1740 - Si au moins… ça pouvait ressembler… à l'Italie (29)
Si au moins…
ça pouvait ressembler…
à l’Italie !
(récidive)
29
11 octobre 2024
Matin, Musée d’Orsay [suite]
Nos pas nous portent ensuite jusqu'à l’exposition consacrée à une artiste-peintre norvégienne, Harriet Backer, dont nous ignorions tout jusqu’alors (c’est, de fait, la première rétrospective qui lui est consacrée en France).
Kitty Kielland (1843-1914), Harriet Backer dans son atelier, Paris, 1883, Huile sur toile, Lillehammer, Lillehammer Kunstmuseum
Parmi d’autres tableaux d’autres consœurs et des paysages, nous séduisent en particulier les scènes intimes et colorées.
Harriet Backer, Le Grand Frère jouant au piano, 1890, Huile sur toile Göteborg, Gothenburg Museum of Art
Harriet Backer, Femme cousant à la lueur de la lampe, 1890, Huile sur toile collée sur panneau de bois, Oslo, National Museum
Harriet Backer, Intérieur du pensionnat de Nordgård, 1926-1930, Huile sur toile, Collection particulière
Harriet Backer, L'Autel de la stavkirke d'Uvdal, 1909, Huile sur toile Bergen, KODE Bergen Art Museum
Nous nous installons dans le café du musée. Je confie à un serveur mon téléphone et son chargeur, l’appareil s’avérant déjà plus qu’à moitié déchargé.
Judith me confie que Norbert se montre très agressive envers elle. Elle allègue que la souffrance le rend d’autant plus cruel qu’il n’a guère fait l’expérience de la douleur auparavant, proposition qui me paraît tout à fait crédible (me revient à ce sujet que Norbert avait paru ébranlé, lorsque, je ne sais à quelle occasion, j’avais rapporté les propos de J.-M. sur son lit d’hôpital comme quoi il estimait avoir eu, sa génération ayant été singulièrement épargnée par des moments tragiques, voire difficiles, « une belle vie » — propos qui m’avaient, de fait, moi aussi, impressionné quand je les lui avais entendus tenir).
Et, comme Norbert n’est pas en état, elle annule le déjeuner au restaurant prévu le lendemain.
Après-midi
C’est à très larges enjambées que je parcours l’exposition du Musée des arts décoratifs sur les grands magasins. Le gardien vu la veille à qui je demande où je demande où elle se trouve me reconnaît et me renseigne avec chaleur.
Je ne suis que très médiocrement concerné par ce que j’y vois, qui s’en tient à la surface des images produites, centrées sur des affiches et les modes vestimentaires du temps — quand ce qu’on y apprend au plan socio-historique relève du déjà su. En outre, beaucoup de monde, à nouveau, piétine sur une surface réduite, asphyxiant toute prise d’intérêt.
Ce qui attire mon attention demeure marginal, presque extérieur à ce qui draine les regards : des meubles art déco,
Étienne Kohlmann (1903-1988), Buffet, Vers 1924, Marbre Campan, palissandre verni et marqueterie ivoire et ébène
Maurice Dufrène (1876-1955), Commode, Vers 1925, Amarante, acajou, tulipier de Virginie, palissandre, bois de violette, ébène noire, okoumé, panneau de bois latté (dont moulé), laiton argenté et glace, Paris, musée des Arts décoratifs
un cheval-tricycle qui me paraît avoir tout le merveilleux d’un « tambour-trompette » leirisien — et me ramène au cheval à bascule en carton-pâte de mon enfance, sur lequel je n'étais qu'exceptionnellement autorisé à grimper…
Vingt minutes plus tard, dont je précipite l’issue, je suis ressorti.
* * *
Je me rends ensuite aux Halles dans l’idée de voir Vivre, mourir, renaître, le nouveau film de Gaël Morel. Comme j’en ai le temps, je visite l’Église Saint-Eustache, désormais rouverte et que je n’ai jamais vue auparavant.
Je découvre ce tableau de jeunesse de Rubens, les Pèlerins d’Emmaüs, encore sous influence caravagesque et récemment rénové
Pierre-Paul Rubens, Les Pélerins d'Emmaüs, Paris, Eglise Saint-Eustache, chapelle Saint-Pierre-L’Exorciste
— ainsi que cette œuvre d’un peintre maniériste florentin, Santi di Tito, représentant Tobie et l’Ange.
Alors que je bois ensuite un verre en attendant l’heure du cinéma, je reçois un message d’Aurélien. Il s’apprête à quitter Paris. En pleins préparatifs de déménagement, il ne pourra me rencontrer dans les prochains jours. « Nous jouons de malchance », écrit-il. Il me demande mon adresse postale (que, normalement, il devrait avoir) afin de pouvoir m’adresser son prochain ouvrage à sa parution — ce qui me rappelle, non sans dépit, qu’il devait le faire pour son dernier roman, et qui n’avait pas été suivi d’effets. Je suis naturellement déçu de l’impossibilité de nous voir. Et, comme malgré moi, je m’interroge sur le degré de sincérité à mon égard.
Apparemment, le chargeur du téléphone, que je branche après avoir constaté un défaut de batterie malgré la recharge le matin même, a rendu l’âme. J’essaie une autre prise, que me désigne très aimablement le serveur, sans plus de résultat.
* * *
Le film de Gaël Morel et la prestation des acteurs — celle de l’actrice, en particulier — me séduisent assez. La forme en est plus sage et lisse, plus “classique” (avec les défauts des qualités que j’entends en recourant à cette épithète) que les précédents films que j’aie pu voir du cinéaste…
Soir
C’est avéré, la batterie de mon téléphone n’en peut mais.
J’erre longtemps avant de trouver un magasin de réparation.
Après vérification, le téléphone n’est pas endommagé. Je me fais donc vendre un chargeur et un câble, pour m’apercevoir ensuite que le câble seul était endommagé…
Il est tard quand je rentre dîner. Je me sens fatigué.
Nuit
Et je dors mal. Mon sommeil s’interrompt sans raison que je sache au creux de la nuit…