Archives GA - Ce que je sais et ignore de J.-M. en douze clichés photographiques (4) - CCCLXXVIII - CCCLXXIX
CE QUE JE SAIS et CE QUE J’IGNORE de J.-M.
en DOUZE CLICHES PHOTOGRAPHIQUES
4
J.-M. encore là déjà absent
La quatrième photographie ne représente pas J.-M. Mais il me plaît de penser que c’est lui qui l’a prise, il y a peut-être une vingtaine d’années, sans doute dans un restaurant.
Ils sont trois, hormis un visage en amorce, que je ferai disparaître au moment de retoucher l’image (avant de songer à tout bonnement la recadrer !).
A gauche et de trois quarts, Patrice ; au centre et de face, Anne, sa compagne ; à droite et presque entièrement de profil, Pascal.
La photo a dû être prise au flash : Anne a les yeux rouges. Pascal, la tête perdue dans un bouquet, est lui-même floral, très beau — comme à son ordinaire (agrandie sur l’écran de l’ordinateur le cliché révèle dans la commissure gauche de la bouche un bout de langue). La tête dans les mains, la gauche tenant une cigarette, il semble s’amuser de ce que raconte l’un des convives. Seul Patrice regarde le photographe. Il tient aussi une cigarette, la main fléchie, en un geste presque féminin.
Les trois sujets sont nettement enclos dans un espace qui paraît leur appartenir et les circonscrire — spécialement Pascal. Une bouteille de Chantereine se dresse entre Anne et Pascal ; une carafe de vin au premier plan la sépare de Patrice, tandis qu’un rideau vert pâle paraît s’opposer aux masses sombres au-dessus des têtes de Pascal et Patrice.
Les rappels et contrastes de couleurs — ainsi la chemise vert clair aux manches retroussées de Patrice, la veste foncée sur un dos de chaise derrière lui, que prolonge la chemise vert foncé aux manches, elles aussi retroussées, de Pascal —, l’organisation des volumes et des plans est très équilibrée — même si la photo est évidemment prise sur le vif par un amateur.
Les verres dansent en rond autour de la table.
(Le verso indique : 11/90)
* * *
C’est aux deux garçons que je voudrais rendre hommage. Ils portent — en fait — le même prénom. J’ai rebaptisé l’un Patrice, afin que le lecteur puisse s’y retrouver.
Ce sont eux qui ont encadré les derniers moments de J.-M. Je leur en sais gré. Personne d’autre qu’eux n’aurait fait cela mieux.
(J’apprendrai, le jour de la dépose des cendres dans le caveau familial, après un court instant de débat entre les intéressés, que la photo a été prise au moment d’un baptême (je n’ai pas retenu de qui). Anne s’amusera de ce que sur les photos qu’on prend d’elle elle a toujours les yeux rouges… J’apprendrai aussi, en examinant les inscriptions funéraires sur la tombe — ou plutôt : celles-ci viendront rafraîchir ma mémoire —, que le père de J.-M. est mort en 1990. De funérailles en baptême, les survivants continuent d’organiser la vie… Et moi, je n’avais pas pensé du tout à ce geste simple d’apporter des fleurs — Pascal, lui, avait apporté des lupins —, dont, en attendant d’être refermée, on a couvert la béance de la tombe...)