1265 - Si tant est que ce ne soit (toujours) pas une maladie… (21)

Publié le par 1rΩm1

 

 

Si tant est que ce ne soit (toujours) pas

une maladie

Carnets d'un rescapé

(Journal extime)

Work in progress

 

21

 

19 novembre 2020

Matin

Quoique interrompu à diverses reprises dans mon sommeil, je me lève assez tard — il est plus de sept heures — et constate que j’ai moins mal au dos.

Je me recouche après déjeuner et entame une relecture de Proust (je ne sais combien temps je m’y attellerai).

 

Après-midi

Séance calamiteuse chez l’orthophoniste. En créant des mots-valises (alligator + torticolis = alligatorticolis), je m’y prends à diverses fois pour réduire mes bredouillis. Mais c’est pire encore lors de la sorte jeu de cluedo auquel elle me livre par la suite : par recoupements successifs il faut trouver dans quelle maison habite tel autochtone de telle nationalité fumant tel type de cigarette ou cigare et buvant tel ou tel breuvage… Ce genre d’énigme me passionne aussi peu que possible et j’échoue lamentablement.

 

Nuit

Les voisins me tirent de mon sommeil à minuit vingt. Je dois déménager. Des portes claquent encore à une heure du matin.

 

 

20 novembre

J’écris à la voisine. Je me fiche qu’elle soit ma locataire et puisse mal le prendre.

Je tâche de me persuader de mettre davantage de cœur aux tâches que j’empoigne. Il me semble gagner un peu en aisance dans les morceaux que je joue au piano. Et, patiemment, je reconstruis la journée du 21 février de mon journal napolitain, pour laquelle je m’étais trompé presque du tout au tout. J’écris à Anne.

Rendez-vous est pris avec T. devant une librairie du centre ville. Je commande l’ouvrage d’Adrien, ainsi qu’un livre de Mathieu Riboulet que je ne possède pas encore.

1265 - Si tant est que ce ne soit (toujours) pas  une maladie… (21)

Je trouve peu expansif le libraire, et ne peux m’empêcher de songer que cela nuit sans doute à l’exercice de la profession (et ce, même si j’aimerais guère qu’il se montre bavard !).

Nous voulons aller au Parc B*** ensuite. Il ferme dans la dizaine de minutes qui suivent. En chemin, T. parle surtout du coronavirus (il faut dire que je lui ai proposé d’aller chez lui ou chez moi : j’ai même acheté des lingettes désinfectantes (!), puisqu’il m’a opposé à diverses reprises les risques sanitaires…). Il me montre les livres qu’il a achetés (Thucydide, Tardieu — je plaisante à,ce propos : un mot pour autre, voilà qui, de fait, me met dans l’embarras —, j’ai oublié entre-temps quel historien grec). Je lui montre ma lettre à la voisine, le courriel que je destine à Anne. Quelques erreurs et omissions de mots subsistent, et il rectifie quelques formulations qu’il juge peut-être difficiles à comprendre… Nous stationnons de banc en banc sur le cours, tâchant de nous réchauffer. Le froid, cependant, gagne peu à peu. En vérité, nous sommes demeurés à l’extérieur plus d’une heure et demie. Nous nous quittons sur un rendez-vous assez vague, les températures risquant d’avoir raison de nous durant les jours qui viennent.

 

21 novembre

Matin

L’absence de tout bruit et la présence conjuguée de lettres (dont la mienne, la veille) déposées dans l’escalier attestent l’absence conjointe des deux voisines. Voilà qui réjouit.

 

Après-midi

Je suis content de voir M., qui a toujours un grand sens de l’accueil.

Elle n’avait pas voulu venir chez moi parce que mon genou lui faisait mal et qu’elle ne se voyait pas monter les cinq volées d’escaliers qui y mènent. Elle se soigne à la cortisone, malgré les risques signalés par les spécialistes consultés, qui ont voulu la prévenir des conséquences des abus de pareil remède. Je sais M. plutôt velléitaire et ne suis donc pas certain qu’elle cessera d’y recourir. Je m’amuse de ce qu’elle me dise, puisque j’ai moi-même évoqué mes douleurs au dos et aux épaules, que, à ce propos, il faut marcher…

J.-L. est là, qui vend des pommes et des noix dans la cour de la maison. Amiel, la petite-fille de M., avec laquelle je ne suis jamais parvenu vraiment à établir d’atomes crochus, fait une courte apparition. C’est une fine et jolie jeune fille, et je me trouve bête devant elle, qui plaisante avec J.-L., ce pour quoi je renchéris pataudement — ce qui ne risque pas d’alléger mon cas.

J’ai bu un café que m’a servi M., mais J.-L. propose bientôt un alcool de myrte corse. Nous évoquons brièvement le séjour que nous avions passé chez A., elle, moi et R. — et je m’étonne que M. ne me demande pas des nouvelles de A. Elle m’en demande, en revanche, de Khadija, et nous tombons d’accord à propos de la sorte de servitude volontaire que s’est imposée Khadija auprès de sa famille. L’alcool de myrte, quoique fort, n’est pas mauvais.

Nous sommes interrompus par un visiteur, un tout petit monsieur raccourci par les années, dont M. m’apprend que la femme souffre depuis quelques temps de la maladie d’Alzheimer : la maladie a rendu l’épouse méchante ; lui, d’être devenu son souffre-douleur, a pris un soudain coup de vieux. Nous parlons alors de la vieillesse. M. me demande des nouvelles de mon père (elle a demandé bien plus tôt comment allait ma mère).

Je me décide, ayant pas mal parlé, à rentrer — puisque M. s’enquérait également de mon propre état de santé et ne voulant pas non plus abuser de son hospitalité — ; d’avoir dissimulé un peu de vague à l’âme a fait refluer un peu d’humeur atrabilaire…

 

22 novembre

J’ai terminé la première section de “Combray” et décide de faire une pause.

 

Déjeuner dominical rituel. Cette fois, ma sœur m’invite. Elle fait bruire beaucoup d’électricité autour d’elle : elle parle fort — c’est la première fois que je m’en rends si bien compte… — , ce qui m’agace passablement. Je la trouve également quelquefois agressive envers mon père. Ces deux-là doivent se voir un peu trop souvent.

Je trouve, en rentrant, un message d’excuse de la voisine.

J’entame le quatrième volume de les Chroniques de San Francisco, distrayant et simple à lire.

 

23 novembre

Le médecin ostéopathe que j’ai consulté remet en place les verticales — cervicales et lombaires — à l’origine de mes douleurs. Quand il me dit de me mettre sur le dos, je me positionne sur le ventre, de me reculer, j’avance, de me coucher à gauche, je vais à droite, etc.

M.-C. a téléphoné. Je lui force un peu la main pour l’inviter à déjeuner mercredi.

Je reçois un autre appel : les infirmières de l’unité du sommeil veulent me “reprogrammer” en janvier.

Chez l’orthophoniste, son “cluedo” occupe toute la séance. Tout n’est pas résolu pour autant. J’en suis bien irrité. J’emporte la feuille qui collecte les données du problème.

J’effectue une promenade ensuite.

Il faudrait que je traite à nouveau la plante de J.-M. Je diffère.

Il commence à faire froid. Je me décide à mettre en route la climatisation réversible dans le bureau.

 

24 novembre

Matin

Est-ce d’avoir séjourné devant trop d’écrans ? — mais je me réveille, bien que plus tard que d’habitude, avec l’impression d’avoir très mal dormi.

Je me pèse : 66,6 kilos. Malgré mes efforts, je ne parviens pas à perdre du poids.

J’arrive un peu en retard au cours de Simone. J’ai très souvent mal en effectuant les mouvements. (J’ai trébuché par trois fois la veille, en espérant n’avoir pas annihilé le travail de l’ostéopathe.)

Simone me laisse sur le trajet devant sa voiture. Je me suis montré peu loquace en chemin, mais j’avais le désir de prendre avec elle un café.

 

Après-midi

Je reste deux heures au lit, en dormant les deux tiers du temps. Je me sens déprimé.

Je regarde, pour la seconde fois, un des épisodes d’une série. Je me sens nul et non avenu, sali par mon indolence.

Pour contrer ce sentiment, je pianote.

T. m’appelle : il n’a pas envie d’aller au Parc et annule le rendez-vous. Il propose de nous voir jeudi après-midi. Il rappelle dix minutes plus tard : il a contacté Marthe et Paul ; finalement, nous nous verrons demain.

De retracer ces lignes contribue à me déprimer plus encore.

 

 

 

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