1251 - Si tant est que ce ne soit (toujours) pas une maladie… (12)
Si tant est que ce ne soit (toujours) pas
une maladie…
Carnets d'un rescapé
(Journal extime)
Work in progress
12
20 octobre
Matin
Je lis un article de Catherine Kinzler en hommage à l’enseignant assassiné. On n’en finit pas de plonger dans des détails accablants et sordides, à mesure que ceux-ci sont connus : la collégienne saisie par un père furieux et obtus en vengeur de la foi outragée n’avait pas assisté au cours du professeur, entre autres éléments d’un délire collectif qui s’est mis en place.
Le nom du professeur, qui avait tant circulé déclenchant le geste du tueur, n’est connu que depuis dimanche (à ma connaissance, parce que je n’ai guère pris connaissance des informations ce jour-là, préférant écouter en différé une émission de Jean-Noël Jeanneney du 4), et il est heureux que les journalistes ne clament à tout-va le nom de l’illuminé qui l’a décapité.
Après-midi
Nous nous entretenons avec le médecin de l’unité de soins où ma mère séjourne. Elle ne nous apprend rien de nouveau, au grand soulagement de ma sœur et de mon père. Elle entendait vérifier aussi que les dispositions prises par ma mère pour sa fin de vie restaient valables, et que tous trois étions d’accord pour refuser tout acharnement thérapeutique.
Ma mère, elle, n’est guère valide. Elle paraît surprise que nous soyons trois, mais elle n’explicite rien à ce propos. Lorsque mon père parvient à la persuader de marcher avec moi dans le couloir, elle me semble prise de faiblesse au moment où nous faisons demi-tour. Je la fais s’asseoir sur un banc, en avertis mon père, et réussis à la faire marcher avec le concours d’un aide-soignant que je croise alors.
Nous nous livrons, ensuite, à un tri d’objets appartenant à mon père dans la cave de l’immeuble. Je choisis l’effigie d’un guerrier chinois — on peut douter de son authenticité et la tête en a été recollée —, des tasses à thé en fonte d’un beau bleu profond que nous avions achetées ma sœur et moi, une statuette africaine enfin, figurant quelque figure de la maternité, monstrueuse et laide à souhait.
Soir
Au restaurant indien avec T., du fait de désordres sévissant depuis plus deux semaines dans mes intestins, je choisis des plats assez peu épicés, mais m’en sens frustré. Il m’amuse que, à rebours, que T. ait pris un plat plus épicé qu’il en a l’habitude.
T. — je ne peux m’empêcher de le noter — conduit très mal. Il imprime à sa voiture de brusques accélérations ou des freinages intempestifs, au point de me faire appréhender le prochain coup sur la pédale de frein ou la prochaine embardée. Est-ce parce qu’il a appris à conduire assez tard, après vingt-cinq ans ?
Nuit du 20 au 21
Rêve fortement érotique — in cauda !
Alors que je me rends chez mes grands-parents maternels, je ne reconnais pas tout de suite les lieux. Je ne suis donc pas certain (autrefois, j’y parvenais — je n’en ai pas tout de suite le souvenir) de pénétrer avec ma propre clé, laquelle ouvrait, à la fois chez eux et chez mes parents, la porte d’entrée de la maison.
Je croise un de mes oncles (?), tout jeune, joliment découplé, beau garçon, que je ne crois pas reconnaître. De fait, c’est un locataire, qui a eu, me dit-il, des démêlés avec mes grands-parents parce qu’il écoutait trop fort de la musique.
Il me fait passer par l’arrière-boutique, puis la cour.
Quand j’emprunte l’escalier qui monte à l’appartement, je constate que les lieux ont bien changé. Tout a été modifié, les pièces, redistribuées autrement. (Je me demande alors s’il existe dorénavant une salle de bains : toute la famille se lavait dans la cuisine ; je ne suis pas sûr qu’il y eût de l’eau chaude ; les « cabinets » étaient glacés en hiver… Je dormais dans une alcôve avec mon oncle, qui dormait en slip « kangourou » blanc et « tricot de corps ». Il régnait là une odeur tiède, un peu écœurante, de mâle — ou de pieds ? — qui me plaisait bien malgré tout…)
Mon grand-père m’accueille, surpris et amène (même lui, dans mon rêve, se trouve métamorphosé !). Je le lui dis.
Puis ma grand-mère m’accueille, très aimablement elle aussi. (Je songe, dans l’après-coup, que c’est peut-être la vue d’une chope qui représentait un buveur de bière alsacien posée autrefois sur le bahut qui a pu déclencher le rêve…)
Je suis bientôt dans la rue, flanqué du locataire en short et torse nu, qui me fait bon accueil à son tour. Et se montre tout à coup entreprenant. Je m’en étonne un peu. Mais il me plaît beaucoup. Avant de céder à mes avances, je lui manifeste toutefois ma surprise : je pensais, et je le lui dis, qu’il était « une homme à femmes ». Pour toute réponse, il me caresse et insiste quand sa main rencontre mon sexe. Je trique.
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[Note :] Rêve étrange, en ce qu’il préfigure celui que j’ai fait l’année suivante concernant le « jeune Erwan » !
[Autre note :] Dans ma recherche d’images pour illustrer cet article, je ne vois guère que quelque « slip kangourou » !
Je m’y livre, tombant, dans la majorité des cas, sur des catalogues de sous-vêtements — songeant à Alain qui m’avait raconté que le feuilletage du catalogue des Trois-Suisses ou de La Redoute suscitait en lui quand il était enfant — souvenir que lui et moi avions en partage — de fascination érotique
— à la vue de sexes masculins, dont on devinait parfois les formes audacieusement moulées !