1198 - Journal de mon sommeil (1)

Publié le par 1rΩm1

 

 

Journal de mon sommeil

 

(Journal extime, 19-21 juin 2021)

 

Work in progress

 

1

 

Samedi 19 juin 2021

Matin

Effet de boucle : je “poste” le billet concernant le retour à mon domicile le 5 juin 2020 et complète les linéaments déjà existants de cette journée et de celles qui auront suivi alors même que je vais retourner et séjourner à l’hôpital quarante-huit heures pour l’examen de mon sommeil et des éventuels troubles qui l’affectent — examen prévu de longue date, mais différé à plusieurs reprises (quatre ou cinq) en raison de la crise sanitaire.

 

Après-midi

Mon père m’emmène. Je dois patienter presque une heure que la chambre soit prête. Dans l’intervalle, une infirmière (ou une aide-soignante ?) me soumet un questionnaire. Elle m’apprend que les boutons que j’ai sur les bras ne sont pas dus à des insectes mais à des chenilles processionnaires, dont les poils colportés dans l’air à partir de certains arbres sont très urticants — et, de fait, je me gratte d’un geste difficilement répressible depuis presque une semaine…

1198 - Journal de mon sommeil (1)

Comme je pense avoir oublié ma brosse à dents électrique (en fait, je m’apercevrai plus tard que, si j’ai bel et bien oublié quelque chose, c’est d’un savon liquide que j’avais soigneusement transvasé et préparé dans un petit flacon — et qui m’aurait peut-être soulagé des rougeurs dont ma peau (toujours elle !) n’allait tarder à se couvrir…), je vais jusque la boutique de l’hôpital, que je découvre fermée le week-end. C’est pourquoi je m’aventure hors de l’enceinte de l’hôpital, en quête d’une pharmacie. Doutant également d’avoir emporté du dentifrice, j’en achète un tube. Je vis le moment comme une “échappée belle”, m’étonnant que personne ne m’ait rien demandé (on m’a déjà et préalablement mis au poignet le bracelet en plastique, strié d’un code-barres, indiquant mon identité tel le criminel qu’on ne veut laisser pas laisser échapper, et je songe à ma mère qui avait réussi à sortir de l’EPHAD où elle séjourne, qu’on avait retrouvée extravaguant dans la rue, road movie empêché qui m’avait en fait plus amusé qu’il ne m’avait inquiété, attestant au moins le caractère déterminé dont elle peut faire preuve, même diminuée…)

Revenu dans le service où je me trouve donc interné, je remplis des pages, des pages et des pages d’un questionnaire aussi interminable qu’ennuyeux. J’espère qu’il remplacera néanmoins l’« agenda du sommeil » qu’on m’avait demandé d’établir préalablement à mon hospitalisation — et que je n’ai eu garde de remplir, m’y étant déjà essayé aux diverses reprises déjà évoquées et étant capable, de toute façon, de produire la trame inexorable de mes nuits ! (Au moins cela a-t-il l’avantage d’occuper le temps…)

Quand la chambre est enfin prête, on m’intime de me changer afin d’être préparé à un stupéfiant harnachement de toutes sortes de fils, d’électrodes, de capteurs reliés à un boîtier, pendant que l’on me sangle au niveau du ventre et de la poitrine pour maintenir en place l’ensemble. Je crois me retrouver dans quelque dystopie de récit d’anticipation, tel Orange mécanique, tandis que la sorte de ceinture ventrale large qu’on m’a mise pour supporter ces ustensiles évoque quelque ceinture d’explosifs…

Pour compléter cette panoplie singulière et cauchemardesque, l’on m’introduit dans le nez un dispositif permettant d’enregistrer la moindre de mes respirations. Les infirmières (aides-soignantes ?) testent alors le bon fonctionnement des circuits, l’une d’elles s’adressant à l’autre, puis à moi, par l’intermédiaire d’une caméra et d’un microphone installés dans la chambre, à hauteur d’une télévision murale (j’ai déjà reconnu, parce que conçue à l’identique, la chambre que j’occupais quand j’avais séjourné dans l’aile voisine : même lavabo à droite de la porte, mêmes rampes supportant mêmes prises et accessoires électriques et médicaux, même cabinet de toilette au fond à droite, même fenêtre à gauche — pour constater, à mon grand soulagement, que le lit et le téléviseur étaient, eux, uniques, et que je serais le seul locataire du lieu —, nonobstant l’intrusion toujours possible (y compris dans dans le noir aussi, grâce à des capteurs infrarouges ?) d’un regard extérieur à tout moment…

Difficile de trouver plaisantes les perspectives de pareil séjour en repos dans une chambre !

— Et de me demander in petto comment, surtout, je vais pouvoir dormir, puisque la position ventrale paraît exclue. L’on m’a d’ailleurs prévenu que je ne pourrai me laver avant lundi — et que, en tout cas de cause, la sortie se ferait plus tard que je l’avais escompté,  guère avant 15 heures 30…

 

 

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