1675 - Voyage dans les Ardennes (2)

Publié le par 1rΩm1

 

 

Voyage dans les Ardennes

 

work in progress

 

(24-29 juillet 2024)

 

2

 

25 juillet 2024

La journée se passe vraiment agréablement en compagnie de Khadija.

Quelle différence, ne puis-je m’empêcher de penser avec les tensions vécues avec M.-C. l’année dernière lors de mon séjour en Normandie ! — moment que, je ne sais plus pourquoi, je retrace d’ailleurs. (Je n’oublie pas, ce songeant, que, quelques jours auparavant, m’ayant demandé si je croyais opportun de proposer à Claudie de se joindre à nous, j’avais refusé un peu abruptement, puisque la perspective de notre tête-à-tête en aurait été annihilée. Et je m’étais reproché, bien sûr, cette réaction tout immédiate.)

 

Khadija nous conduit d’abord jusque Bouillon dans sa caisse à savon rubiconde, dont la suspension n’est guère confortable. Et je me dis aussi (autre reproche vif que je m’adresse, me détestant de penser cela) que Khadija ne conduit pas très bien (elle me dira plus tard avoir passé son permis à trente ans, cet apprentissage tardif de la conduite étant toujours dommageable — et de songer à A. in petto, qui avait réussi, en s’y reprenant plusieurs fois, à décrocher le fameux papier rose [alors !] — ainsi qu’à Claudie — qui n’est jamais parvenue à obtenir le précieux sésame. Khadija ajoutera d’ailleurs avoir peur en tant que passagère avec tel ou tel de ses frères, tel ou tel ou tel ami, dont moi naturellement !)

J’y étais allé jadis, enfant, à Bouillon. Hormis le site (la rivière en contrebas, ses pédalos, les quais de la ville, le château fort ainsi qu’une cerise sur un gâteau), je ne me rappelais rien. Hormis une de ces longues journées d’ennui où l’on est remorqué par ses parents, le temps semblant s’étirer comme une punition infinie.

Un panneau indique la direction de l’office du tourisme. Entre les hommes et les femmes, la différence est telle que les femmes se renseignent auprès des passants, tandis que les hommes répugnent à le faire. C’est du moins la théorie de Khadija, qui s’empresse de demander à une sexagénaire qui débarque des courses du coffre de sa voiture si nous sommes loin de l’endroit. Je m’amuse. Plus tard, la voyant partir dans un mauvais sens, je répliquerai que les femmes n’ont pas le sens d’orientation (¡).

Nous apprenons alors que seule existe la visite forfaitaire des hauts lieux de la ville de Godrefoy de B., laquelle s’élève à 16 euros, ce qui nous paraît excessif, à tort ou raison, pour une rivière qui baigne un petit chatiau posé sur un caillou.

Nous nous lançons néanmoins à l’assaut de l’endroit. Je repère en chemin un café où l’on sert des Lupulus brunes, et, après s’être soulagé la vessie dans des toilettes publiques, nous entreprenons de visiter l’église (gratuite) que nous apercevons en hauteur.

Nous entrons dans une boutique où l’on vend toutes sortes de bières et Khadija engage la conversation avec la gérante. Celle-ci se plaint du peu de touristes depuis le Covid, de la météorologie qui sévit pluvieusement en ce mois de juillet. De fait, durant la dizaine de minutes que nous y demeurons, personne d’autre n’entrera dans la boutique.

Nous pénétrons ensuite dans l’église, plutôt quelconque, puis longeons les quais. Comme pour mieux démentir les propos antérieurs de la boutiquière, le soleil nous estourbit la tête d’inhabituels rayons…

Nous revenons à la voiture et décidons de visiter le supermarché que nous avons aperçu en parcourant les rues à pied, sans finalement trouver ni la bière ni le sandwich qui nous tiendraient lieu de déjeuner.

Nous prenons ensuite une bière à la terrasse du café que j’ai repéré, la rivière miroitant à nos yeux, puis commandons un sandwich dans une boulangerie-salon de thé toute proche. À la faveur d’une méprise d’une serveuse, après un temps d’attente, on nous apporte notre commande sur un plateau, de sorte que nous en profitons pour nous installer à nouveau en terrasse.

Notre déjeuner expédié, après hésité au seuil du château et regardé quelques cartes postales, nous décidons de quitter la ville. La route que nous suivons longeant la vallée de la Semois s’avère pittoresque et jolie. Nous nous arrêtons devant la boutique de l’Abbaye Notre-Dame de Clairefontaine en demandant si la possibilité existe de la visiter à deux femmes entre deux âges, qui s’apprêtent à sonner pour se rendre à un stage d’icônes, nous disent-elles.

Nous remisons dans le coffre de la voiture les quatre bouteilles d’Orval achetées à la boutique et sonnons à notre tour. Accueillis aimablement, nous parcourons un étage qu’on nous désigne, d’une construction moderne et tout de même un peu décevante.

Reprenant la route en sens inverse, nous sommes bientôt à Florenville, et je propose à Khadija de faire le plein de carburant en vue des jours à venir, avec pour arrière-pensée de pouvoir partager plus tard les frais d’essence.

Dans un supermarché tout proche, j’achète de la Lupulus organicus, que, pour l’avoir goûtée à diverses reprises, je trouve meilleure que sa variante brune bue le matin (et m’interroge : est-ce moi qui, désormais, aime moins les bières brunes ?).

L’idée de bière récidivant décidément à nos esprits, d’ailleurs assoiffés en ce milieu d’après-midi, nous nous rendons ensuite à l’Abbaye d’Orval — en ignorant toutefois si nous pourrons la visiter. J’ai souvenir pourtant d’y être allé au moins deux fois — une fois avec J.-M. et Pascal, une autre en compagnie de Khadija elle-même et de R. — sans avoir pour autant la certitude d’avoir pénétré dans son enceinte plus loin que la boutique.

1675 - Voyage dans les Ardennes (2)
1675 - Voyage dans les Ardennes (2)

Nous apprenons bientôt une visite guidée commence, en fait, à 17 heures et, franchissant le tourniquet de la caisse après la boutique, nous nous attardons dans une première salle qui propose des informations interactives en plusieurs langues sur l’histoire de l’abbaye, plusieurs fois détruite au cours de l’histoire et reconstruite au cours de la première moitié du XXe siècle.

1675 - Voyage dans les Ardennes (2)

Bientôt menés par un guide jusque la fontaine où Mathilde de Toscane avait perdu son anneau nuptial, je recouvre la mémoire non seulement de la légende (une truite, apparue à la surface de l’eau, aurait tendu dans sa gueule à la comtesse l’anneau tombé par mégarde) mais encore de la fontaine même, dans laquelle les visiteurs ont coutume de jeter des pièces, espérant que quelque miracle nouveau survienne au creux de ce « val d’or » où Mathilde fit édifier un monastère, dont l’épithète en verlan impose avant tout, autant que le dessin de la truite tenant un anneau sur la bouteille, l’amertume singulière de la bière tutoyée au masculin par les habitants de la Gaume en raison du genre du substantif val, plutôt que (quoi qu’on en ait) le nom de l’abbaye elle-même, féminine et protectrice pour ses moines…

Dans les ruines de la première abbaye, malgré l’absence d’un « quatrième mur » — ou plutôt en raison de cela (non pour jouer les intéressantes, mais pour faire bénéficier de la chaleur de l’été à leur progéniture) —, des chauves-souris agrippées en grappes au plafond d’une des salles, attraction spectaculaire et rare, ont installé une pouponnière. Elles dorment ainsi, en attendant l’heure de la chasse aux insectes.

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Nous parcourons ensuite le musée, ragaillardis par la fraîcheur de l’endroit.

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J’achète un verre à bière bien moins cher qu’ailleurs à la boutique auprès d’un jeune homme accort.

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Nous buvons un verre d’Orval verte à la brasserie voisine, seul lieu où l’on sert à la pression cette bière à faible teneur en alcool (4°) élaborée sur place par les moines trappistes, amère et très houblonnée, laquelle nous surprend agréablement pour son caractère inhabituel. Et, plutôt que du fromage du cru, je commande une coupelle de saucisson à la bière (indigène), qui me rappelle, dès la première bouchée celui dont la gérante du café de T***** agrémentait mes verres de Grimbergen (brune) durant l'année terrible que j'ai passée à L*** — et dont je me consolais par ce breuvage caramélisé. J'expose ce souvenir à Khadija, la réminiscence donnant à cette charcuterie coupée en quartiers des épices extraordinaires…

*  *  *

Quand nous rentrons, nous trouvons le chat malade, qui a vomi sur le carrelage du couloir. Comme Khadija a l’air inquiet, je propose que nous remettions au surlendemain notre excursion à Charleville-Mézières et que Khadija, au cas où persisterait son état, prenne rendez-vous chez le vétérinaire.

 

 

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