1433 - Et en attendant d’autres Espagnes… (10)
Et en attendant d’autres Espagnes…
(Paris - Madrid - Tolède - Madrid - Paris)
Journal extime
(10 mai - 22 mai 2022)
10
18 mai 2022
Nuit
La chaleur me malmène autant que les nuits précédentes : je me réveille après quatre heures de sommeil. Je finis néanmoins par me rendormir jusque sept heures.
Je légende les photographies prises la veille et l’avant-veille, prépare un courriel pour Judith afin de fixer un rendez-vous en vue de visiter l’exposition du Musée Picasso.
Il est 10 heures lorsque j’adresse un message en direction du cher José Alberto. Il ne doit pas être du matin : il se montre autrement moins loquace que la veille — à moins qu’il ne soit plus besoin de faire des amabilités ? Il me laisse reposer mes bagages sur le paquet de linge sale d’un placard.
Je me rends à la Real Academia de Bellas Artes de San Fermando, inégal selon les étages (il faut dire que je commence très logiquement par le premier étage, pénètre d'abord dans les salles 20 et 21, lesquels abritent les peintures de Goya, alors que le dernier niveau expose des artistes du dernier siècle).
Francisco de Goya y Lucientes (Fuendetodos (Saragossa), 1746 - Bordeaux (France), 1828), Self-portrait at the easel, c. 1785. Oil on canvas, 40 x 27 cm
Goya, Manuel Godoy, prince of the Peace, 1801, Oil on canvas, 1,80 x 2,67 m, Madrid, Museo de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernado
Je vérifie l’attrait des noms connus sur moi, ainsi que d'ailleurs le mimétisme photographique que je provoque sur d'autres visiteurs, qui prennent à ma suite des clichés de tableaux pour lesquels ils ne seraient peut-être pas attardés…
Giuseppe Arcimboldo, (Milan, 1527-1593), Allégorie du printemps, h. 1563. Huile sur panneau de bois, 0,66 x 0,50 m
Antonio Allegri Correggio (Emilia, 1489-1534), San Jerónimo (1515-1518), Óleo sobre tabla, 60 x 51 cm
Francisco de Zurbarán (Fuente de Cantos (Badajoz), 1598-Madrid, 1664), Agnus Dei, Óleo sobre lienzo, 0,47 x 0,55 [Inscripción : TANQVAM AGNVS/ IN OCCISIONE (Isaías, 53:7)]
Zurbarán,El Beato Alonso Rodríguez, Oil on canvas, 2,66 x 1,67 m, Signed and dated : FCO DE ZURVARAN. FA 1630.
Anthonis Van Dyck (Ambres, 1599- Londres, 1641), La Vierge et l'Enfant avec des pécheurs repentis, Huile sur toile, 127 x 137 cm
Pierre Paul Rubens (Siegen, Westphalie, 1577 - Ambres, 1640) Saint Augustin entre le Christ et la Vierge, Huile sur toile, 2,37 x 1,79 m
Andrea Vaccaro (Naples, 1604 - 1670), St Peter and St Agatha in prison, c. 1650, Oil on canvas, 153 x 125 cm
Guido Reni (Bologna, 1575 - 1642), Christ embracing the Cross, 1610-1620, Oil on canvas, 229 x 142 cm
Bartolomé Esteban Murillo (Seville, 1618-1682), St Mary Magdalene (c.1650), Oil on canvas, 1,61 x 1,09 m
Antonio de Pereda (Valladolid, 1611-Madrid, 1678), The dream of a knight, c.1650, Oil on canvas, 1,52 x 2,17 m
Certaines œuvres me font sourire
JOSÉ LÓPEZ ENGUÍDANOS Y PERLÉS (Valencia, 1760-Madrid, 1812), Skeleton family, Oil on canvas, 1,01 x 0,70 m. Signed (illegible): "p. E. ... onck pinxit".
— et je complète, au premier étage, ma chasse aux Ribera.
Au dernier étage se trouvent les peintures des deux derniers siècles, par lesquelles j’achève ma visite, plus rapide ne serait-ce que parce que mon estomac me presse à présent de me restaurer.
Fernando Labrada (Periana (Málaga), 1888 - Madrid, 1977, Sonata 14 (II), Óleo sobre lienzo, 168 x 200 cm
HERNÁN CORTÉS MORENO (Cádiz, 1953), Figura sentada (Carmen Bustamante), 1985, Óleo sobre lienzo, 146 x 89 cm
Juan Gris (José Victoriano González) Madrid, 1887 - Boulogne-sur-Seine (Francia), 1927, Bodegón con frutero y periódico, Óleo sobre lienzo, 0,60 x 0,73 m
FERNANDO ZÓBEL DE AYALA, (Manila, 1924-Rome, 19)84), A Dialogue with Thomas Eakins, Oil on canvas, 1,00 x 0,80 m. Signed : Zóbel (1983)
Après-midi
Je déjeune au sous-sol d’une grande surface connue pour son enseigne. Si la tartine — plutôt que “sandwich” — au saumon fumé, miel et fromage frais que je commande au serveur de sa cafeteria peut sembler chiche dans son format, le cheese-cake ensuite me contente davantage.
Je me mets en route pour le Museo Lázoro Galdiano — et par deux fois me trompe, d’abord de direction, puis de station, tant et si bien que je ne dispose plus guère que d’une heure pour en arpenter les lieux… et vais à l’essentiel (le mien du moins ¡) !
Les éclairages et l’accrochage pèchent parfois en raison de leur hauteur ou de leur sur— ou sous— exposition… Et des œuvres bouleversantes en côtoient d’autres de moindre intérêt.
Je suis d’abord accueilli — ou presque — par un saint Sébastien de l’école madrilène à peine sorti de l’enfance.
Quelques Greco, père et fils…
un Ribera supposé (qui me convainc néanmoins pour sa peinture d'un corps de vieillard)…
un tableau, longtemps attribué à Vinci (puis à Boltraffio) représentant un Sauveur bien juvénile lui aussi…
un Murillo…
lequel contraste, par sa palette rose candeur, incarnat, nacre et vermeil, avec ce sabbat de sorcières appartenant au cycle des peintures noires de Goya,
un peintre de l’école flamande réduit à ses initiales…
MONOGRAMISTA GB (Primera mitad del siglo XVI/ First half of 16th century), Anunciación/ Annunciation, Óleo sobre tabla/ Oil on panel
un Pierre Pourbus…
Pieter Pourbus (1523-1584), Retrato mortuorio de un monje/ Mortuary portrait of a monk, Óleo sobre tabla/ Oil on panel
un tableau issu de l’atelier de Jérôme Bosch accompagnent ma déambulation.
El Bosco Hieronimus Van Aeken (ca. 1450-1516), Taller. Workshop, La visión de Tondal/ The view of Tondal, Temple graso sobre tabla/ Tempera on Wood
Cependant, il me faut non seulement presser le mouvement mais économiser mes prises photographiques si je ne veux pas avoir la mauvaise surprise d’avoir déchargé le téléphone — et ne plus pouvoir envoyer mon ultime message au sensationnel José Alberto ¡
Fin d’après-midi
Les adieux avec mon logeur, au moment de récupérer mes bagages, seront rapides… Encore changé-je quelques affaires de place.
Je prends le métro, puis un bus jusque l’aéroport. La jeune fille qui voyage dans le bus est française. Comme je lui dis que nous devrons descendre à l’arrêt du Terminal 1 billet électronique à l’appui, elle me rétorque très gentiment que je lui ai produit le billet de l’aller, non du retour ¡
A l’arrêt de bus, je propose ma carte électronique encore chargée de deux voyages à un jeune homme, qui n’a pas l’air de trop y croire.
Monté sans encombre dans le bus, il m’adresse un signe de remerciement.
Je joue, en revanche, les fâcheux lors du franchissement du portillon à l’embarquement. En outre, je crois, dans mes allées et venues, avoir perdu mon téléphone. Or, au moment où l’on m’avait fait ôter l’ordinateur de la valise, je l’avais d’un geste machinal glissé dans mon sac de voyage…
Autre erreur : j’ai confondu les horaires. J’ai trois heures d’avance, en fait, qui seront rudes et longues à tuer.
Dans l’espace d’embarquement où je stationne donc, j’avise deux malheureuses prises — je n’en ai vu nulle part ailleurs — où recharger mon téléphone. Le sandwich que je mange, en attendant que le téléphone charge un peu, est fort mauvais.
Soir
Comme à l’aller, je voyage sans voisin de siège. Je termine le récit d’Abdellah Taïa. Je ne me suis guère donné le temps de lire durant ce voyage. Je me suis plutôt repu de peinture.
En consultant le site de la RATP, j’apprends que le port du masque n’était plus obligatoire dans les transports en commun. La décision me paraît prématurée — et, surtout, démagogique. Par esprit de contradiction, je mets en service un masque FPP2 ¡ Je le garderai jusqu’à l’arrivée dans l’appartement de F. et Pascal — dans lequel grande est ma hâte d’enfin me retrouver.