1755 - Par, Paris, par ici ! (7)
Journal extime
(Paris, 26 novembre - 2 décembre 2024)
7
Il court, il court, le furet
Le furet du bois, mesdames,
Il court, il court…
(chanson enfantine)
30 novembre 2024
Matin
Cette fois, je ne fais rien. Tout au plus dactylographié-je des linéaments écrits déjà, que je nourris à peine.
Duncan n’a pas répondu à mon message de la veille. Je doute qu’il le fasse, à l’instar du précédent séjour…
Après-midi
Je suis sur le parvis de Beaubourg et j’attends Judith. Elle prévient que le parking des V-Lib est plein et qu’il lui faut patienter avant qu’elle accroche sa monture.
Les nommés de l’exposition pour le Prix Marcel Duchamp 2024 sont quatre, et nous avons fait rapidement le tour de l’espace qui leur est dédié. Je me montre assez sensible à l’œuvre d’Abdelkader Benchamma. (Le rendez-vous photographique n’en est néanmoins pas excellent : est-ce l’éclairage ? Les dimensions mêmes — j’ai photographié les quatre murs de l’installation — se prêtent sans doute assez mal à l’exercice.)
Abdelkader Benchamma, Engramme - Marabout, 2019, Encre, fusain, graphite et collage sur papier marouflé sur toile
Judith, ensuite, ne veut pas décidément pas profiter de l’occasion pour visiter la rétrospective consacrée au surréalisme.
J’achète une carte à la librairie du Centre que je destine à JF, en réponse à la sienne envoyée durant l’été (celle postée à Mestre ne lui étant vraisemblablement pas parvenue).
Nous prenons un verre au Cavalier bleu. Judith, qui n’a pas déjeuné, commande un chocolat chaud et une tarte tatin. La conversation est sans cesse interrompue par l’agent immobilier en charge de la vente d’un appartement lui appartenant.
Et puis. Je me suis trompé de cinéma. Je ne verrai jamais (sinon à la télévision peut-être) le documentaire sur la grande famine de 1933 en Ukraine intitulé Moissons sanglantes, pour lequel j’ai décoché une invitation pour deux. Heureusement, je n’avais pas entraîné B. à assister à la projection du film (Judith n’ayant pas voulu, jugeant « trop triste » le sujet du film, et Norbert ayant déclaré qu’il ressortissait à une propagande occidentale, la responsabilité de Staline n’étant pas historiquement attestée).
J’entame un tour des librairies pour dénicher quelques livres d’occasion. J’achète le dernier opus d’Abdellah Taïa, le Bastion des larmes dans la première d’entre elles, qui vient d’obtenir le Prix décembre 2024 (à peine lu — peut-être pas lu, d’ailleurs… — et déjà recyclé : je trouve incroyable et triste cette occasion — si j’ose dire — d’échoir entre mes mains…)
Soir
Après avoir parcouru deux ou trois cents mètres en sortant du métro, débouchant d’une rue adjacente, je me retrouve en plein Champs-Elysées, que je traverse sans plus de regards, feignant l’indifférence pour la prétendue plus belle avenue du monde, afin de me rendre dans un petit cinéma, lui aussi dans une rue adjacente, et voir le Royaume de Julien Colonna.
Il s’agit d’un bon film ; mais il ne me conquiert pas tout à fait. Les activistes corses m’ennuient. Leur machisme et leur sentiment de l’honneur, leur propension à la vendetta et leurs sempiternelles cavales ont fini, de film en film, par avoir raison de mon intérêt et me lasser.
Au retour, je remonte l’avenue jusqu’à l’Arc de triomphe, un peu plus réceptif à cette rivière de lumières.