Je peine à lui expliquer tout cela en anglais — in a globish way !, tout en songeant à Aymeric avec qui nous commentions quelques jours auparavant ce salmigondis linguistique sans vraie syntaxe, cette peau de langue qui ne véhicule que nos urgences matérielles et plates, nos désirs triviaux et nos contingences impérieuses.
Soir
Je m’offre un dîner dans un restaurant. En commandant le plat principal, je crois à quelque veau mitonné : c’est une large semelle — tendre au demeurant — qu’on me sert dans l’assiette. Et le vin rosé commandé est un vin jeune, frais, fruité et pétillant. Deux choix qui donnent le ton — le second surtout — à mon insatisfaction à venir.
Je suis installé près de la porte d’entrée, où circule, quand les clients entrent, une bourrasque d’air glacé.
Au moment du dessert, je ne parviens pas à arrêter un choix : vais-je commander la poire au vin — pour pouvoir regretter celles que faisait J.-M. ? Le destin tranche : il n’y en plus de toute façon…
Le serveur vérifie la date de la carte de l’office du tourisme que je lui tends. Il l’emporte même pour j’ignore quelle autre vérification.
— Décidément !