1030 - En Bretagne (9)

Publié le par 1rΩm1

 

 

 

EN BRETAGNE

 

(journal extime)

 

(9 août - 21 août 2019)

 

9

 

15 août [suite]

 

Après-midi

 

Je visite le Musée des Beaux-Arts, assez vite parcouru, inégalement intéressant.

 

Je découvre un peintre lorrain dont j’ignorais l’existence.

 

Henri Royer (Nancy, 1869 - Neuilly-sur-Seine, 1938), Jeune femme de l'île de Sein, 1906, Huile sur toile

Henri Royer (Nancy, 1869 - Neuilly-sur-Seine, 1938), Jeune femme de l'île de Sein, 1906, Huile sur toile

Le musée possède aussi quelques tableaux de Paul Sérusier et d’Emile Bernard

 

Emile Bernard, Deux femmes sur la passerelle d'Asnières, 1887, Huile sur toile

Emile Bernard, Deux femmes sur la passerelle d'Asnières, 1887, Huile sur toile

Emile Bernard, Autoportrait, 1890, Huile sur toile

Emile Bernard, Autoportrait, 1890, Huile sur toile

Paul Sérusier, les Blés verts au Pouldu, 1890, Huile sur toile

Paul Sérusier, les Blés verts au Pouldu, 1890, Huile sur toile

— ainsi qu’une sculpture de Georges Lacombe où l’artiste s’est représenté en crucifié, mais aussi des œuvres de peintres célèbres.

Georges Lacombe, Autoportrait en crucifié, 1898, Acajou
Georges Lacombe, Autoportrait en crucifié, 1898, Acajou

Georges Lacombe, Autoportrait en crucifié, 1898, Acajou

Maurice Denis, Malon et les hortensias, 1920, Huile sur carton

Maurice Denis, Malon et les hortensias, 1920, Huile sur carton

 Edouard Manet, Deux perroquets, Huile sur toile
 Edouard Manet, Deux perroquets, Huile sur toile

Edouard Manet, Deux perroquets, Huile sur toile

Giovanni Francesco Barbieri dit Guerchin, Judith et Holopherne, 1651, Huile sur toile

Giovanni Francesco Barbieri dit Guerchin, Judith et Holopherne, 1651, Huile sur toile

Luca Giordano, l'Histoire et le Temps, Vers 1680, Huile sur toile
Luca Giordano, l'Histoire et le Temps, Vers 1680, Huile sur toile

Luca Giordano, l'Histoire et le Temps, Vers 1680, Huile sur toile

Je m’amuse de voir cette peinture de sainte Geneviève devant une Notre-Dame doublement anachronique puisque l’artiste aurait pu savoir que la flèche, dont on a dernièrement pleuré la disparition, ajoutée par Viollet-le-Duc, était alors toute récente, mais encore qu’au Ve siècle la cathédrale gothique ne pouvait exister…

 

Edmond Aman-Jean, Sainte Geneviève devant Paris, 1885, Huile sur toile

Edmond Aman-Jean, Sainte Geneviève devant Paris, 1885, Huile sur toile

Et je m’abîme dans la contemplation d’une grosse machine où l’ange masculin paraît avoir l’amorce d’un sixième doigt de pied.

 

1030 - En Bretagne (9)

 

J’attends la fin d’une brusque averse — il ne devait prétendument pas pleuvoir — avant de repartir, refluant vers l’entrée du musée et m’installant dans un fauteuil pour lire un peu (le guide, puisque je n’ai que cela).

 

Le centre ville est presque mort. Rue de Siam, quelques enseignes de prêt-à-porter sont ouvertes, un peu absurdement, le client devant être rare.

Beaucoup de béton et de laideur. J’ai du mal à succomber au charme de cette ville dont certains vantent la reconstruction après la pluie de fer de feu d’acier de sang [je cite de mémoire sans vérifier les vers] qui s’y est abattue [avant de découvrir ce qu’en disait lui-même Jacques Prévert]…

 

 

Je m’éloigne progressivement du centre en cherchant un magasin ouvert où je pourrais faire quelques courses. J’emprunte les transports en commun, vais à pied, rebrousse chemin, tourne tout en élargissant mes cercles, avant de trouver, après (donc) bien des circonvolutions, un commerce qui ne soit pas fermé.

Je l’écrirai deux jours plus tard à T. : « Quelle aventure pour trouver un magasin ouvert le jour du Pardon ! Et que de béton ! »

 

 

16 août

 

Matin

 

Je ne suis (donc) pas mécontent de quitter Brest, qu’a trop zébré la pluie.

Précisément, si le ciel est encore chargé, il ne pleut plus.

Et je goûte alors ma longue promenade à la pointe Saint-Mathieu

 

1030 - En Bretagne (9)

— promenade toute vivifiante dans le vent et l’air libre, après mon confinement en ville et dans le béton des deux jours derniers.

Sur ma tablette, j’ai emporté des clichés précieux d’excursions possibles, heureux de m'y adonner pour une deuxième fois, après celle dans Brest la veille.

 

1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)

Evidemment, les îles de l’archipel de Molène et l’île d’Ouessant sont perdues en mer, autant qu’a sombré l’amant de la Barbara de Prévert en ces temps couverts…

 

 

Après-midi

 

J’étais déjà venu à Roscoff, dont je me souvenais confusément.

J’en fais le tour, puis m’installe dans un salon de thé le temps de boire un café et manger une pâtisserie.

 

Roscoff, Église Notre-Dame de Croaz Batz
Roscoff, Église Notre-Dame de Croaz Batz

Roscoff, Église Notre-Dame de Croaz Batz

1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)

*   *   *

 

Je fais une halte ensuite très rapide à Morlaix, non sans être passé à l’office du tourisme pêcher quelques informations, ce qui me vaut d'être aimablement accueilli par un jeune homme agréable à regarder.

 

1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)

Une étonnante Vierge ouvrante1 retient mon attention à l’intérieur de l’Eglise Saint-Mathieu.

 

La Vierge ouvrante de Notre-Dame-des-Murs, Eglise Saint-Mathieu, Morlaix

La Vierge ouvrante de Notre-Dame-des-Murs, Eglise Saint-Mathieu, Morlaix

Je vais ensuite, un peu au hasard des rues et des ruelles, conscient que je ne pourrai tout parcourir.

Maison de la Duchesse Anne, Morlaix

Maison de la Duchesse Anne, Morlaix

La Maison à Pondalez, 9 Grand'rue, Morlaix

La Maison à Pondalez, 9 Grand'rue, Morlaix

 

*   *   *

 

A Saint-Thégonnec, il pleut alors que je visite mon premier et dernier enclos… La grisaille rejaillit sur les photographies faites à l’extérieur, tandis qu’elle atténue les excès colorés et dorés des naïvetés baroques de l’intérieur.

 

Saint-Thégonnec, Calvaire
Saint-Thégonnec, Calvaire

Saint-Thégonnec, Calvaire

Eglise de Saint-Thégonnec
Eglise de Saint-Thégonnec
Eglise de Saint-Thégonnec

Eglise de Saint-Thégonnec

Eglise de Saint-Thégonnec, Chaire

Eglise de Saint-Thégonnec, Chaire

Mise au tombeau du Christ par Jacques Laispagnol, Bois, Saint-Thégonnec, Ossuaire.
Mise au tombeau du Christ par Jacques Laispagnol, Bois, Saint-Thégonnec, Ossuaire.

Mise au tombeau du Christ par Jacques Laispagnol, Bois, Saint-Thégonnec, Ossuaire.

1030 - En Bretagne (9)
1030 - En Bretagne (9)

*   *   *

 

Je parviens ensuite à Saint-Brieuc, où j’ai réservé une chambre chez l’habitant jusqu’au lendemain. Christelle a une jolie maison ouverte sur un jardin. Un petit caniche blanc aboie et me suit en trottinant jusqu’à l’étage. Je ferme cependant ma porte à l'animal. La chambre est agréable, que jouxte une salle de bain.

 

 

Soir

 

J’ai réservé dans un restaurant à l’extérieur, dans un village distant d’une vingtaine de kilomètres. Il fallait que cela arrive à ce moment-là : le feu de croisement gauche de la voiture ne fonctionne plus.

Arrivé sur place, le restaurant est proprement introuvable. Je reviens sur mes pas, visite le village sans voir d’enseigne, reviens à mon point de départ, m’arrête pour appeler : je suis en retard déjà, il est plus de vingt-et-une heures, et mon estomac vrillé par la faim crie au désespoir. Mon interlocutrice me dit que le restaurant est à l’arrière du bâtiment où je me trouve, invisible, mais bel et bien là.

Je suis bien accueilli, et ce que je mange est très bon. (Je consulte le manuel de ma voiture en attendant le premier plat pour savoir comment procéder pour changer le feu de croisement.)

Je change finalement assez facilement — je m’en faisais toute une histoire par avance — l’ampoule de phare de ma voiture sous les lampadaires du parking. La fonction torche de mon portable n’est pas inutile pour éclairer et voir ce que je fais.

 

*   *   *

 

Il est minuit lorsque, rentré, après avoir lu quelques pages, assommé de fatigue, j’éteins la lumière.

 

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1Faite en bois de tilleul polychrome, elle appartient aux dix-sept "vierges ouvrantes" de France (en Bretagne, citons celle de la chapelle de Quelven en Guern, ou celle de Bannalec. A Paris, celle du Musée de Cluny, qui vient d'Allemagne ; en Île de France, celle d'Alluye ; celles d'Auvergne, de Lorraine, etc.). Toutes réalisées entre le XIIe et le XVe siècles, elles renferment toutes en leur sein, au sens ici littéral, une représentation trinitaire connue sous le nom de "trône de grâce" : le Christ en croix, tenu par Dieu le Père, et accompagné par la colombe de l’Esprit.

Fruit de la piété populaire, elles devinrent suspectes après le concile de Trente (milieu du XVIe) qui, réexaminant les bases de la foi, recommanda de ne plus recourir à ce genre de représentations. En effet, Marie est certes mère de Jésus et donc Théotokos, "portant Dieu", mais elle ne peut être reconnue mère des trois personnes de la Sainte Trinité. En 1745, le pape Benoît XIV les classait dans les figurations « non approuvées » de la Trinité. Néanmoins, la piété des Morlaisiens, très attachés à leur statue, a permis que celle-ci échappe à la destruction — apprendrai-je auprès d'un internaute.

 

 

 

 

 

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