1609 - Lettre à J.-M., 26 février-6 mars 1989 (2)

Publié le par 1rΩm1

 

 

in  memoriam  J.-M.

 

Mercredi 1er mars [1989], 19 h 30

    Oui, les parents sont les mêmes animaux que leurs enfants. Les premiers expliquent les derniers. Trois agressions sur le tard lors de cette réunion parents/profs ont suffi à me convaincre que, dans ce panier de crabes, personne ne serait sauvé. Tenez, dans les Travaux et les jours, Hésiode, parlant de la « race de fer » — celle des pauvres humains, à laquelle nous appartenons —, prédit qu’un jour les enfants y naîtront avec les cheveux blancs. C’est là, bien sûr, une métaphore, et c’est désormais arrivé ! Des embryons, flapis et ridés, se décrochent des matrices de leurs mères — et ces enfants exhalent un ennui de vivre qui pue désespérément.
    La semaine dernière, je suis allé assister à la Fac’ de Lettres à une conférence de René Dumont.

1609 - Lettre à J.-M., 26 février-6 mars 1989 (2)

Selon lui, deux dangers graves menacent notre belle planète : la surpopulation d’une part, la pollution des hydrocarbures d’autre part, laquelle entraîne un réchauffement dangereux des climats… qui nous conduirait à une famine planétaire d’ici vingt à trente ans. Hésiode avait donc raison. Extinction bientôt de la « race de fer ». Bon débarras.  Je lis beaucoup, je corrige beaucoup, je fais même du latin. Voulant aller au cinéma hier soir, j’ai fini par lire parce que le film que je voulais voir avait été retiré de l’affiche en raison des “mardis soirs du Gaumont” et que le produit de remplacement ne m’inspirait guère. J’ai même écouté, il y a peu, Nicomède de Corneille, texte en main, à la radio (c’était bien intéressant) !

 Photo : Altzinger. Laurent Terzieff dans 'Nicomède' (1964) de Pierre Corneille au XVIIIe Festival d'Avignon (1964).

Photo : Altzinger. Laurent Terzieff dans 'Nicomède' (1964) de Pierre Corneille au XVIIIe Festival d'Avignon (1964).

Vous savez tout : mon travail me dégoûte, mes relations ici me semblent superficielles, je m’échappe, travaille et rêve beaucoup.
    Ce soir, je brocarde au “Palais”, en l’attente du train de Paris, dont déferlera Judith. Si je m’écoutais, je ferais grève demain avec le reste de la fonction publique, quoique les syndicats n’aient pas appelé à la grève. La vie est lente, très lente, et les espérances, quoique « violentes », infimes. On a beau, Mirabeau… On a beau… [on] a bobo… 
(Je vous laisse ajouter quelques rimes, vous trouverez, mieux que moi, le souffle divin !)

 

 

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