1330 - Mars à Paris (4)
Mars à PARIS/ MARCH in Paris
[Journal extime, 15-22 mars 2022]
Work in progress
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17 mars 2022
J’attends Claude à la sortie du métro. Auparavant, je suis passé devant le Bataclan, où un deux-pièces est à vendre (je me rêve par intermittences et instants en habitant de Paris).
Nous installons Claude dans l’appartement. Puis nous allons à pied voir l’exposition consacrée à Louis-Léopold Boilly (Boilly. Chroniques parisiennes), peintre dont nous ignorons tout. Entre-temps, je montre à Claude la Descente de croix de Delacroix à l’Église Saint-Denys-du-Saint-Sacrement.
L’exposition du musée Cognacq-Jay, ainsi que la visite des lieux, ne m’intéresse pas uniment. Je n’aime pas beaucoup, il faut dire — à rebours de Claude —, la peinture du XVIIIe siècle, qui, sur les conseils d'un ami, a choisi d’ajouter cette visite à la faveur de son départ anticipé. Certaines mignardises ou, émanant des mêmes artistes, certaines œuvres égrillardes sans que l’on fasse parfois le départ entre telle ou telle intention découragent assez aisément mon sens esthétique… Ma mère a longtemps possédé une école de Nattier où l’on voyait un jeune homme, les yeux révulsés par l’aubaine qui s’offrait à lui, versant un verre de vin d’une carafe à une dondon — les femmes étaient inutilement corpulentes en ce siècle et peut-être celle-ci paraissait-elle très mince en son temps —, le sein découvert dans un débraillé, apparié à celui de son compagnon, censément érotique. Ma sœur et moi détestions-nous cette toile d’assez grand format. Les Boucher et autres Greuze ne déclenchent en moi aucune forme d’enthousiasme — et je ne comprends rien à ce libertinage aristocratique ou grand-bourgeois, non plus que, si j’apprécie Diderot de bien des façons et si je salue la naissance de la critique d’art grâce ses Salons, je ne goûte les verrous, épagneuls et autres escarpolettes d’une licence douteuse dont s’affublent, entre autres guirlandes de fleurs, les tableaux de l’époque…
Pour revenir à Boilly, qui n’est pas sans sacrifier à cette sorte de peinture — encore n’est-ce pas constant et son existence excède-t-elle les limites du siècle des philosophes et libertins —, sa technique, ses compositions, assez bien léchées et bien ordonnées, trop peut-être pour leur donner un total assentiment, justifient sans doute que l’on lui consacre une rétrospective…
Autoportrait en muscadin, les cheveux poudrés, vers 1793-1795, Huile sur papier marouflés sur toile, Lille, Palais des Beaux-Arts
Portrait présumé de l'un des trois fils du premier mariage de Boilly, vers 1795-1799, Huile sur papier marouflé sur toile, Lille, Palais des Beaux-Arts
Guillaume Guillon dit Lethière et Carle Vernet, vers 1798, Huile sur papier marouflé sur toile, Lille, Palais des Beaux-Arts
Grappe de raisin blanc, vers 1795-1800, Huile sur papier marouflé sur toile, Signé en bas à gauche : L. Boilly Pinx, Rouen, musée des Beaux-Arts
Le peintre excelle en trompe-l’œil, lesquels atteste une certaine virtuosité, et je m’amuse de ce chat qui crève le revers d’une toile pour s’emparer de harengs.
Témoin à l’œil acéré de la société et des événements auxquels il assiste — à l’instar de Louis-Sébastien Mercier, dont il pourrait être l’équivalent littéraire, à quelque vingt ans près —, il aime aussi se représenter in assistenza, tant et si bien que l’on a eu beau d’organiser un parcours ludique où l’on le retrouve d’un tableau l’autre…
La Prison des Madelonnettes, vers 1815-1819, Huile sur papier marouflé sur toile Paris, musée Carnavalet - Histoire de Paris
Distribution de vin et de comestibles aux Champs-Élysées, à l'occasion de la fête du roi, 1822, Huile sur toile, Signé et daté en bas à droite : L. Boilly 1822 Paris, musée Carnavalet - Histoire de Paris
Le reste, cependant, ne me séduit pas toujours.
Puis nous visitons la collection permanente de meubles, tableaux et objets du musée, « livret de visite » en main, ce qui m’épargne le souci de photographier tel ou tel cartel
(j’ai toutefois bougé intempestivement au moment du cliché concernant cette miniature, et je ne saurai donc jamais ni le nom de l’artiste ni celui du jeune homme qui y est représenté).
Attribué à Francesco Guardi, Caprice avec un arc triomphal en ruine et paysage du bord de la lagune, Huile sur toile
Jean-Honoré Fragonard, Portrait de jeune garçon avec un chapeau à plumes, vers 1785-1788, Huile sur toile
Après piétiné là une bonne heure et demie, nous rentrons déjeuner.