798 - S i c i l i a n a (9)
S i c i l i a n a
PARIS - SICILE - PARIS
Journal extime (7 - 21 avril 2017)
9
17 avril
Matin
Je suis à un peu moins de dix heures devant le parc archéologique. Je vais dans le sens inverse indiqué par les guides, sans l’avoir cherché : je vois d’abord les Latomies du paradis, désignées ainsi par antiphrase puisqu’y travaillaient, dit-on, des milliers d’esclaves.
De là, j’accède à l’oreille de Denys (Orecchio di Dioniso), selon la belle trouvaille du Caravage.
Quelqu’un y chante un air d’opéra, qui se répercute à l’intérieur de la grotte, formidablement.
Je me rends ensuite jusqu’au théâtre grec — prétendument inauguré par Eschyle, qui y aurait fait jouer les Perses (la date de - 372 donnée par le guide étant évidemment erronée). Il faut tout de même beaucoup d’imagination pour se représenter un spectacle de tragédie tel qu’il a pu se dérouler, même si les gradins en bois suppléant aux gradins de pierre, les estrades, attestent que des festivals ont régulièrement lieu ici.
En contrebas, l’amphithéâtre romain est envahi par des herbes folles…
* * *
Ce tour étant fait en moins d’une heure, j’ai le loisir de visiter les catacombes de San Giovanni. Ses ruines à ciel ouvert exacerbent sa dentelle et ses formes aériennes.
Il faut attendre vingt-cinq minutes une visite guidée. Je m’y résous cependant, même s’il sera difficile de voir ensuite les Latomies des Capucins (Latomia dei Cappuccini), celles-ci fermant à 13 heures. De fait, la visite des catacombes chrétiennes et de la crypte de saint Marcien (Cripta San Marziana) occupe trois quarts d’heure d’un commentaire en italien et anglais, auquel je m’habitue peu à peu et que je finis par comprendre.
Les photographies, sauf à l’extérieur, sont interdites, mais je contreviens à la proscription en m’attardant quelques instants après que le groupe a reflué hors de la crypte : ironie du sort, alors que je m’attendais à ce que mon cliché soit flou, il est net et plutôt réussi.
Je redescends ensuite vers Ortigia, non sans passer par la Basilique Sainte-Lucie, que je n’avais pu voir la veille — et que je trouve fermée. De là, je débouche naturellement sur le petit port
et, après quelques courses sommaires afin de compléter mon repas, presse le pas pour enfin déjeuner à une heure avancée comme les jours précédents.
Après-midi
Après une sieste infructueuse — des enfants qui courent ébranlent continuellement le plafond de ma chambre —, je fais littéralement le tour de l’île, en flânant le plus possible. Seule la pointe sud échappe à ma promenade, mais le Castello Maniace est fermé les lundis, de même que la plupart des musées.
Le vent qui souffle rafraîchit considérablement l’atmosphère. Heureusement, il se calme ensuite.
Je lis trois quarts d’heure ensuite un roman prêté par T. sur une chaise confortable d’une pizzeria fermée — ou pas encore ouverte — de la Piazza Minerva.
Soir
Je dîne d’une pizza. (Je songe, à ce sujet, que j’ai beaucoup mangé, sous différentes formes, de pains garnis ces temps derniers.)
J’apprends (ou plus vraisemblablement : je redécouvre) qu’Eschyle est revenu « habiter en Sicile pour passer le derniers moments de sa vie à Gela », ce qui peut se concevoir — nonobstant la tortue qu’il aurait reçue sur la tête.