1350 - Si bien que… ? (18)
Si bien que… ?
(Journal extime)
Work in progress
18
13 juillet [suite]
Après-midi
J.-F., avec qui je prends un verre en cours d’après-midi, me confirme mon appréhension : un de ses amis, sujet à plus de quatre-vingts apnées du sommeil par heure, dort désormais sous respirateur. Il a appris à dormir à plat dos.
Je n’avais pas vu J.-F. depuis septembre ou octobre, je ne sais. Les sujets de conversation s’épuisent vite, même si nous parlons de villes italiennes et flamandes, d’art et de musée (mais, curieusement, jamais de littérature). L’aînée de ses filles va prochainement avoir dix-huit ans. Elle vient de s’inscrire en faculté de droit. Elle aimerait, entre autres projets, devenir commissaire-priseur (dans le domaine de la mode, précise-t-il [?]). Il me conte par le menu ses projets de vacances. Il ne développe guère le chapitre professionnel — ce qui me convient parfaitement.
Il paie mon verre en m’assurant que j’ai réglé l’addition la fois précédente. Nous nous quittons au bout d’une heure et quart, et je fais mes civilités à son épouse.
Je rentre la tête sous le casque — qui m’a été livré la veille. Je suis fort content — finalement — de mon achat : j’ai acheté l’appareil au quart du prix, et je m’habituerai, je crois, à avoir cette protubérance sur le crâne.
C’est cependant à l’amplificateur de la chaîne que je livre le Concerto pour violon de Berg, m’émerveillant de la puissance et du relief sonores. Amplificateur, lecteur de minidisc, enceintes contribuent à une qualité spatiale et musicale que jamais le casque ne pourrait égaler.
Soir
Restaurant indien avec T. La salle et la terrasse sont bondées. Le service s’en trouve ralenti. La soirée est agréable, même si je trouve plutôt tièdes les remarques de T. au regard de la situation.
Je m’étonne que M.-C. n’ait pas réagi d’ailleurs à ce propos.
14 juillet 2021
Matin
Précisément, M.-C. envoie une bordée de messages, dont tous ne me semblent pas uniment pertinents ni convaincants. Je signe malgré tout une pétition dont je trouve globalement juste l’argumentaire.
Après-midi
Précisément encore, je me mets en colère face à Marthe, Paul et T. que ne scandalise que peu une situation que, pour ma part, je n’arrive pas à admettre. Sans doute ai-je tort de m’emporter — T. paraît étonné de la virulence du ton que j’ai employé —, sans doute certains des arguments qui fusent malgré moi dépassent-ils les bornes de ma pensée véritable…
Je leur dis — et je le pense néanmoins encore — que leur aveuglement vient de ce qu’ils « sont du bon côté du manche » en tant qu’ayant reçu leur dose de vaccin, tant qu’une autre partie de la population se voient recevoir à travers de la figure, entière, la cognée.
Je les ai invités chez moi. Il pleut interminablement, et, les terrasses sont, de fait, interdites…
Marthe, ensuite, tente de détourner la conversation sur les exploits du chien, qui a volé et dévoré un rôti de porc — et qui, voulant dissimuler ses rapines sous les excréments des chattes, s’est ensuite avéré également coprophage…
L’effarement de Marthe d’avoir appris cela de l’animal me navre dans sa candeur : que ce substitut d’enfant soit au moins autant « pervers polymorphe » qu’aucune progéniture fantasmée, alors qu’elle-même est incapable de dresser aucun membre de la ménagerie qu’elle abrite chez elle, me paraît d’une naïveté désarmante…
Il pleut interminablement — et j’en suis ravi. Bien plus ravi, en tout cas, qu’une canicule, qui n’est pas encore survenue (sur ce point, au moins, je m’accorde avec T. !)…
Encore ceci : je ne veux pas avoir raison, mais veux mon mot à dire. (Dans ce concert d’avis épais, le mien y compris, ce n’est sans doute guère qu’une illusion douce, doucereuse…)
15 juillet 2021
La veille, me dit mon père, ma mère était toujours la proie d’une logorrhée dont émergeaient seuls quelques pauvres mots.
Elle dort, profondément, quand nous arrivons. Nous ne la réveillerons pas.
En tombant, la tête du bouddha en onyx que m’avait offert il y a fort longtemps R. se brise. Je la remets sur une de ses épaules assez ironiquement, avant de me résoudre à la jeter1.
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1Ce que je ne ferai d'ailleurs que quelques jours plus tard ¡