1245 - Si tant est que ce ne soit (toujours) pas une maladie… (8)
Si tant est que ce ne soit (toujours) pas
une maladie…
Carnets d'un rescapé
(Journal extime)
Work in progress
8
8 octobre
Matin
Le cours de Feldenkrais me paraît moins ardu et m'est confus que les précédents. Il faut dire qu’est arrivée une nouvelle personne. Simone a abandonné les cours enregistrés de **** et s’occupe seule des opérations. Elle nous épargne ainsi les envolées mystiques — rares, je le concède, mais souvent à la lisière du ridicule — du maître.
Nous prenons un café chez elle ensuite, P***, elle et moi. P*** s’est bien remis de son opération (laquelle ? au vrai, je ne sais trop). On lui a retiré les fils, il y a peu. Je me reproche — comme lorsqu’il s’agit de ce que dit Denis — de ne pas toujours m’intéresser à ses propos. Sa foi naïve (et tardive) m’agace un peu. Pourquoi nos amies (les miennes ?) sont-elles flanquées de compagnons ternes ou patauds, naïfs ou niais, maladroits ou gaffeurs (ce qui vaut surtout pour Denis, même s’il s’est dégrossi au contact de Valérie)… ?
Après-midi
J’appelle T. pour qu’il n’oublie pas m’acheminer mon vote par correspondance pour les élections professionnelles.
Une jeune fille effectue son stage de dernière année auprès de l’orthophoniste. Celle-ci me demande d’esquisser l’histoire de ma pathologie. Je me livre plutôt volontiers à un bref récit, songeant à Christine, Anouchka, B. — je le fais pour ce qui me lie à cette discipline, dont j’entrevois les arcanes profonds qu’elle entretient avec le langage, peut-être le lien le plus précieux (s’il est un…) que nous avons reçu en héritage, et qu’à notre tour nous transmettons.
Je retrouve Marthe, Paul et T. dans la café où officie Dimitri. M.-C. nous rejoint bientôt. T. a bien porté mon enveloppe. Il s’irrite à un moment parce que j’ai évoqué l’antisémitisme de Voltaire, et je m’étonne intérieurement de l’âpreté de sa réaction.
A d’autres moments, nous rions beaucoup. M.-C. doit signer le lendemain (?) un compromis de vente pour un F2 bis qu’elle achète à Dieppe. Généreuse, elle nous invite à y séjourner. Elle nous offre aussi une « tournée » pour son anniversaire.
Soir
J’appelle mon père et prends sur le moment la décision de voir ma mère la lendemain. Je m’en effraie un peu ; mais d’affronter l’épreuve dissipe en partie ma crainte.
Trois sièges (sur sept au total) échoient à la liste indépendante emmenée par Elvire et Amélie. Je reçois un message d’Elvire.
9 octobre
Après-midi
Après une sieste de près de deux heures, je vais donc voir ma mère. Elle est éveillée, en train de boire une de ces boissons dynamisantes qui constituent désormais l’essentiel de son alimentation. A peine si elle s’étonne de me voir arriver seul. Je lui en fournis l’explication, en regrettant in petto cette opportunité qu’il y aurait eu à ce qu’elle pose la question (même si je doute qu’elle l’aurait fait). Elle ne commente pas. Je la fais lever et aller dans un fauteuil.
Une aide-soignante passe, qui lui enjoint de finir sa boisson. Je demande de l’eau (j’ai un souvenir assez désagréable de ces bouteilles d’eau pétillante à bouchon rouge que l’on servait dans les premiers jours à l’hôpital, et pense que ma mère doit partager ce manque d’appétence pour ces bulles fades et vaguement salées…).
Je réussis à ce qu'elle se lève à nouveau. Nous marchons dans le couloir, la main dans la main. Son pas est mal assuré et elle se tient aux rampes. Pourtant, je n’ai pas l’impression qu’elle pourrait perdre l’équilibre et tomber.
Ce que je peux lui dire — je tâche autant que possible de lui parler — n’éveille que fort peu d’écho. Elle paraît d’ailleurs de plus en plus absente. Elle se plaint de ne pas être bien, de plus en plus souvent au cours de ma visite. Je finis par accepter qu’elle se recouche, façon qu’elle a généralement de se faire ses adieux…
Soir
Je suis content de prendre un verre sur une terrasse avec les gens de la liste indépendante, qui fêtent les résultats des élections. Je fais face à T. — nous avons pris un premier verre auparavant —, suis à côté de Neil. Je n’ai pas vu Laurent depuis le confinement. Séverine et Elvire sont également là.
Isabelle arrive bientôt, avec qui j’ai correspondu mais pas revue non plus. Nous avons un long aparté.
J’invite Neil à ce qu’on se voie durant les vacances. Il est tard quand nous nous quittons — et je meurs de faim.
10 octobre
Matin
Je reçois une lettre des impôts qui fait état d’un avis de redressement, malgré le courrier adressé début juin par mon père.
Après-midi
Je rejoins Marthe et Paul dans le café où travaille Dimitri. Celui-ci paraît travailler tous les jours de la semaine.
M.-C. nous a invités à venir déjeuner chez elle. Nous convenons d’une date possible pour les uns et les autres, laquelle pourrait arranger également T., qui déclinera cependant l’invitation.
Nous passons un moment agréable à rompre des bâtons qui souvent nous amusent.
Soir
J’achève les Portes de Thèbes. Le texte abonde en alexandrins, matrice rythmique partout prégnante, et pas seulement dans les passages versifiés.