1384 - AUTOUR DU 12 AOÛT 2021 • Courriels à Duncan et à Judith (balise)

Publié le par 1rΩm1

 

 

1384 - AUTOUR DU 12 AOÛT 2021 • Courriels à Duncan et à Judith (balise)

 

Bonsoir Duncan,

Nous l’avons très souvent évoquée, et je sais que tu étais sensible à sa situation, et plus encore à la façon dont mon père avait pris ces dernières années en charge ma mère : celle-ci est décédée dans la nuit de dimanche à lundi, sans souffrance apparente, dans son sommeil.

Les quinze derniers mois, entre autres moments — nous en avons parlé quand nous nous sommes vus en juin —, auront été particulièrement longs et difficiles : c’est pourquoi l’on peut penser que c’est un soulagement, pour la personne elle-même, ainsi pour que ses proches, confrontés que nous étions à une déchéance inexorable, même si le chagrin est grand.

J’espère te revoir bientôt. Communique-moi ton adresse, ainsi que je l’avais demandé. J’ai passé quelques jours en Normandie la semaine dernière et j’aurais pu déjà encombrer ta boîte à lettres !

Je t’embrasse,

Romain

*  *  *

Ma chère Judith,

Quelques lignes pour t’informer du décès de ma mère, survenu dans la nuit de dimanche à lundi dernier. Les quinze derniers mois auront été été particulièrement longs et difficiles — tant et si bien que l’on peut penser que c’est un soulagement, et pour la personne elle-même, et pour tous les proches, confrontés que nous étions à sa déchéance inexorable.

Elle est morte dans mon sommeil, vers une heure du matin, sans souffrance — ce qui évidemment paraît l’essentiel. Quand, après qu’ils ont été prévenus, mon père et ma sœur sont allés la voir, elle semblait même apaisée.

 

Mon père m’a téléphoné le dimanche matin. J’avais déjà prévu d’écourter le séjour que je faisais à Dieppe, entamé six jours auparavant — prévu de rentrer dimanche plutôt que lundi.

Faute de la revoir vivante, je suis allé au funérarium lundi matin. Ma sœur m’avait glissé, quand nous avons dîné le dimanche chez mon père de me « préparer psychologiquement » à la vue de ce corps amaigri, qui s’était encore émacié et déjà presque momifié, habillé et comme grossièrement maquillé pour la circonstance. D’avoir été averti a amorti le choc.

 

La cérémonie a eu lieu jeudi et s’est déroulée, selon le vœu de mon père, dans la « stricte intimité familiale ». Nous étions huit — lui, ma sœur, mes deux nièces, le compagnon d’une d’elles, le (demi-)frère de ma mère, sa femme et moi — dans une petite salle du crématorium. Ni fleurs ni couronnes. Mon père a décliné la proposition du nocher des lieux de lire un court texte pour accompagner le moment…

La cérémonie a eu lieu jeudi et s’est déroulée, selon le vœu de mon père, dans la « stricte intimité familiale ». Nous étions huit — lui, ma sœur, mes deux nièces, le compagnon d’une d’elles, le (demi-)frère de ma mère, sa femme et moi — dans une petite salle du crématorium. Ni fleurs ni couronnes. Mon père a décliné la proposition du nocher des lieux de lire un court texte pour accompagner le moment…

Nous nous sommes recueillis — le terme me paraît juste à tous égards —, en silence, durant la quinzaine de minutes de chansons que mon père m’avait demandé d’enregistrer — les Vieux de Jacques Brel, Que serais-je sans toi ? de Jean Ferrat (à partir d’un poème d’Aragon), l’Absence, chanté par Reggiani. J’y avais ajouté Rémusat de Barbara — que j’avais déjà demandé à Patrice, le frère de J.-M, d’adjoindre aux morceaux que nous avons préparés, lui et moi, au moment du décès de J.-M., la mort de leur mère ayant précédé de quelques mois celle de J.-M. Cette fois, le sentiment de la dépossession (C’est drôle jamais on ne pense/Qu’au dessus de dix-huit ans/ On peut être une orpheline/ En étant plus une enfant) concernait ma propre mère, non celle de J.-M…

 

Durant la chanson de Jean Ferrat, j’ai vu, sans le regarder, que mon père pleurait. (Avais-je jamais vu mon père pleurer ?) Pendant le court moment où nous étions réunis dans une autre petite salle attenante avant d’assister — par vidéo — à l’ultime instant où le cercueil serait livré au crématoire (quelle idée, soit dit en passant, que cette mise en scène !), mon père a expliqué à la maigre assistance réunie là que ma mère aimait particulièrement les interprètes des chansons choisies et que toutes celles-ci avaient un lien avec la disparition ou l’absence — et que, d’ailleurs, tous lesdits interprètes étaient maintenant morts…

En sortant de l’endroit, je me suis fait confirmer que ce n’était pas dans ces bâtiments, qui entre-temps ont été déplacés et reconfigurés, que nous avions assisté à la cérémonie rendue en hommage à J.M…

 

Nous nous sommes retrouvés ensuite chez mon père, puis sommes allés déjeuner dans un restaurant indien un peu à l’extérieur de ****, rejoints par l’autre compagnon de mon autre nièce et leurs enfants.

C’est ainsi que j’avais fait la connaissance d’un petit-neveu de deux ans et demi et d’une petite-nièce (l’on dit ainsi, ou arrière-nièce ou …-neveu ? — je n’en sais même rien, peu au fait [à] pareil usage et n’ayant décidément que très peu « l’esprit de famille » !), dont je dois dire avoir été grandement étonné de les voir si calmes, le plus âgé en particulier, pourtant atteint de la varicelle et souffrant de démangeaisons qui ne lui auront valu que de courtes larmes après avoir gratté un très gros bouton au creux de la paume…

 

Mon père, depuis, semble surmonter l’épreuve. Il est passablement occupé à toutes sortes de formalités — et doit trouver un locataire après que la jeune fille du premier étage de l’immeuble (je ne regretterai guère sa présence bruyante au-dessus de ma chambre !) a donné son congé. Je l’ai aidé à passer une annonce — et à réserver un rendez-vous pour une troisième injection du “vaccin” contre le Covid ! Il doit aussi se faire opérer fin septembre du dos — et tentera d’en avancer éventuellement la date entre-temps.

 

Les jours passés à Dieppe et environs, avant tous ces événements, ont été agréables. J’étais parti deux jours avant un aller et retour de M.-C. entre le lieu où elle habite (à quinze kilomètres de Nancy) et son petit deux-pièces dieppois, bien arrangé et agréable, où elle m’a donc rejoint. Dieppe même, Varengéville-sur-Mer, les trois villes (Le Tréport, Mers-les-Bains, Eu), le Château de Miromesnil, Veules-les-Roses, Saint-Valéry-en-Caux, Rouen… m’ont — puis nous — ont doucement occupé. Et il n’a pas trop plu !

 

Depuis, il fait beau et chaud, bien trop à mon goût, mais il paraît qu’il va bien plus frais ces prochains jours.

 

J’espère que tout va bien de votre côté. Etes-vous déjà revenus de Interlaken et/ ou repartis entre-temps ? — je ne sais trop plus ce que vous aviez prévu…

Un fois que mon choc sera absorbé pour mon père, tout en prenant en compte les trois semaines post-opératoires où il n’aura pas le droit de conduire ainsi que mes propres rendez-vous médicaux, je compte passer une petite semaine à Paris, si possible en septembre. Je ne sais (donc) pas encore quand. Mais nous avons évoqué cette possibilité avec Pascal quand il m’a appelé — jeudi, je crois —, assez longuement, lui qui avait vu un certain nombre de fois ma mère.

 

Je serai content de venir et nous pourrons nous voir à ce moment-là et faire quelques expos ou musées.

Transmets mon salut à N. ainsi qu’aux enfants.

Et reçois d’affectueuses pensées,

Romain

 

 

 

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