Archive GA CD - Paris-Naples / Napoli-Parigi (journal extime) - 23 avril-5 mai 2013 (8)
Paris-Naples / Napoli-Parigi
Journal extime
(23 avril - 5 mai 2013)
8
28/4
Je ne pensais pas le site de Pompéi si grand.
Il est 13 h 30. Les pizzas et sandwiches du lieu font triste mine. Je remets à plus tard mon déjeuner.
Bien m’en a pris. Je mange un excellent sandwich toasté avec des légumes grillés et bois un verre de vin blanc largement servi. Le serveur me fait cadeau des 10 centimes qu’il me manque, refusant mon billet de 5 euros. Le vin est très bon.
Le soleil est revenu. Tjs cette jouissance du moment présent. Cette étrange quiétude.
28-29°. Les indications de t° le font à l’inflation.
Sur la terrasse où je commande une pinte, je n’ai pas les cinquante centimes pour l’appoint sur mon billet de 10. Le serveur fait co si l’appoint avait été fait et me rend 5.
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28 avril
Je suis tôt sur le site de Pompéi. Mais je ne l’avais pas imaginé si grand. Il fait plus chaud encore, me semble-t-il, qu’à Herculanum. (De fait, je verrai que les indications de température affichées le font à l’inflation : 28 ou 29° selon les cas…)
Les touristes sont nombreux. Ils déambulent à la débandade à mesure que la journée avance en soleil et en temps. Après trois heures d’exploration des lieux dans un quadrillage que je crois systématique mais qui ne doit l’être qu’en esprit — au moins ai-je vu la Villa des Mystères —, je suis presque soulagé que l’accès à l’amphithéâtre soit fermé. Comme j’ai faim, je reflue vers la sortie correspondant à l’entrée par laquelle je suis arrivé.
Il est 13 heures 30. Les pizzas et sandwiches du lieu ont triste mine. Je décide de remettre à plus tard mon déjeuner. D’ailleurs, les touristes (toujours eux : il suffit que je m’y agglutine…) infestent les environs de la gare. Je suis bientôt sur le quai, mais devrai attendre presque trois quarts d’heure un train en retard.
Et c’est à presque 15 heures 30 que j’arrive en gare de Naples. J’ai une faim énorme et commence à regretter d’avoir joué le renard de la fable dédaignant des raisins trop verts. Mais renard, héron ou jeune fille, le personnel des fables de La Fontaine n’a pas toujours raison. D’ailleurs, je trouverais sans doute, chez ce moraliste et poète immense, un contredit à une leçon par trop simple, qu’on aurait tort de prendre toujours à la lettre.
Le contredit arrive presque aussitôt. Dans la gare même, je me trouve un endroit où salades, pâtisseries et sandwiches semblent vraiment appétissants. Et, de fait, le sandwich toasté aux légumes grillés que je mange est excellent. Le serveur — l’air toujours aussi peu italien que possible, à la peau rose et aux cheveux clairs, un peu replet sous son uniforme de barman — est souriant et détendu (il est vrai que le coup de feu du déjeuner doit être passé depuis longtemps). Je lui commande un verre de vin blanc en lui laissant le choix de l’appellation : flatté semble-t-il, il joue les empressés et me sert généreusement les deux tiers d’un verre ballon dont la contenance excède largement celle d’un verre à beaujolais : je ne serais pas étonné qu’il y ait près de 30 centilitres dans le geste arrondi avec lequel il verse et me tend un vin aux jolies couleurs d’un raisin sultanine tenant les promesses dont, précisément, mon gentil échanson assortit l’offrande qui m’est réservée. Je révise ainsi mes préjugés sur les mauvais vins italiens bus jadis à Rome ou dans les pizzerias françaises ! Ultime générosité, au moment de payer, le serveur me fait cadeau des 10 centimes qui me manquent, refusant mon billet de 5 euros.
Je révise donc à plaisir le stéréotype de l’Italien voleur. Un peu plus tard, commandant une pinte à la terrasse d’un café, comme je n’ai pas les 50 centimes pour l’appoint en sus de mon billet de 10 euros que me réclame le garçon, celui-ci me rend un billet de 5, tout comme si les 50 centimes avaient été donnés, munificence qui me laisse un instant stupéfait.
Et le soleil est décidément revenu. J’éprouve toujours si fortement cette jouissance du moment présent, cette étrange quiétude. Ce bien encore étrange à-côté.