985 - À la grecque (journal extime), 11
À la grecque
(Paris - Athènes - Paris : 7 avril - 17 avril 2019)
Journal extime
11
16 avril
Matin
C’est seulement après avoir déjeuné, au moment de faire la vaisselle et de nettoyer la cuisine, que je mets en route la radio : l’incendie de Notre-Dame est désormais maîtrisé et, même si les dégâts sont encore impossibles à évaluer, le délire de la veille s’est un peu calmé.
D’ailleurs, les commentaires des uns et des autres, notamment sur l’histoire du monument et ses incessantes transformations, sont intéressants, et je ne sais quel documentaliste a eu la riche idée de faire entendre la chanson de Léo Ferré, les Cloches de Notre-Dame, que je trouve autrement à propos que les imbécillités débitées par des personnes interrogées (ce à quoi et ceux à qui jadis n’aurait pas été cédé le temps d’antenne la chaîne à laquelle je me suis connecté — o tempora o mores, mais c’est du latin et non du grec)...
Idiotement — aussi —, je me rassérène.
Je fais ensuite un ménage minutieux pour remercier Pygmalion de ce que son appartement était agréable à habiter. Il ne restera guère que le sol à balayer et laver.
Alors que je me trouve sur un quai de métro, je suis contacté par une femme qui se dit « ma conseillère » pour la copropriété dont je suis syndic bénévole. Ses façons et la démarche m’agacent passablement : j’abrège avec beaucoup de sécheresse la conversation en me disant en vacances à Athènes, et raccroche sans formule de politesse. [Je ne suis pas au bout de mes peines et autres tracas administratifs à ce sujet : j’apprendrai bientôt qu’il est désormais obligatoire de s’inscrire à un registre national des copropriétés, comme si l’on voulait décourager les volontés dans la gestion bénévole des immeubles et inciter à prendre des syndics professionnels — inscription qui prendra un temps infini avant d’en remplir le formulaire « en ligne » et d’y joindre telle ou telle pièce requise ! — ô accablement de nos vies « disruptives » !]
Après-midi
Je ne suis pas certain d’avoir jamais vu un hall d’aéroport aussi interminable dans son enfilade de commerces que celui que je parcours avant de m’installer à une table pour engloutir un mauvais sandwich.
Le barman se « trompe » en me rendant la monnaie, faisant passer une pièce de vingt centimes d’euro pour une pièce de cinquante. En vérité, en cherchant à m’estamper, il s’est tout de même bel et bien trompé en restituant un euro de trop. Je suis d’une humeur de dogue malveillant et n’ai garde de le lui redonner, son procédé m’ayant de toute façon déplu. Les quatre heures et quelques à passer encore avant d'être à Paris ajoutent à mon irritation de passager embarqué dans l'inutilité du retour…