575 - À pas étourdis, journal extime (12)
À pas étourdis : Paris - Prague - Paris
(journal extime : 22 juillet - 8 août 2014)
Lundi 4 août
Matin
Je photographie l’absurde paillasson enchaîné au bas de la cage d’escalier qui mène au studio : peut-être a-t-il connu des jours de gloire, mais serait fou celui qui volerait aujourd’hui ce galeux, ce pelé, même s’il pourrait faire encore son office !
Après avoir acheté un billet forfaitaire qui me donne la gratuité des transports durant trois jours, je me rends dans un bureau de change repéré les jours précédents pour pratiquer des taux attractifs. Alors que j’ai spécifié au guichetier que j’aimerais avoir de petites coupures, j’ai l’impression du contraire, et, cédant à la mauvaise humeur, je me montre agressif — pour mieux me sentir stupide ensuite.
Je traverse le pont Charles, m’attardant à nouveau devant la statue de saint Jean de Népomucène, tout en songeant à Julien — et ne sachant pas encore que mon vœu sera si sinistrement exaucé...
Il fait un temps gris et frais, qui repose des chaleurs exaspérantes des jours précédents.
Sur Na Kampě en contrebas, les touristes commencent à affluer.
Dans le parc Kampa, tout près du musée d’art moderne, je découvre les bébés géants de bronze « miminka » de David Černý, hauts de deux mètres soixante — apprendrai-je ensuite. Comme à Paris dans le square Miró rue Blomet, des enfants escaladent ces créatures accueillantes à leurs jeux, sans se rebuter de leur physionomie horrifique à leurs aînés — les trouvant, bien au-delà de la provocation, à leur semblance, tout accueillantes à leurs jeux...
Je visite le musée où je vois des œuvres de František Kupka, Otto Gutfreund, Zdeněk Smetana... Je suis assez sensible aux peintures très géométriques de Kupka qui imposent rythmes et couleurs...
Je visite ensuite l’Eglise Saint-Nicolas (payante ! je m’acquitte donc de 70 Kc), rutilante d’ors qui dégoulinent sur de (faux) marbres : la laideur parfois s’y exaspère…