1359 - Lettre à J.-M., septembre-octobre 1989 (1)

in  memoriam  J.-M.

T******, le 19 septembre 1989

Bonsoir l’un et l’autre,

Huit heures et demie. Que la nuit est sombre ! — pour enluminer mes nuits sombres (sombres, mes nuits !), heureusement, il y a la Grimbergen, une bière brune belge, que je bois à T*****, à cinq kilomètres et quelques de C***, le premier village belge après la frontière…

Je suis excité comme un pou (pluriel : des poux) — comme au moins deux poux à moi tout seul ! Car, en principe (en principe seulement, hélas !), j’ai décidé d’emménager rue de la P******, au n°-je-ne-sais-plus, dans l’appartement lamentable et mirifique dont j’ai parlé à J.-M. au téléphone la semaine dernière… Après l’enthousiasme de Simone venue le visiter avec moi, le mien bien évidemment, le « lorsqu’on a un coup de cœur, il faut le suivre ! » de Janine (la Birmane d’Idris, de Paris) hier au téléphone, le « intéressant ! » de J.-M., le « oui » de ma mère, le « oui, mais plutôt non » de mon père (à décrypter), je ferai retour demain pour investir le cabinet immobilier. S’“ils” me le donnent, s’“ils” ne l’ont pas loué entre-temps, alors… alors je déménage vite, et je cherche d’urgence ma salopette (oh là là, quelle horreur !) [pour des travaux] !

Ne crions pas victoire trop vite, non, me répété-je ; mais [il] est bien vain de se répéter pareille chose. — On l’aura loué… il aura brûlé… on ne voudra pas me le donner…, me dis-je encore. — Mais je vais du vain au plus vain… et tout cela est bien inutile, n’est-ce pas ?

Mon week-end à Reims (je feins de parler d’autre chose) s’est bien passé, nous avons pensé à votre envol vers des pays pluz-exotiques, W. et moi. Eric semble mieux aller qu’il y a quelques semaines, et Patrick (l’affreux Patrick) n’est pas mort pendant les vacances.

Les élèves, eux… bon, ben, à quoi bon ? — On rêve déjà aux vacances de la Toussaint, où il fera bon — ben, bon, ben… — repeindre les plafonds ! — c’est dire…

Je suis saoul de la Grimbergen + du vin que j’ai bu au dîner + [d]es Pelforth brunes avant dîner : qu’écrire dans ces conditions ? — Peut-être me tuerai-je entre T***** et C***… l’on ne parlera plus de moi… ni de l’appartement de la rue de la P****** ! Ce ne serait pas si mal !

— Mais qui posterait cette lettre ?!