1127 - Carnets d'un confiné (46)

Publié le par 1rΩm1

 

 

CARNETS d’un CONFINÉ

 

46

 

[Journal pas toujours extime]

 

(14 mars, […] 1er MAI 2020 … …)

 

 

28 avril

Matin

Réveillé vers cinq heures et quart. Pluie.

Travail. Ménage.

Temps gris.

 

Je réponds à Aymeric.

 

Après-midi

Je m’enfonce dans une sieste qui ressemble à celle de la veille.


Promenade. Je rencontre ma voisine, avec qui je devise (des actualités). Simone passe, qui m’invite à passer la voir dans son studio de danse. J’aurais bien aimé le faire sur-le-champ, mais je ne fais qu’entamer ma promenade. Je la rappellerai pour organiser cela une autre fois.

(Je photographie cette caricature placardée par un poteau.)

1127 - Carnets d'un confiné (46)

Le téléphone de T. est occupé — interminablement.

Marthe a revu l’ostéopathe, qui l’a manipulée et lui a trouvé un masseur kinésithérapeute. Elle commence sa première séance demain. FG est passé chez elle et doit lui adresser un devis.


 

 

Correspondance avec Benoît

 

MOI - 27/02 ; 10:36

Bonsoir Benoît,

Je viens de lire ton post sur tes « lectures du soir » — et, peu inspiré, réponds point par point à ton dernier message.

Les   « émoticônes »   font   un   plus   joli   mot-valise   à   tout   prendre   que les  « smileys », qui ne font rien du tout ; mais j’imagine que ce dernier terme est plus courant, en fait, que le premier — découvert sur MSN il y a peu. Mais, comme tu le suggères, la pandémie de ces signes de connivence un peu appuyés finit par lasser…

Je ne m’étonne guère que tu ne parviennes pas « à “visualiser” les corps que [je] peux aimer, les configurations anatomiques qui fixent [m]on désir. » Je n’en sais peut-être pas grand-chose moi-même, n’ayant pas ton talent pour décrire avec précision, par exemple, des sensations liées à des grains de peau. Je me souviens d’un amant qui avait le cheveu particulièrement dru [Frédérick] et me rappelle combien j’aimais caresser ces blés blonds-là (un des rares amants blonds — et encore, pas tout à fait blond — que j’ai eus) ; mais il m’est arrivé d’avoir d’autres sensations, elles aussi très agréables, avec des cheveux spécialement fins. Ce même amant n’était a priori pas du tout mon type — s’il existe… —, mais il m’est souvent arrivé de me laisser déborder dans mes goûts, précisément, et d’aimer d’autant plus fort toute forme de débordement/ déportement. Et ce sont souvent les particularités physiques pour moi dissonantes qui m’émeuvent le plus après coup. Mais je ne dois pas être très doué pour mettre en mots mes désirs… Je dirais aussi que ce que tu écris des torses, peaux et cuisses, en dépit de la précision quasi clinique du propos, ne m’aide pas non plus, de mon côté, à « visualiser » pour autant les corps que tu aimes…

Je n’ai pas vraiment de problème avec Proust. A dire vrai, je provoquais un peu. Le consensus est fort sur Proust autour de moi… et cela peut m’agacer parfois. Je n’ai pas beaucoup d’affinité avec le narrateur de la Recherche — ni avec Swann, ni d'ailleurs aucun personnage —, mais je ne lis pas de toute façon pour m’identifier [ceci écrit avant de lire ton “post” !]… Parfois, cependant, les développements sur la jalousie — chez lui comme chez Léautaud — me paraissent bien longs, peut-être parce qu’ils me restent passablement étrangers… (Et [ajout, après t’avoir lu], la phrase « flexueuse » de Proust oblige à plus d’effort pour maintenir le fil — de mon attention en tout cas — que les phrases toujours impeccablement grammaticales et ponctuées de Leiris…) Mais, naturellement, certaines pages sur le rapport au temps ou l’écriture, sur les leurres en amour sont magnifiques… Cependant, de mon côté, j’aime le roman en général, et lui trouve parfois des vertus plus fortes que les autres genres pour mettre en coupe la complexité du déroulé de nos existences — et mettre en forme les grandes questions humaines (si, parfois, certains poèmes condensent cela très bien...).

Sur la musique, j’ai donc suivi un itinéraire qui ressemble au tien (mes premières amours étant aussi, somme toute, bien « romantiques », parfois même d’un romantisme échevelé), mais en ne m’étant pas aventuré si loin dans la production contemporaine — ce que d’ailleurs je regrette…

Deux mots encore sur le lyrisme. Tu es, certes, désormais au-dessus de tout soupçon à son propos… Mais, là aussi, de mon côté, je crois qu’il peut exister malgré tout un lyrisme de bon aloi, un lyrisme tempéré pourvu qu’une distance s’instaure un tant soit peu pour évoquer un sentiment et tâcher de le circonscrire…

Voilà. Pas très inspiré, disais-je. Peut-être intimidé (à nouveau, non pas par toi, mais par le contenu de ce que tu écrivais ici ou là) pour te répondre ?

Ai prévu, ce soir, d’aller au cinéma (sur la carte valable un an dans les deux cinémas d’art et d’essai de **** achetée en avril dernier, j’ai constaté qu’il me reste six places à épuiser en six semaines : c’est dire — a contrario — le peu de films que j’ai vus ces dix derniers mois !).

 

Je serai donc ce week-end à Reims, pour fêter les cinquante de cette amie, [V***], connue par l’intermédiaire d’amis et selon les meilleures « chaînes », que j’ai beaucoup vue les deux ans où j’ai vécu là-bas. Je n’aime guère ces grandes conjonctions de gens venus pour faire la fête, boire et danser, mais je n’ai pas voulu me dérober – d’autant que ce sera tout de même l’occasion de revoir des personnes que j’ai pas rencontrées depuis fort longtemps. J’aurais préféré aussi que cela eût lieu le week-end dernier plutôt que celui-ci, mais bon... Tout cela sent un peu sa fin de vacances dans tous les cas !

En fouillant dans le grand carton qui contient toutes sortes d’écrits anciens, j’ai d’ailleurs retrouvé comme un fait exprès une lettre pour [V***] restée inachevée datée de décembre 1990, qui reprend et éclaire quelque peu certains des textes dactylographiés il y a peu — dont le lyrisme (précisément !) quelquefois m’embarrasse et que j’ai fait glisser dans un lieu plus souterrain de mon “blog” : je ne me souvenais pas que nous étions si intimes, que je lui parle plutôt rondement de mes amants du moment… Amusant, mais cela a fait à nouveau naître un sentiment d’étrangeté vis-à-vis de moi-même. Je crois quand même que je lui apporterai cette lettre jamais envoyée…

Sais-tu que je suis toujours dans l’impatience de lire ce pavé que tu me parais si redoutablement peaufiner ? J’ai d’ailleurs l’impression que chacun de tes messages qui s’intercale décale d’autant plus son échéance — et me tairais volontiers si cela pouvait en raccourcir le délai !

Meilleures pensées,

Romain

 

MOI - 09/03/10 ; 22:17

Bonsoir Benoît,

Je ne sais pas si tu as remarqué, mais je suis patient — et je me tais (ou presque !).

Je lis, certes, en attendant, tes “posts” — le dernier m’ayant paru contenir comme un écho indirect à notre dernière “conversation”, et entretenant de toute façon une résonance forte avec ce qu’écrivait Barthes de l’adjectif…

Cependant, malgré ces diversions, ton commerce électronique me manque !

Meilleures pensées,

Romain

 

LUI - 09/03/10 ; 22:18

Romain,

Excuse s’il te plaît ce long silence : les calamités informatiques (« implosion » de ma clé USB, changement de version de Word qui double mes temps de frappe à l’ordinateur) se joignent aux calamités professionnelles (brusque accès de réunionite, et un rapport d’une centaine de pages à rédiger « pour hier matin dernier délai ») me tiennent éloigné de mes correspondants ; pour peu de temps, je l’espère.

A bientôt (en principe, les choses devraient se calmer en fin de semaine, si j’ai pu finir ce rapport dont l’inutilité est pourtant patente – j’imagine que sa commande inopinée doit s’expliquer par la rupture d’un pied de bureau au service de la coopération interuniversitaire du quai d’Orsay).

Amitiés.

B.

 

LUI - 09/03/10 ; 22:21

Nos messages viennent de se croiser ; décidément…

Plus même le temps, hélas, de réécrire des choses notées dans mes carnets ; quant aux brouillons perdus dans le collapsus de mon USB… (Grande leçon informatique : rien n’est jamais sauvegardé, toujours multiplier les copies électroniques.)

 


 


 

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