721 - Passacaille estropiée (9)

Publié le par 1rΩm1

 

Passacaille estropiée

 

Paris, Berlin, Copenhague

 

(journal extime, 24 juillet -13 août 2016)

 

IX

 

31 juillet

Journée un peu creuse, conçue volontairement comme telle.

Je me rendors après le petit-déjeuner — et fais une sieste après avoir déjeuné : je dois, décidément, avoir beaucoup de sommeil en retard…

 

Je me secoue tout de même. Et vais à Orsay. Jamais je n’aurai parcouru une exposition (Charles Gleyre, le romantique repenti) aussi rapidement...

Je m'attarde dans diverses salles et allées. Et photographie pour Khadija deux des variations préférées de Bourdelle.

 

721 - Passacaille estropiée (9)
721 - Passacaille estropiée (9)

Je fais un peu de ménage — sans m’y livrer entièrement, puisque Francis viendra bientôt habiter l’endroit et que je n’ai guère sali de toute façon—, puis effectue quelques repérages nécessaires à mon arrivée le lendemain à Berlin.

 

Le soir, je converse un peu avec Daniel de Strasbourg.

 

1er août

Journée plus nulle encore que la précédente, puisque passée à voyager.

A la poste de la rue L*** (je songe à Duncan, dont le frère habite à un jet de pierres), l’employé au guichet refuse de me délivrer le colis qu’a reçu Judith sous prétexte qu’est exigible l’original de la carte d’identité. J’ai beau arguer que Judith est en voyage et qu’elle a, précisément, besoin de sa carte d’identité pour voyager, je me heurte au mur de la bêtise des règlements. J’ai d’autant plus l’impression d’avoir perdu mon temps que le bureau de poste, du fait des horaires d’été, a ouvert une demi-heure plus tard que d’ordinaire et que j’ai dû patienter sur le trottoir en même temps qu’une quinzaine d’autres personnes tout aussi ignorantes de ces horaires allégés.

 

Le bus qui doit m’emmener à l’aéroport et que je prends à la gare Montparnasse a trente minutes de retard. Il en ira de même pour l’avion.

A Berlin, débarqué d’un S-Bahn dans le quartier de Charlottenburg, malgré l’itinéraire établi la veille, je me perds et demande mon chemin (la numérotation allemande des immeubles et des maisons est, comme d’ordinaire, proprement déroutante) : je fais tout un U inutile avant de trouver la bonne entrée d’immeuble. J’ai tout loisir de constater que je me trouve dans un quartier populaire avant de faire face à cet immeuble défraîchi, qui s’adosse au parc de Charlottenburg (Schlossgarten). La chambre dans laquelle je suis attendu — j’avais prévu large pour mes déplacements, mais je suis en retard d’une vingtaine de minutes —, quoique vaste, est en correspondance. La jeune fille qui m’accueille est sympathique, mais parle mal anglais. Elle habite là à l’évidence. Je devrai laisser la clé à l’intérieur en repartant.

Je fais des courses dans le quartier et dîne sur place.

 

Je parcours un peu le guide pour savoir où prendre une Paulaner Weissbier. J’arrête mon choix sur le café Literaturhaus, qui, de fait, s’avère un bel endroit art déco, où les prix ne sont pas majorés pour autant. Sur le chemin, je repère une belle sacoche en cuir brun soldée, qui remplacerait assez bien celle que j'ai depuis quelques années, que les frottements ont limée sur les coins.

La femme qui m'apporte ma bière est agréable.

Un vieux monsieur en partant salue une tablée de jeunes touristes français : « Au revoir. Vive la France ! vive la République ! »

Fatigué, je reprends bientôt le bus en sens inverse sur un Kurfürstendamm qui me paraît somme toute familier pour l’avoir sillonné très souvent avec R. avec le même mode de transport pour retrouver le camping-car dans une rue adjacente de cette avenue, où nous l’avions garé près d’une borne à eau, précieuse pour nos approvisionnements. 5i serait, je pense, impossible, de stationner ainsi aujourd'hui.)

* * *

[Ouvrant ce jour un guide que je n’avais pas eu la présence d’emmener dans ma valise pour vérifier quelques détails, j’y trouve divers documents qui me permettent de dater mes deux premiers séjours dans la capitale allemande : d’une part, un gay pocket guide de August/ September 1997 ; d’autre part, plus précise encore, une  facture (Rechnung) d’une chambre d’hôtes Rankenstrasse (toute proche du même Kudamm) où nous avons séjourné du 1er au 4 août 2005. Nous revenions alors des pays baltes. A l’aéroport, j’avais vainement attendu ma valise. En fait, quelqu’un s’en était emparé, croyant que c’était la sienne. Nous étions allés au bureau des réclamations, et je m’étais vu donner (si ma mémoire est bonne) une sorte de trousse de première urgence contenant crème à raser, rasoir, dentifrice et brosse à dent, ainsi que quelques marks pour faire face à quelques dépenses complémentaires. La valise m’avait été rapportée le lendemain ou le surlendemain dans l’Hotel-Pension où nous nous trouvions. Entre-temps, je m’étais amusé de la situation, le cœur curieusement léger, voire : allégé de tout bagage, tandis que R. tirait sa propre valise et que je cheminais à ses côtés les mains libres. C’est à l’office du tourisme d’Alexanderplatz que l’on nous avait trouvé notre chambre, à une époque, pas si lointaine, où l’on pouvait s’en remettre encore à l’aventure et avoir des interlocuteurs plutôt que de passer par Internet !

C’est aussi cette fois-là que nous avions visité une très belle rétrospective sur le Blaue Reiter au Musée d’art moderne de Berlin, ainsi qu’une exposition Goya magnifique (exposant, entre autres œuvres, les Caprices, les Désastres de la guerre…) : dans la file d’attente, j’avais été interpellé par Léonie, tout heureuse, semblait-il de me trouver là, ce qui, de fait, pouvait paraître extraordinaire.

 

Otto Mueller, Mädchen zwischen Blattpflanzen (Mädchen im Schilf), 1912.

Otto Mueller, Mädchen zwischen Blattpflanzen (Mädchen im Schilf), 1912.

Francisco Goya, le Vendeur de poteries © Internet

Francisco Goya, le Vendeur de poteries © Internet

 

1997/ 2005/ 2013/ 2016 : mes retours à Berlin s’accélèrent !]

 

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