1051 - Carnets d'un confiné (4)
CARNETS d’un CONFINÉ
4
[Journal pas toujours extime]
(14 mars 2020, … … …)
Mercredi 18 mars
Promenade de presque une heure sur des hauteurs non loin de chez moi — grimper permet plus d’activité physique que de marcher sur terrain plat — où je ne me suis jamais aventuré. Je me suis muni de mon « attestation de déplacement dérogatoire » [dans son premier état]. Je passe devant de grosses villas, souvent laides, construites dans les années soixante ou soixante-dix : rien qui déclenche le geste photographique.
Je croise plus de personnes que je n’aurais imaginé, dont l’amant de JP***, qui doit sortir de chez ce dernier.
J’appelle ma mère — après concertation préalable avec ma sœur — puisque c’est son anniversaire.
Puis je téléphone à T., qui tousse bien plus que la veille.
20 heures
De pâles imitateurs de l’Italie (car imiter c’est pâlir, et la Lorraine n’est pas Palerme, non plus que l’inverse !) applaudissent dans ma rue. Les volets fermés déjà, je n’ai pas envie de « socialiser » de mon balcon. Plus tard peut-être.
Jeudi 19 mars
Matin
La température de T. baisse. Le moral ne croît pas pour autant.
(Le message qu’il m’envoie l’atteste. En vérité, j’ai pensé comme lui, deux ou trois jours auparavant.)
Je fais quelques courses. Et dépose dans le garage de mon père — qui se tient à distance — huit litres de jus d’orange.
M.-C. appelle. Elle taxe de « gauchistes » les journalistes et intervenants du Média.
Pour le reste, nous nous accordons.
Après-midi
Je fais une longue longue longue promenade pour profiter de ce très beau temps — avant qu’on n’en ait plus le droit.
Je croise Marie-Agnès. Conversation à quelques mètres de distance.
Je poursuis mes excursions littérales, dans des endroits inexplorés auparavant, franchissant les limites d’une autre commune.
Je traverse ainsi un autre cimetière (non loin de chez S***).
Le cimetière juif, lui, est fermé dorénavant (il ne l’était pas la veille).
— Et le Parc Paul Verlaine, tout autant (et ses prunus, confinés).
Rentré, je reçois un appel de Marthe et Paul. Paul paraît toujours dans le déni.
20 heures
Nouveaux applaudissements.
J’ai appris — que comme en Italie (je pensais que c’était juste une façon de se mettre à l’extérieur, prendre le frais vespéral et échanger avec ses voisins) — que c’est en l’honneur des soignants.
Cela a plus de sens — assurément —, mais il faudrait assortir les hourrah de quelque semonce adressée aux responsables de la catastrophe sanitaire.