1104 - Carnets d'un confiné (32)

Publié le par 1rΩm1

 

 

CARNETS d’un CONFINÉ

 

32

 

[Journal pas toujours extime]

 

(14 mars, […] 1er MAI 2020 … …)

 

14 avril

Matin

Les collègues ont vivement réagi au discours de la veille. Elvire s’est jetée dans l’écriture d’un texte.
J’en rectifie les espaces typographiques, les fautes d’accord — et m’en veux aussitôt d’en avoir donné le détail : je ne saurais écrire un texte pareil — tout ce que je sais faire est d’en guetter les scories !


Journal superposé

Je trouve compliqués parfois les méandres et détours, jeux de mots et autres private jokes de mon journal d’avril 2010. Ils découragent le commentaire, de fait, mais aussi la superposition… C’est dans la préparation, l’attente et l’ouverture à l’écriture que je me reconnais le mieux — toutefois. Je le vois cependant : je n’ai aucun talent pour écrire, sauf à organiser des « chaînes » et concaténations d’émotions ou d’expériences, sans imagination ni invention, mais reste soulevé, transporté, embarqué par autrui. Et je trouve plus de plaisir à retranscrire mes échanges avec B*** qu’à me lire ou prolonger ce que j’écrivais alors — tout en me demandant : qu’est-ce donc qui a pu interrompre notre correspondance ? est-ce seulement le fait de n’avoir pu rencontrer *** ? Auquel cas cela relèverait d’une vexation bien idiote. (Je n’ai pas souvenir de la raison qui a interrompu nos échanges. Peut-être B*** a-t-il tout simplement retiré son journal du site… Pour garder intacte la redécouverte, je m’interdis toutefois d’aller voir par-dessus l'éphéméride…)

Correspondance avec B*** [suite]

LUI - 18 janvier, 22:18

Bonsoir. Comment allez-vous ?
Juste quelques lignes pour vous signaler que j’ai répondu à votre commentaire sur un de mes articles : http://blog.osolitude.gayattitude.com/20100117003337/discretion/#c (et accessoirement ajouté quelques nouvelles entrées à mon journal) — et vous dire que je regrette que votre ‘Automne 2009, journal extime et parisien’ semble toucher à sa fin…
Amicalement,
OS

 

MOI - 19 janvier, 18:29

Cher ami*,

Je comptais vous récrire — et votre “relance” tombe à pic.

Concernant Blanchot, je songeais surtout à ce qu’il a pu écrire à ma connaissance sur le silence littéraire — et je n’ai pas d’amour particulier pour lui, pas plus que pour son goût, vertigineux parfois, des paradoxes et retournements (si ma mémoire est bonne) ; il reste néanmoins un grand passeur des œuvres littéraires, et, s’il a de l’aversion pour l’autobiographie, ce que j’ignorais, il est l’un des premiers à avoir écrit sur Leiris.
J’ai beaucoup aimé tes — voilà, désolé, c’est venu ainsi, j’ai cédé au tutoiement ! — deux derniers “posts”, ces entrées obliques pour composer ton autoportrait par petites touches, la précision du propos. J’ai également expérimenté le système de renvois astucieux que tu as mis au point — en me demandant comment tu avais fait. C’est peu à peu que j’apprends le langage HTML, en posant des questions à mes interlocuteurs, N*** ou T***. Si ce n’est pas trop long à expliquer, je suis preneur (même si je ne suis pas certain d’avoir assez de rigueur pour organiser pareils passages d’un texte à un autre)…

Des deux ou trois choses que je sais de toi… ce que j’ignore m’intrigue bien autrement ! Mais il faut composer à mesure, je crois, et pas seulement pour des raisons de « discrétion » — mot dont, décidément, j’aime toutes les acceptions.

Ainsi, je te demanderais, pour débuter, ton prénom, parce qu’il m’a toujours été difficile de faire autrement pour nommer — n’aimant guère les surnoms ni les pseudonymes.

Que sais-je de vous/ ou toi ? Que vous avez un goût sûr en matière de littérature, de musique et de peinture. Beaucoup plus que moi, je crains… Tu sous-entends aussi être un gros fumeur, mais pas suffisamment balourd pour incommoder autrui. Je me souviens n’avoir pas toujours eu cette délicatesse quand, fumeur impénitent, j’envahissais le territoire des autres. Depuis, revenu de mon tabagisme, je tâche de minimiser parfois mes agacements de subir des fumées latérales ! On est ébahi de découvrir qu’on a été un malotru…

En tout cas, — ce qui n’a évidemment pas de rapport — je suis sensible à tes compliments concernant mon journal. Tu as raison, il s’achève, il n’en finit pas de s’achever, il a même du mal à se clore… Peut-être aurais-je dû d’ailleurs cesser plus tôt : j’ai peur de mettre un peu trop les points sur les “i” dans les trois derniers fragments à venir. Cependant, ils ont été écrits — et, comme tels, me paraissent, si lourdement explicatifs qu’ils soient, devoir être publiés. Ils me précisent — spécialement mes points faibles.

Voilà. C’est le début d’une véritable correspondance, semble-t-il ?

Romain

 

LUI - 19 janvier, 20:37

Cher Romain,

Tout d’abord, pour vous éviter (ou plutôt, oui, passons au tutoiement : t’éviter) un embarras, je me prénomme Benoît. (Prénom que je n’« affiche » pas : il me plaît, mais pas ces importuns qui s’en saisissent pour vous entreprendre sur le pape — agnostique, mon avis sur la question : « le pape a raison d’avoir tort » (je ne sais plus de qui c’est ; Renaud Camus ou Mathieu Galey, peut-être).

Blanchot : ce qui me gêne, justement : son côté dogmatique. Trop bon lecteur pour ignorer ce qui se passe chez Leiris (un de mes auteurs favoris) —

1104 - Carnets d'un confiné (32)

mais passant outre au nom de son idée de la littérature (simplification excessive, sans doute, mais je crois me rappeler que pour lui la littérature commence avec le passage du « je » au « il » ; glaçant).

Pour insérer un lien :

1. copier l’adresse de la page à laquelle on veut renvoyer en la sélectionnant par un clic dans la barre d’adresse (elle est alors surlignée en bleu) puis en tapant Ctrl+C, puis la copier sur ton texte Word juste avant le passage sur lequel on veut faire porter le lien
Ex. : « http://blog.osolitude.gayattitude.com/20100112222145/paradigmes/ Manie classificatrice, conceptualisante »

2. Devant l’adresse, ajouter la balise « <a href= » sans espace entre le « = » et l’adresse, et la balise « target=_blank> » après l’adresse avec un espace entre l’adresse et « target »
Ex. : « <a href=http://blog.osolitude.gayattitude.com/20100112222145/paradigmes/ target=_blank>Manie classificatrice, conceptualisante »

3. Ajouter la balise « </a> » à la fin du passage sur lequel on veut faire porter le lien.
Ex. : « <a href=http://blog.osolitude.gayattitude.com/20100112222145/paradigmes/ target=_blank>Manie classificatrice, conceptualisante</a> »

C’est tout…

Quant à ce que nous ignorons l’un de l’autre : oui, plutôt laisser ce dévoilement se faire de lui-même au fil de la correspondance (ennui de ces correspondants qui déballent leur curriculum vitae dès le premier message).

Question des « goûts sûrs » : j’y reviendrai dans un prochain article, je pense. Nous aurons donc l’occasion d’en reparler. Tabagisme : assez grand fumeur (10/12 cigarettes par jour), capable de m’arrêter quelques jours d’affilée mais incapable de me retenir en cas de besoin. Mais en effet, j’ai toujours eu le souci des non-fumeurs (mère antitabagique pour qui tout fumeur était un voyou en puissance : pensant longtemps que son point de vue était répandu, j’en ai par esprit de contradiction toujours rajouté dans le rôle du tabagique respectueux). Mais sans doute ai-je ailleurs mes côtés malotrus.

Ton journal : oui, cette impression que quelque chose s’achève, mais qu’il reste encore des choses à préciser, à ajouter : sentiment auquel j’ai toujours été sensible. Je t’encourage en effet à publier ces derniers fragments, pour la même raison : règle d’airain du journal, ce qui a été écrit doit être publié (sinon, il faut écrire des essais autobiographiques, des mémoires – mais pas un journal).

Le début d’une véritable correspondance : rien ne me ferait plus plaisir.

Amicalement,

B.

 

LUI - 23 janvier, 21:54

Bonsoir, et merci pour ton récent commentaire sur mon journal ; je viens d’y répondre.
Mes explications techniques ont pu t’aider ?

 

14 avril [suite]

 

Je me trouve en résonance avec cet article de Daniel Schneidermann :

[…] [H]élas, le mensonge entraine le mensonge. Et ce virus du mensonge a contaminé l'annonce par le président de la réouverture "progressive", à partir du 11 mai, des crèches, des écoles, des collèges et des lycées. Pourquoi si tôt, alors que les porte-parole officieux du JDD avaient laissé entrevoir une rentrée en septembre ? Pour lutter contre la fracture numérique, assure Macron : " Trop d’enfants sont privés d’école sans avoir accès au numérique et ne peuvent être aidés de la même manière par les parents."
Bien entendu, c'est une blague. Le gouvernement souhaite ré-ouvrir les établissements scolaires, pour que les parents des enfants ainsi re-scolarisés puissent retourner au travail. Le  gouvernement sait que cette ré-ouverture précoce fera des contaminations, et des morts. Il sait que des enfants de quatre ans ne feront pas les "gestes-barrière". Mais l'économie réclame ses droits. Cela s'appelle, même si le terme maudit n'est pas prononcé, "l'immunité collective contrôlée", dont chacun pouvait pressentir qu'elle ferait partie de la panoplie de solutions
[…]
Macron refait avec la pénurie de tests le coup de la pénurie de masques : cela ne servirait à rien de tester tout de monde, glisse-t-il, comme le gouvernement nous expliquait en mars que le masque pour tous n'était pas une solution. Spirale du mensonge, spirale de la défiance.
Quel serait un discours de vérité ? Il serait tout simple. Il consisterait à dire ceci : "du fait de nos erreurs, et de celles de nos prédécesseurs, nous n'avons aujourd'hui le choix qu'entre des mauvaises solutions. Nous allons tenter de choisir la moins mauvaise, et de nous en sortir le moins mal possible. Françaises français, merci de votre attention". Simple, non ?
[…]
Je n'ai pas à dire aux profs, ou aux parents d'élèves, ce qu'ils doivent faire. Je sais simplement que je serais prof, ou parent d'enfants d'âge scolaire, j'hésiterais beaucoup avant de reprendre, ou de faire reprendre, le chemin de l'école. Au moins, j'exigerais que chaque élève, chaque adulte, soit testé avec un test incontestable (ce qui est peut-être possible dans un délai d'un mois, si l'on croit aux miracles).

Ressurgit aussi la question des masques (décidément !) :

 Faute de quoi, et si j'avais l'esprit moins rebelle, je me lancerais dans la fabrication de masques. Pour les miens, pour les autres. C'est peut-être le plus sage conseil donné par l'invité de notre émission de la semaine, le médecin Christian Lehmann. Puisque preuve est faite qu'on ne peut pas compter sur eux, comptons sur nous.

(J’envoie l’article à Claudie.)


Après-midi

Je rappelle Claudie lors de ma promenade (ce qui m’est inhabituel, mais ma sieste a duré plus d’une heure et je tâche de gagner du temps sur le reste des obligations… celles que je me suis créées !).

Rentré, j’appelle T. Est-ce un effet du confinement ? Il discute plus que d’ordinaire les points que j’aborde au cours de notre conversation. Sur le moment, je m’en agace un peu. Après avoir raccroché, je me dis que c’est peut-être la distance instaurée par nos situations particulières, la frustration — très grande en moi, tant me manque de le voir — d’une vraie conversation en tête-à-tête qui induit toutes sortes de malentendus.

Je réponds à un courriel de Christine, dont j’allais prendre précisément des nouvelles.


Soir

Les voisins du dessous semblent absents — puisque je ne les entends pas. Cependant, comment se fait-il que, derrière des volets presque totalement dépliés, une de leurs fenêtres soit ouverte ?

Je suis encore — je m’y exhorte, faute de pouvoir mieux — à corriger les textes des collègues…

 

 

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