1480 - Voyage en Meuse (3)
Voyage en Meuse
(3)
(récidive)
9 novembre 2022
J’ai rendez-vous avec le médecin à 9 heures (le samedi précédent, j’ai fait faire une prise de sang dont les résultats étaient satisfaisants : le taux de cholestérol a encore baissé, révélant que le médicament que je prends en alternance avec les statines fonctionne selon toute apparence). Avant que de me rendre à son cabinet, je réussis à m’approvisionner dans deux magasins différents ; puis, muni d’un certificat médical en bonne et due forme, je m’empresse de porter ce dernier au lycée. La secrétaire se montre bavarde avec moi comme une vieille connaissance dont elle prend des nouvelles — il faut dire que, dans son bureau, une nouvelle secrétaire a pris ses fonctions, façon peut-être de signifier à cette collègue que le « professeur » que je suis a toute sa sympathie (mais je crois qu’elle m’aime bien) — tant et si bien que je me demande si je pourrais être à l’heure pour cueillir Patrice à sa descente de train. Puis elle me demande brusquement si elle peut reprendre mon casier, dont j’ignorais qu’il avait été conservé en attendant mon hypothétique retour. Au sortir du bureau, je croise Gabrielle avec laquelle j’échange quelques mots rapides, aperçois B. au loin, qui ne se porte aucunement vers moi, vissé à son téléphone portable et fumant, comme il en a doublement l’habitude lors des pauses qui lui sont allouées. Je reprends la voiture en espérant que la circulation sera fluide et qu'il me sera facile de trouver une place de parking.
Je suis finalement quelques minutes en avance sur l’horaire du train pour attendre Patrice au haut de l’escalator de la gare de ***. Nous nous mettons en route pour L*** immédiatement puisque Patrice, cette fois, dit ne pas vouloir acheter de pots de fleurs et que j’ai mis dans le coffre un seau et de quoi nettoyer le granit du caveau familial sans que nous ayons à repasser chez moi.
Une même météorologie fuligineuse que l’année précédente sévit — bruine et ciel noir, ainsi que l’atteste la photographie, quasiment non varietur, que je prendrai de l’église et de son cimetière dans un ciel à peine éclairci quand nous parviendrons dans la petite ville où sont nés J.-M. et Patrice à moins neuf années d’écart.
Nous passons une journée agréable. Notre causerie porte sur des riens, hormis quelques-uns des sujets que j’ai retenus du moment même au lendemain de leur retranscription.
Son association a embauché un employé à trois quarts temps, ce qui soulagera de menues tâches organisationnelles, coûteuses en temps, que les uns et les autres ne menaient que sporadiquement pour tenir “à jour” autant que possible administration et comptabilité.
Comme j’évoque mes récents ennuis de santé, il m’apprend que sa prostate le fait dorénavant de plus en plus souffrir lorsqu’il doit uriner — et qu’il effectue, dès qu’il a atteint l’âge requis de cinquante ans, des coloscopies régulières, tout en s’étonnant du délai de cinq ans prescrit par le gastroentérologue pour une nouvelle investigation colorectale.
Il a repris le tabac — ce dont je me navre à part moi. Il me semble, en effet, que son père, décédé d’un cancer du poumon, son frère, d’un autre cancer attesté parmi les fumeurs, puisque de la vessie, auraient pu l’encourager à poursuivre le sevrage entrepris pendant deux mois (?) au mois…
Tout à nos bavardages, je me trompe de route et bifurque après Toul, bien avant l’embranchement que j’aurais dû emprunter en direction de Paris.
Arrivé au terme de notre voyage, Patrice nettoie minutieusement le caveau familial, allant jusqu’à dévisser les inscriptions des plaques funéraires. Il s’active là durant au moins une demi-heure.
Il plaisante à ce propos : c’est la plaque de la CGT, et non les plaques à caractère religieux, qui a subi le plus les injures du cours des saisons depuis notre précédent passage.
Je tâche d’identifier, au moyen du zoom, les lieux d’escalade dont j’ai illustré déjà ce journal-ci
— mais Patrice, ensuite, me dit que l’endroit en question se situe sans doute plutôt dans une carrière désormais abandonnée…
Il est un peu de midi quand nous reprenons la voiture afin d’effectuer le trajet inverse.
Nous atermoyons quelques instants quant au lieu où déjeuner : si nous patientons jusque ****, il sera plus de 13 heures, et tous deux avons déjà faim ; aussi décidons-nous de chercher un restaurant à Commercy, tout proche.
Le menu de l’endroit sur lequel nous arrêtons notre choix, comprenant entrée, plat et dessert, constitue une bonne surprise : il est copieux et bien cuisiné pour seulement 15 €, un prix assurément moins élevé que si nous avions déjeuné à ****. Le serveur, d’une trentaine d’années, vraisemblablement gay — je me demande fugitivement comment l’on vit son orientation sexuelle dans une si petite ville, mais il est vrai que d’autres villes plus importantes existent alentour — fait montre, qui plus est, d’un commerce agréable.
Patrice, comme nous en parlons, me dit qu’il ira voir l’exposition “Les Choses” au Musée du Louvre avec Anne et sa sœur prochainement. (Je m’étonne toujours à ce propos : pourquoi Patrice ne pose-t-il jamais de questions sur mes vacances ? celles que j’ai passées en Italie sont toute proches, il le sait bien ; pour autant, je décide de ne pas lancer la conversation à leur propos, même si Patrice, qui connaît l’Italie du Nord, pourrait me donner la réplique…)
Il règle l’addition.
Nous faisons un rapide crochet pour qu’il achète des madeleines au kilo dans une boutique dédiée sur la place principale.
Nous sommes de retour à *** vers 14 h 30. Comme il veut rapporter aussi une bouteille de Côtes de Toul rouge, nous nous rendons au centre ville (cependant, le cépage de pinot rouge manquant à l’appel, il devra se rabattre sur un Auxerrois blanc).
Alors que je le mène chez un caviste, nous croisons Bastien, que je hèle et avec qui je propose de nous voir prochainement.
Puisque nous en avons le temps encore, nous prenons un verre avant son train. Dimitri me salue quand nous entrons — ce qui m’amène à vérifier que, décidément, Paul ou T. n’ont jamais droit à autant d’amabilité, voire qu’il s’ingénie le plus souvent à éviter à leur adresser le moindre bonjour…
Cependant, le serveur tarde à nous apporter notre commande, tant et si bien que Patrice est réduit à avaler en moins d’un quart d’heure son Perrier rondelle (la serveuse, qui nous avait demandé ce que nous voulions boire avait repris en écho la demande de Patrice sous l’appellatif “Perrier tranche” !).
Il m’invite, alors que nous nous quittons, à venir à Paris prochainement, prêt, dit-il, qu’ils sont à m’accueillir, lui et Anne, dans le cas où l’appartement de F. et Pascal ne serait pas disponible.