819 - Chante, c h a n t e b a r c a r o l (4)
Chante, chante barcarol
(Paris – Venise – Vérone – Padoue – Paris)
Journal extime
(23 octobre – 5 novembre 2017)
4
26 octobre
Matin
Je dors mal à nouveau — pour de mêmes raisons sans doute que la nuit précédente.
Je renverse le café — premier geste du matin malheureux dont je m’irrite plus que de raison : mes maladresses me paraissent plus fréquentes à mesure que le temps passe, c’est là surtout ce qui m’exaspère.
Nous visitons la Gallerie dell’Accademia, dont nous n’avons pu voir les collections la veille. Autant dire que nous rattrapons le temps perdu — en l’étalant superbement.
Hyeronimus Bosch, Visions of the Hereafter. Ascent into Heaven (entre 1505 et 1515) ; Santa Liberata, Triptyque
Veronese, Madonna and child enthoned with saints Joseph, Justina, Franics, John the Baptist and Jerome (about 1564)
Tintoretto, Madonna col Bambino e i santi Sebastiano, Marco, Teodoro venerata da tre camerlenghi e di loro segretari
Une exposition au rez-de-chaussée est consacrée aux échanges entre Venise et Vienne. S’y trouvent des peintures des XVIIIe et XIXe siècles, sans rien de vraiment bouleversant, sinon de très belles sculptures de Canova, même si certaines, vues ailleurs, à Rome notamment, m’avaient davantage impressionné.
Après-midi
Nous déjeunons, très tardivement ensuite, Campo Stefano à la terrasse d’un restaurant, chauffés par le soleil. Nous prenons plaisir à jouer ainsi les lézards en prolongations de l’été tant le temps est vraiment beau.
Nous visitons ensuite San Stefano, dont la sacristie contient deux très beaux Tintoret, le Lavement des pieds et la Prière au jardin des Oliviers, que je n’ai pas retrouvés sur la toile pour suppléer aux prises ratées que j’en ai faites.
Dans San Sebastiano se trouvent des Véronèse, que M.-C. s’emploie à distinguer des Titien. (Je sais que, pour ma part, je préfère Titien.)
A l'air libre ensuite, accoudée à la balustrade d’un pont déjà passablement romantique, M.-C. apostrophe un gondolier, qui lui réplique complaisamment en chantant d’une assez belle voix. — Chante barcarol, chante (ce n’était toutefois pas O sole mio).
Nous nous amusons beaucoup de ce cliché en acte.
Pour délasser nos pieds et jambes, nous prenons un verre sur le campo San Margherita.
Le crépuscule empêche dans l’Eglise de Pantalon qu’on voie nettement la toile du plafond réalisée par Gian Antonio Fumiani. Nous nous promettons de revenir et renonçons à Frari.
Soir
A la nuit tombante, nous prenons un verre de vin blanc en apéritif en contrebas du pont du Rialto. Il fait encore doux.
Le restaurant, choisi dans le guide, déniché assez difficilement auparavant, et que je m’emploie à retrouver avec le secours de ma mémoire visuelle, bien que nous nous y rendions à l’heure même de l’ouverture, est entièrement réservé. Nous allons donc au hasard et dînons d’un risotto, assez cher — comme l’est la bouteille d’eau qu’on nous facture à 5 € ! — mais bon, dans un autre endroit élu assez arbitrairement.
M.-C. me dit en avoir un peu assez des églises. Elle a surtout mal à la jambe — et me dit craindre l’algodystrophie.
Elle se montre pourtant très enthousiaste souvent.
Pour plaisanter, sur le vaporetto du retour, alors que nous longeons les palais du Grand Canal, je lui lance : « Tu ne trouves pas que c’est monotone ces façades alignées, qui se ressemblent toutes plus ou moins les unes les autres ? »