1264 - Si tant est que ce ne soit (toujours) pas une maladie… (20)
Si tant est que ce ne soit (toujours) pas
une maladie…
Carnets d'un rescapé
(Journal extime)
Work in progress
20
16 novembre
J’ai fort mal au dos au sortir du lit.
Je téléphone aux impôts. La responsable de mon dossier, me dit-on, revient d’un congé maladie, mais prendra connaissance de ma demande dans les jours qui viennent. Elle me rappelle, en fait, une heure et demie plus tard : il y a eu un « malentendu », elle va me faire parvenir un dégrèvement gracieux (de presque 600 €). Il reste néanmoins un peu de plus 1000 € à régler.
Je reçois une réponse d’Adrien. Il se montre (exagérément ?) chaleureux et m’adresse un lien pour regarder un long métrage qu’il a réalisé.
Je reçois aussi un courrier me faisant part de l’acceptation de mon congé jusqu’au 24 février à venir.
Mon père m’appelle trois fois dans la journée, d’abord pour me dire qu’il « déprogrammé » son opération, puis que, voulant communiquer sa décision, il a été « déprogrammé » de toute façon, et, enfin — puisque je ne suis plus là —, il laisse un message : il est « reprogrammé » pour une opération le 5 janvier et rentrera à l’hôpital la veille.
Ma mère, me dit-il alors, n’allait pas très bien.
J’ai rendez-vous avec T. Je lui montre le message le message d’Adrien, dont il se formalise moins que moi, tâchant de me détromper : les termes n’en sont pas nécessairement insincères…
Nous allons de banc en banc. Il me parle de mes anciens collègues, d’échanges qui ont eu lieu (dont j’ai pris, parfois rapidement, connaissance) entre eux. Nous tombons d’accord à propos de la personnalité de chacun.
Nous verrons Marthe et Paul mercredi.
Rentré, je songe que la routine le cède au reste, malgré des instants précieux. Je lis (très peu — j’ai dit à T. que je trouvais le défrichement de le Château et de son appareil critique — notes et variantes — fastidieux, imputant à la traduction, en outre, des défauts que je serais bien incapable de préciser), j’écris, je pianote. Je songe aussi que je passe trop de temps devant les écrans, même si séries télévisées et films s’entassent dans le disque dur de mon graveur, retard que je m’essaie en vain à combler.
17 novembre 2020
J’ai à nouveau très mal dormi, du fait de la cruralgie. En outre, j’ai fait des rêves stupides : je devais préparer à manger, mais n’avais que des éléments de vaisselle dépareillés. Par la suite, je retrouvais des verres et des assiettes dont j’avais oublié l’existence, mais qui ne plaisaient pas — et que, de ce fait, je ne comptais pas utiliser.
Je m’emploie à corriger un article fautif à la date du 20 février de mon journal napolitain.
Après une sieste qui fait long feu — je me lève après vingt minutes infructueuses —, je me livre à une promenade le plus possible « démasquée ». Je passe par des lieux inaccoutumés.
Ce jour ne dissemble pas des jours précédents : lecture, écriture, promenade, piano, tâches matérielles diverses sans grâce aucune.
J’envoie un message pour l’anniversaire de B. Pour le reste, je ne saurais (donc) décidément différencier la journée de l’antécédente, avec un temps d’écran similaire, en dépit de mes efforts pour fractionner le temps passé à cela.
— Il me reste du moins cet amer plaisir-là : vitupérer l’époque ! (cependant, je ne suis ni fourreur, ni commerçant…).
18 novembre
Tièdes, insipides, atones, bouillies, d’un jour l’autre, les journées (ter repetita) ne se distinguent guère entre elles.
Lecture, piano, écriture, sieste, s’ils paraissent séduisants, cèdent à la routine : il faut en rabattre sur l’enthousiasme que j’y mets. J’ai, en outre, considérablement augmenté le temps passé devant les écrans — et m’en sens aliéné, presque sali.
M. m’a appelé durant la sieste. Sur le répondeur, elle propose, comme il faut doux et beau, de nous rencontrer au Parc B***, tout proche de chez moi — où je n’ai pas, depuis bien longtemps, aventuré mes pas.
En attendant, j’honore la proposition que m’a faite T. Nous nous retrouvons dans un autre parc, le Parc S***, lui, Paul et Marthe et moi. Après échange de nouvelles — sans aucun relief —, quelques considérations prospectives — l’on parle tant et tant d’un « déconfinement » tout progressif, sans réouverture des bars et restaurants, qu’il ne faut guère prendre cela que pour effet d’annonce lénifiant… —, Paul a bientôt froid, et parle de rentrer. Le cœur fait défaut. Nous n’avons pas l’esprit aux plaisanteries. Et nous anticipons les jours froids à venir.
Le soleil joue pourtant sur les arbres, isolant en pleine lumière les jaunes mordorés, obombrant les sapins et autres pins, noirs d’être si verts durant l’année.
Marthe et Paul s’en vont donc. Nous faisons encore un tour de parc, T. et moi. Il propose un rendez-vous pour vendredi ou samedi.
J’appelle M. au retour. Peut-être passera-t-elle le lendemain après une consultation chez le médecin.
Mon père m’appelle également, pour me prévenir qu’un cas de coronavirus a été détecté parmi le personnel soignant de sorte que nous ne pourrons, le lendemain, visite à ma mère. En fait, rendez-vous était pris pour le samedi. Il m’effare — comme toutes les fois où cela se produit — d’une mémoire qui lui joue de sales tours.
Le soir, je suis couché tôt et j’achève — si l’on peut dire puisque le manuscrit en est inachevé… — le Château.