883 - Prolégomènes à toute belgitude future (8)
Prolégomènes
à toute belgitude future
(Metz - Paris - ****)
(22 juillet - 12 août 2018)
VIII
4 août
Matin [suite]
Résumé : Je la fais, cette chute, dans un escalier du musée d’Orsay. Je me reçois mal, j’écrase ma cheville gauche. Deux gardiennes se précipitent. L’une parle de pompiers. Je proteste qu’il n’est pas besoin, m’assois un instant, pour reprendre ma marche. Cependant, j’ai très mal à la malléole.
J’étais venu là, pacifique pourtant, pour voir l’exposition sur les sculptures polychromes.
Camille Alaphilippe, sculpteur/ Alexandre Bigot, céramiste : la Femme au singe, grès émaillé et bronze doré.
Hans Bellmer (Katowice, Pologne 1902 - Paris 1975), la Poupée. Ajouts et réfections en 1945 et 1970-71. Bois peint, papier mâché collé et peint, cheveux, chaussures, chaussettes. Paris, Georges Pompidou - Musée national d’Art moderne/ Centre de création industrielle.
Camille Claudel (1864-1943), la Vague, dit aussi les Baigneuses, 1897-1903 (?). Marbre-onyx et bronze. Paris, Musée Rodin.
Anonyme (Rome, Italie, époque romaine) / Nicolas Cordier (Lorraine 1567 – Rome, Italie 1612), Maure, dit le Maure Borghèse, 1611-1612, Albâtre fleuri, lapis-lazuli, calcaire noir, calcite blanche et marbre de couleurs. Paris, Musée du Louvre, Département des antiquités grecques, étrusques et romaine.
Je profite de ma visite pour revoir certaines salles et tombe sur cette toile exposée là en vue d’inciter le chaland à voir la prochaine exposition Picasso, bleu et rose à partir du mois de septembre.
Pablo Picasso, le Meneur de cheval
Je l’ai déjà photographiée, mais j’y reviens, m’essayant à d’autres angles.
Camille Claudel, l’Âge mûr, 1897, Groupe en bronze, fonte Thiébaut
J’ai, enfin, une pensée pour A., pour mes séjours à Arles.
Paul Gauguin, les Alyscamps, 1888, huile sur toile
Je ne m’attarde pas : je ne voudrais pas que mon talon soit trop fourbu.
Sorti de là, je longe la Seine. Plein Est, frontalement, effrontément, le soleil darde impitoyablement.
Après-midi
J’ai fait des recherches et ai trouvé un exemplaire de les Chemins égarés (Géographie sociale des lieux de sexualité entre hommes), photographies d’Amélie Landry et textes de Mathieu Riboulet et Laurent Gaissad dans l’une des antennes de la librairie préférée de François (car il ne m’a pas dit exactement à laquelle il allait, même si je soupçonne que ce devrait être plutôt l’une que l’autre), tandis que j’ai trouvé un exemplaire du livre écrit à quatre mains [?] par Véronique Aubouy et le même Mathieu Riboulet sur la Recherche intitulé A la lecture dans une autre antenne encore, près de la Bibliothèque Nationale François Mitterrand : je me rends donc Place Saint-Michel, où l’on me renvoie à l’autre librairie. Je ne pipe mot, mais ce n’est pas ce qu’indiquaient mes propres recherches. Quand, après avoir demandé, l’on me déniche au bon endroit le livre en question, il s’avère qu’il est d’occasion, et non pas neuf comme il était stipulé sur le site de la librairie. Les coins en sont peu affaissés et les tranches blanchies et râpées, mais la reliure, cartonnée, n’a pu que préserver textes et photos intérieurs, et, comme il est presque à moitié prix, sans barguigner davantage son bon usage, je m’en empare en remerciant. Et j’achète ensuite pour T. dont c’est bientôt l’anniversaire Prendre dates, ouvrage naguère offert déjà, cet autre ouvrage à quatre mains signé Mathieu Riboulet et Patrick Boucheron.
Que faire ensuite ? Je m’interroge. Happé, sur l’autre trottoir, par la nouvelle entrée du Musée Cluny, je visite les lieux (ce doit être la troisième fois).
En vérité, ce n’est qu’une exposition autour des tapisseries de la dame à la licorne et leur réception — on fait valoir pour postérité Gustave Moreau, mais ce n’est qu’une mention aucunement suivie d’effet (d’un accrochage), le reste des lieux étant, pour l’heure, en rénovation. Aussi le tour en est-il vite fait. Comme à Orsay le matin, je hasarde malgré tout quelques clichés.
Ce n’était pas mon intention première, mais je me souviens de l’exposition sur Mai 68 à la Bibliothèque François Mitterrand — j’avais renoncé la fois dernière à celle au Musée des Beaux-Arts et vu, le matin, de l’autobus, qu’une exposition à l’Hôtel de Ville se poursuivait jusque début septembre — et, sur ce bon prétexte, me lance donc à la poursuite de l’autre ouvrage de Mathieu Riboulet, jubilant comme jubile, j’imagine, un collectionneur (je me dis aussi que je dois être un peu « l’amant des morts », décidément !)…
Sur place, la vendeuse, après interrogation de son logiciel, me précède dans les rayons. Elle ne trouve pas l’ouvrage. Je lui demande alors quel est l’auteure associée (dont j’ai mesquinement oublié le nom). Je trouve bientôt l’ouvrage, qui, annoncé comme neuf, s’avère également d’occasion ! Pour autant, il n’a pas l’étiquette jaune de son prix. Mon interlocutrice me dit alors qu’elle va m’en fabriquer une. Cette fois, c’est au tiers du prix que j’emporte mon trésor ! J’achète également un opuscule de Pascal Quignard qui se signale à mon attention. (La valise pèsera lourd de tous ces bouquins !)
Sur le chemin de la bibliothèque, je m’achète, au tiers du prix également, un sweatshirt écru rayé marine, qui me fait songer à Frédérique, toujours habillée de pulls marins.
L’exposition vaut surtout pour ses commentaires quant à la façon dont la presse fabrique des icônes à partir de photographies mainte fois recyclées — et pour son diaporama réalisé sur le vif par Jean Pottier et Jacques Windenberger, Mai 68-nous, projeté en boucle sur l’un des murs de la salle. Clair, pédagogique, simple et tout simplement édifiant, je le regarde in extenso.
Je choisis de photographier quelques photographies, que je ne commenterai pas pour autant
Paris, Manifestation unitaire, 13 mai 1968, René Vital, Paris Match. [Légende Paris Match : “13 mai 1968. Manifestation géante entre République et Denfert-Rochereau réunissant ouvriers, étudiants, universitaires. Pendu en effigie, un CRS monté sur vélo. On reconnaît dans ce tableau la « patte » des élèves des Beaux-Arts”.
Caroline de Bendern, Manifestation unitaire, Paris, 13 mai 1968, Jacques Windenberger, Tirage argentique d’époque
Jeune manifestant parmi la foule, Paris, mai 1968, Jean-Philippe Charbonnier, 4 tirages argentiques d’époque
— quand bien même (mais c’est désormais le règne de l’image) nous ne faisons que nous entregloser.